Chronique « Les apprentissages de Colette »
Scénario et dessin de Annie Goetzinger,
Public conseillé : Adultes et adolescents (à partir de 16 ans),
Style : Biographie,
Paru aux éditions Dargaud, le 22 mars 2017, 24.95 euros,
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L’Histoire
Mai 1893, Chatillon-Coligny dans le Loiret. Agée d’à peine 20 ans, Sidonie-Gabrielle Colette épouse, lors d’une noce très modeste, Henry Gauthier Villars, dit “Willy”, Chroniqueur mondain dans le quotidien “L’Echo du soir”. L’homme, beaucoup plus âgé qu’elle, s’est épris (pas d’amour, quelle vulgarité !) de cette jeune et belle provinciale, à décrotter…
Sitôt installé dans leur appartement du Quartier Latin, Willy retrouve ses habitudes. Cheval le matin au Bois de Boulogne, travail d’écriture en journée, dîners et sorties la nuit venue. Très vite, la jeune femme s’ennuie et découvre que son mari a une réputation de coureur de jupons… Colette tombe en dépression, secourue par la présence de sa mère, Sido. Remise de ses “malheurs”, elle accepte une proposition de son mari : pour s’occuper, coucher sur papier ses souvenirs de jeunesse…
Ce que j’en pense
Annie Goetzinger est indéniablement une grande dame de la bande dessinée. Dessinatrice (entre autre) de “La Demoiselle de la Légion d’Honneur”, “La Diva et le Kriegspiel », “La Voyageuse de petite ceinture”, “Rayon dames” et la série policière “Agence Hardy”, elle nous livre la biographie d‘une des grandes icônes féminines de notre histoire. Auteure de “Chérie”, la série des “Claudine” et “Le blé en herbe”, Colette est une figure majeure de la littérature française, connue pour ses créations, tout autant que par sa « vie dissolue”.
Journaliste, écrivain, actrice et même scénariste de films, cette femme est la personnification de la liberté d’expression et des choix de vie ! Pourtant, pour la jeune Sidonie-Gabrielle Colette, ce n’était pas gagné d’avance. Née dans un milieu de bourgeoisie provinciale, la future Colette épouse un mari volage et plus vieux qu’elle. A Paris, elle découvre la sphère des mondains et presque par hasard, le plaisir d’écrire. Publié sous le nom de son mari, son premier roman, qui raconte sa jeunesse “Claudine” est un succès immédiat qui la plonge dans un nouveau monde !
Annie Goetzinger raconte cette biographie (de son mariage jusqu’à ses vieux jours) de façon chronologique. Mais c’est surtout, comme le titre le laisse supposer, le parcours initiatique de son héroïne qui l’intéresse… “Apprentissage” au sens romanesque du terme, Sidonie-Gabrielle Colette fait son éducation. L’écrit bien sur, sous l’impulsion de son pygmalion de mari, Willy. mais aussi l’apprentissage de la sensualité, pour sortir d’une vie conjugale qui ne la satisfait pas…
Au prix du scandale, Colette découvre la liberté amoureuse. Elle enchaîne (comme son mari) les amants et amours de passage. Entre deux messieurs, elle découvre l’amour entre femmes. Georgie, Natahlie Clifford-Barney (riche héritière américaine) et surtout “Missy”, son grand amour, Colette devient l’icône de l’amour saphique.
C’est d’ailleurs cette spécificité que l’imaginaire populaire a retenue. Pourtant, comme le souligne Annie Goetzinger, Colette ne se résume pas à cela. Personnage complexe et changeant, c’est une artiste reconnue sur les planches de théâtre comme en temps qu’écrivain.
Annie Goetzinger restitue tout en finesse ses goûts, sa grande soif de liberté et d’anticonformisme ! Au dessin, elle pose un trait léger et élégant. Je reconnaitrais entre toutes ses héroïnes belles, sensuelles et “classes” à la fois.
Attentives aux détails, Annie Goetzinger prend autant de plaisir à trouver la juste position des corps, qu’à détailler l’architecture (extérieure ou intérieure) de ce début de siècle. D’ailleurs, son style colle parfaitement à cette ambiance surannée et bourgeoise qui entoure Colette.
Les grandes cases (format roman graphique oblige) et la mise-en couleurs directe (tons légers et aériens) ont fini de me plonger dans la vie scandaleuse de son héroïne.
Pour résumer, vous avez envie d’un grand cri de liberté ? E si vous vous commenciez par lire “Les apprentissages de Colette”, avant de lire ses romans…
