Situé dans les montagnes Rocheuses, l'Overlook Palace passe pour être l'un des plus beaux lieux du monde. Confort, luxe, volupté... L'hiver, l'hôtel est fermé. Coupé du monde par le froid et la neige. Alors, seul l'habite un gardien. Celui qui a été engagé cet hiver-là s'appelle Jack Torrance : c'est un alcoolique, un écrivain raté, qui tente d'échapper au désespoir. Avec lui vivent sa femme, Wendy, et leur enfant, Danny. Danny qui possède le don de voir, de ressusciter les choses et les êtres que l'on croit disparus. Ce qu'il sent, lui, dans les cent dix chambres vides de l'Overlook Palace, c'est la présence du démon. Cauchemar ou réalité, le corps de cette femme assassinée ? ces bruits de fête qui dérivent dans les couloirs ? cette vie si étrange qui anime l'hôtel ?
Pourquoi ce livre ? Depuis quelques années je m’efforce de découvrir les grands classiques du King et ça passe forcément, à un moment ou à un autre, par ce titre. J’ai toujours eu peur de le regarder, m’attendant à de l’horreur pure, j’ai donc commencé par écouter le bouquin pour tester… et je me rends compte que ce n’est pas si horrifique que ce que je craignais.
Shining m’a bien plu pour son ambiance et les personnages. Stephen King a pris le temps de dresser le portrait de caractères variés mais cohérents. Le début ne présente pas vraiment d’action, on nous explique simplement pourquoi les personnages sont obligés de déménager dans cet hôtel dont ils vont devenir les gardiens pendant tout un hiver, coupés de tous. De quoi se forger rapidement une opinion, compassion ou dégoût, envers le trio familial et leurs “mésaventures”. Ce roman est donc une question d’ambiance - j’ai l’impression de me répéter depuis quelques chroniques sur cette fameuse ambiance. L’auteur nous distille pas mal de détails pouvant soulever un certain malaise et ça fonctionne parfaitement. Et quand apparaissent enfin les scènes cultes, le frisson est au rendez-vous.
Je ressors tout de même un peu déçue. Parce que je m’attendais à pire au niveau de l’horreur, alors que tout est distillé dans la narration. Même à la fin, quand le mal submerge entièrement un personnage, je suis restée sur ma faim. La petite course poursuite est intense mais pas suffisamment pour soulever mon inquiétude. De plus le mal est battu avec tellement de facilité… J’en attendais plus. La fin est trop brutale, on enchaîne directement sur l’épilogue, ca a été trop frustrant. En fait, je pense que je suis déçue tout simplement parce que Shining est un roman très réputé dans la production de King et je m’étais forgée une image d’originalité dans l’horreur du bouquin, avec quelque chose de plus sanglant, malsain. J’admets évidemment que certaines scènes m’ont donné quelques sueurs froides, d’autant plus qu’elles sont vues par les yeux d’un enfant, mais c’est finalement anecdotique dans l’épaisseur du récit.
Je suis d’ailleurs un peu déçue par le fait que Stephen King prête la voix à plusieurs personnages, quatre ou cinq. Or le style narratif n’évolue pas. Danny s’exprime et décrit ce qu’il voit exactement avec les mêmes termes et formulations que ses parents, je regrette que le style ne soit pas différent pour marquer les différentes personnalités et leurs âges respectifs.
Je suis même attachée à quelques personnages : Danny évidemment, qui n’a clairement pas une vie paradisiaque mais qui aime malgré tout ses parents, avec une foi aveugle, un amour candide. Au final, j’ai bien aimé le personnage de la mère, même si je pense qu’elle ne prend pas totalement ses responsabilités vis-à-vis de son fils : elle devrait prendre les décisions pour le protéger de la folie d’un autre. Ici, elle incarne la femme soumise qui n’ose pas s’éloigner de son mari malgré toutes les erreurs et les horreurs commises. Quant à Jack, il incarne toute cette ambiguïté déroutante entre le père et mari ingrat, le parfait connard, et le mec qui culpabilise énormément et devient alors le père gentil. J’ai beaucoup aimé le personnage du propriétaire de l’Overlook, qui équilibre parfaitement la figure masculine voire paternelle, avec une gentillesse exemplaire et une amitié sincère avec Danny qui s’illustre jusqu’à la fin.
Rien à ajouter de plus sur le style d’écriture, qui plante parfaitement l’ambiance. En fait, j’ai eu le sentiment d’être dans du Lovecraft, à peser le moindre mot pour nous plonger dans une atmosphère malaisante, suffocante.
J’ai donc écouté Shining via Audible. C’est le deuxième livre que j’écoute par ce biais et j’ai adoré. Le lecteur, Julien Chatelet, m’a plongé avec délice dans cet univers et cette ambiance. Déjà il parvient à donner une voix propre à chacun, et même celle de la femme ne m’a pas déplu, alors que c’est un exercice loin d’être évident. De plus il insuffle une certaine âme au récit et je ne pense pas mentir en disant que l’expérience a été enrichie par cette écoute, j’aurais sûrement moins bien apprécié le moment sans ça. Enfin, j’ai adoré les petits artifices employés pour sublimer le moment et rendre l’écoute très crédible. Par exemple, certains dialogues passent par le téléphone et le lecteur a utilisé un filtre sur le micro pour donner le sentiment d’être réellement au téléphone. C’est franchement parfait, à un point où j’irai voir ce qu’il a lu d’autres sur l’application !
Je suis contente d’avoir lu ce classique de la littérature fantastique horrifique, un classique de King également, avec ces personnages attachants et cette atmosphère prenante. Mais je suis déçue, m’attendant à plus de détails macabres, de scènes d’horreur, d’une façon plus poussive, plus tendue. Je suis restée sur ma faim. Ça reste une bonne lecture, doublée d’une excellente expérience d’écoute. J’écouterai la suite, par curiosité, l’an prochain.
14/20
Les autres titres de la saga :
1. Shining
2. Docteur Sleep
- saga terminée -