Spirou, l’espoir malgré tout – première partie

Chronique « Spirou, l’espoir malgré tout – première partie »

Scénario & dessin de ÉMILE BRAVO

Public conseillé : Ado / Adultes

Style : Historique / Humour / Aventure
Paru le 28 septembre 2018 aux éditions Dupuis
88 pages couleurs,
16,50 euros

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Ca commence comme ça…


Bruxelles, janvier 1940. Les habitants craignent l’arrivé de la guerre dans leur pays. Dans la rue, le jeune groom Spirou se rend à son travail. Interpellé par une jeune enfant, il va jouer le médiateur dans une bande d’enfants qui jouent à la guerre. Quand une de leur boules de neige, lestée d’une brique atterrit malencontreusement sur la tête d’un gendarme, c‘est lui qui se retrouve au poste. Heureusement pour le rouquin, le commissaire croit à son histoire d’accident et le relâche illico. A l’hôtel “Moustique”, Spirou arrive en retard. Mais quelle importance puisqu’il n’y a plus de clients…
Tandis qu’une lettre de son amoureuse lui parvient, Fantasio, qui s’est engagé dans l’armée belge, apparaît…

Ce que j’en pense


Emile Bravo, vous connaissez ? Cet auteur complet (scénario et dessin) s’est fait connaître et apprécié du public avec “Une épatante aventure de Jules” (6 tomes parus chez Dargaud). Cette série jeunesse alliait des qualités pédagogiques, de la vulgarisation scientifique et l’humour en généreuses doses. Un cocktail qui est sa marque de fabrique, ne serait pas complet si j’oubliais son dessin typé “ligne claire”.

En 2008, il est revenu sur le devant de la scène BD avec un très remarqué hors série de Spirou, titré “Le journal d’un ingénu”. Il mettait en scène le groom très jeune, avant ses premières aventures “officielles”. Le récit se situant avant la déclaration de la seconde guerre mondiale, le contexte historique lui permettrait de développer un personnage réaliste et touchant, en prise directe avec “le sens de l’histoire”….

Dix ans après, Émile Bravo continue l’exploration de son personnage dans un roman graphique en quatre parties. Cette fois-ci, la guerre est déclarée. Même si la Belgique espère échapper au fléau, elle n’est pas épargnée par l’occupation allemande. Spirou, comme le peuple belge, subit les premières conséquences de cette invasion militaire. Bombardements, arrestations sommaires, humiliations des juifs, il sera confronté aux “horreurs communes” de la guerre….

Vous l’aurez compris, Quand Emile Bravo s’empare de Spirou, ce n’est pas pour lui faire vivre une énième aventure bondissante, mais pour nous faire réfléchir sur la condition humaine. Car cet auteur est profondément humaniste, et ses personnages sont des variations sur l’attitude à opposer à la barbarie… Fantasio, toujours aussi gaffeur et impulsif, choisit de s’engager dans l’armée, même s’il ne sait pas très bien ce qu’il peut y trouver… Anselme, le paysan philosophe résiste à sa manière, en cachant ses vivres des allemands, pour nourrir ceux qui en ont besoin. Et puis, il y a Félix et Felka, le couple d’amis, artistes juifs allemands, persécutés autant par les belges que par les nazis… Tout ce petit monde complexe et multiple, Emile Bravo nous le fait découvrir et côtoyer en soignant situations et dialogues.

Dans ce terreau riche et documenté, son “Spirou” n’a rien d’un héros. Ce n’est qu’un adolescent (en partie enfant) qui va se poser des questions pour faire cohabiter ses valeurs dans ce temps de crise. Avec lui, chacun pourra trouver la ressource pour comprendre les enjeux, sans verser dans la moralisation.

Le dessin d’Émile Bravo est très reconnaissable dans un style “ligne claire” cher à Hergé. D’ailleurs, il s’en amuse, quand il fait changer de tenue à son rouquin, pour lui faire porter l’imperméable et la casquette du célèbre journaliste au petit chien blanc…
Si le texte est très présent, le découpage classique (4 strips par page) n‘en est pas moins fluide et le trait (extrêmement détaillé) très expressif. Enfin, l’ambiance couleur est assurée par une palette de couleurs sobres en aplats.
C’est vivant, ultra lisible et totalement au service de l’histoire et de ses personnages.

Spirou, l’espoir malgré tout – première partieCette chronique fait partie de la « BD DE LA SEMAINE ». Réunion chez Stéphie, cette semaine.


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois