Un silence brutal de Ron Rash

Un silence brutal de Ron RashUn silence brutal

Ron Rash

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Isabelle Reinharez

Gallimard

2019

257 pages

" [...] il arrive parfois que la loi et ce qui est juste s'opposent. "

De Ron Rash, j'ai tout lu, j'ai tout aimé mais à des degrés divers. J'avais peur de lire ce dernier roman, qui n'est d'ailleurs pas le dernier puisqu'il est paru aux Etats-Unis en 2015, parce que Marilyne avait été déçue...

Alors ?

Je crois sincèrement que je ne suis guère objective quand il s'agit de cet auteur. Mais pourquoi donc ? Je ne le connais pas personnellement, je ne l'ai jamais rencontré sur un salon du livre, il n'a jamais payé mes chroniques et pourtant, j'ai un petit faible pour lui... Il y a des choses qui ne s'expliquent pas.

L'intrigue ? Elle est tellement mince qu'il ne sert à rien de la raconter. Ne serait-elle pas seulement un prétexte à comprendre le mal-être des deux personnages principaux pour mieux appréhender leur rédemption ?

On peut simplement dire (sans déflorer le peu d'intrigue) qu'il y a deux narrateurs, des chapitres qui alternent l'un et l'autre. Et parfois, j'avoue que je me suis perdue, je croyais d'abord lire l'un et quelques lignes plus loin, je comprenais, au détour d'un accord, ou d'une parole que c'était l'autre. C'est le défaut de ce genre de narration quand les voix ne sont pas assez distinctes.

Pour l'instant, je ne crie pas au génie !

J'ai mis un peu de temps à entrer dans ce roman, je l'avoue humblement, mais il a su me toucher... un peu.

J'ai été particulièrement émue par le personnage de Becky, qui a subi un traumatisme, enfant, et qui a bien du mal à vivre avec. Les souvenirs jaillissent à tout moment. C'est d'ailleurs son histoire qui éclaire le titre français du roman. Above the waterfull, le titre original, correspond davantage à l'intrigue. Étonnant ce parti pris de choisir juste un angle de vue au détriment de l'évidence. Cela vient-il de l'éditeur ? De la traductrice ?

Revenons à ce personnage féminin, si proche de la nature. Je connais la raison pour laquelle son histoire m'a touchée en plein cœur, et notamment ce qu'elle a vécu enfant. C'est parce qu'elle a fait écho en moi avec ce que je vis dans mon métier lorsque nous devons faire des exercices de simulation " d'intrusion-attentat ", exercices qui traumatisent quelques-uns de mes élèves et qui génèrent en moi un flot d'images désagréables.

Mais tout ça est bien beau, je n'ai toujours pas dit ce que je pensais de ce roman dont je n'ai, en plus, rien raconté. Est-ce un billet pour ne rien dire ?

Allez, quelques points positifs : Ron Rash manie l'art de la suggestion avec brio. Au lecteur de combler ce qui n'est pas écrit ou de se faire ses propres images, l'auteur ne fait que mettre en marche l'imagination du lecteur. Et si Becky est un personnage qui a fait vibrer mon petit cœur, Gérald, avec son côté vieux bourru taiseux a su aussi me séduire. C'est un personnage récurrent chez Ron Rash mais qui me plait toujours.

Manifeste écologique ? Roman de la résilience ? Roman rural ? Roman noir ?

Très clairement, ce n'est pas un chef d'œuvre, mais on passe un moment agréable en sa compagnie. Je continuerai à acheter et lire les romans de Ron Rash, les yeux fermés, quoi qu'il en soit.


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