On le dit jamais assez souvent : le label indépendant de Urban Comics, Urban Indies, propose un catalogue de titres très intéressants comme le démontre l'une de ses dernières sorties, Isola, un récit d'heroic-fantasy très onirique proposée par Brenden Fletcher, Karl Kerschl et Msassyk.

Rook, la capitaine de la garde royale, a fui la capitale accompagnée de la reine Olwyn qui a été transformée en tigresse. Afin de faire revenir au plus vite la jeune femme sur le trône et éviter une guerre, elles partent en direction d'une île légendaire répondant au nom d'Isola. Mais le chemin est long et semé d'embûches.

Après avoir travaillé ensemble sur la série Gotham Academy pour DC Comics, Brenden Fletcher et Karl Kerschl se retrouvent sans Becky Cloonan afin de proposer leur propre série. On change donc carrément d'ambiance pour aller dans un monde d'heroic fantasy qui est fortement inspiré de celui de Nausicaä de la Vallée du Vent et de Princesse Monoké, les films d'animation de Hayao Miyazaki. Mais résumer l'oeuvre qu'à ça serait bien réducteur.

Fletcher et Kerschl nous dévoilent un univers qui leur propre mais pas de la manière la plus évidente. L'exposition de l'univers se fait petit à petit mais après nous avoir jeté dans le grand bain alors que Rook s'enfuie avec Olwyn déjà transformée en tigresse. Nous sommes projetés donc dans l'inconnu... un peu comme les deux héroïnes qui tentent d'aller sur une île qui n'existe peut-être pas.

L'univers heroic-fantasy est propre aux auteurs, la magie est omniprésente et la frontière entre réalité et imaginaire est assez ténue. Le but de l'histoire n'étant pas de rationaliser chaque élément fantastique mais plutôt de donner une saveur mythologique proche des Légendes arthuriennes avec des animaux de la forêt qui ont des comportements de créatures mythologiques, ou une sorcière qui emmène Olwyn dans un bad trip.

Tout cela n'a qu'un seul but, centrer notre attention sur la relation entre les deux femmes. D'un côté Rook, déterminée à sauver sa reine coûte que coûte, d'un autre Olwyn qui vit mal sa nouvelle forme et qui n'a pas l'air de supporter d'être aidée par sa capitaine de garde royale. Même si très rapidement (trop ?), elles vont être séparées, le lectorat, lui, va découvrir de plus en plus la motivation de chacune et, comme elles, se rendre compte qu'elles vont devoir collaborer afin de continuer leur voyage à travers un monde hostile.

L'histoire n'est pas sans défaut, les événements s'enchaînent très rapidement et nous ne sommes pas familiarisés aux personnages qu'elles sont déjà malmenées. Au regard de la fin de ce chapitre, cela donne presque l'impression de lire l'introduction d'une histoire. À vrai dire, ce n'est pas si grave parce que la lecture en vaut la peine.

Mais, la grande force de ce premier tome réside surtout dans son aspect visuel. Chaque page dessinée et colorisée par Kerschl et Msassyk est incroyablement belle, autant dans la composition des pages que dans la narration visuelle. Il y a des panels incroyablement détaillés et la colorisation très inspirée des animés apporte beaucoup de profondeur et contribue à la magie de certaines scènes.