Ces jours qui disparaissent - Timothé le Boucher

Ces jours qui disparaissent - Timothé le Boucher Lubin, acrobate de haut niveau, se réveille un matin alors qu’une journée entière vient de s’écouler. Ne comprenant pas comment il a pu dormir aussi longtemps, il constate dans les jours qui suivent que le phénomène se répète. Après avoir découvert que pendant ses « absences » une autre personnalité s’empare de son corps, Lubin essaie de comprendre et de communiquer avec cet autre « lui ». Mais ce dernier n’a pas du tout le même caractère et leur cohabitation s’avère impossible. L’alternance tourne au calvaire, tant pour le jeune homme que pour ses proches, et plus le temps passe plus son double semble prendre le dessus sur lui...
Ces jours qui disparaissent - Timothé le Boucher Je me suis demandé dans quoi l’auteur s’était embarqué, persuadé que sur la longueur, ça ne tiendrait pas. Trop compliqué de jouer sur les deux personnalités, d’avoir une alternance crédible, de donner une cohérence réaliste aux ellipses où « l’envahisseur » prend possession du corps de Lubin. Mais très vite on oublie ce fil narratif si délicat à gérer. On avance avec notre acrobate, on découvre avec lui l’étendue des dégâts à chacun de ses réveils, on s’émeut des amitiés indéfectibles, de la famille toujours présente, on comprend ceux qui n’ont pas supporté la situation. Surtout on approuve sans réserve la volonté de Lubin de profiter de chaque fenêtre d’existence qui s’ouvre à lui, de plus en plus en plus courte, de moins en moins lumineuse au fil des années qui passent.
La pagination conséquente permet à Timothé le Boucher de déployer son scénario en profondeur, de donner de l’épaisseur aux personnages secondaires tout en multipliant les rebondissements. Le dessin, parfois proche de celui de Bertrand Gatignol (Les Ogres-Dieux) est simple et efficace. Il participe grandement à la lisibilité d’une intrigue qui aurait pu rapidement se perdre dans une inextricable complexité. Je pense que la clé de la réussite est d’avoir centré l’histoire sur le point de vue de Lubin en occultant celui de son double. Cela permet de focaliser l’attention du lecteur sur un seul destin et de renforcer son empathie.
Ces jours qui disparaissent - Timothé le Boucher Différences incompatibles de personnalités dans un même corps, impossibilité de rattraper le temps perdu et de mener sa barque comme on le souhaite, impossibilité de s’imaginer une stabilité sociale et amoureuse, les problèmes soulevés par ce scénario d’une folle richesse sont innombrables. Entre schizophrénie, psychologie, psychanalyse, philosophie et paranoïa, cet album ratisse large sans jamais céder à la facilité. Au final, j’ai surtout envie de retenir la magnifique et poignante histoire d’amour que les jours qui disparaissent ne pourront effacer. Une BD qui exacerbe mon côté fleur bleue, je ne pensais pas dénicher ça un jour. Je m’empresse donc de remercier la douce fée qui a eu la gentillesse de me l’offrir à Noël.    
Ces jours qui disparaissent de Timothé le Boucher. Glénat, 2017. 192 pages. 22,50 euros.
Ces jours qui disparaissent - Timothé le Boucher


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois