Celestia était reliée au continent par un pont. Ce pont, un groupuscule l’a fait sauter pour se protéger de l’invasion. Quelle invasion ? Aucune idée. A un moment, Pierrot et Dora s’enfuient, en bateau. Ils accostent près d’un château occupé par un gardien, la propriétaire et le fils de cette dernière. Ils vivent reclus, se sentent en sécurité, affirment qu’ils n’ont pas peur. Peur de quoi ? Aucune idée.
Quand Pierrot et Dora ont quitté Celestia, j’ai eu l’impression de tenir un truc. Le début de quelque chose de compréhensible. Mais quand le gamin de la proprio, du haut de ses 3 ans, leur a proposé de monter en voiture et de les conduire vers une destination inconnue, j’ai à nouveau perdu pied. Je ne vais pas aller plus loin dans ce résumé décousu, il dit la difficulté de trouver ses marques dans cette histoire dépourvue du moindre repère pour le lecteur. Un lecteur à qui il ne reste pas trente-six options après avoir entamé l’album. Première option : l’abandon. Deuxième option : s’accrocher et chercher absolument à comprendre. Dernière option : se laisse porter, naviguer à vue, accepter le côté irrationnel et se dire qu’on est face à une proposition intellectuelle et artistique difficilement cernable, dans son intégralité en tout cas.C’est cette dernière option qui s’est imposée à moi au fil des pages. Ok j’ai pas tout compris. Pour être honnête j’ai peut-être même rien compris. Mais le voyage auprès de Pierrot et Dora n’a pas pour autant été désagréable. L’atmosphère vaporeuse, l’ambiance onirique et souvent contemplative, la luminosité du dessin… il se dégage de l’ensemble un charme presque envoutant et assez inexplicable. Impossible de dire si j’ai aimé ou pas, impossible de le recommander à qui que ce soit mais au final impossible de ne pas reconnaître que j’ai vécu une sacrée expérience de lecture.
Celestia de Manuele Fior. Atrabile, 2020. 272 pages. 30,00 euros.