Le Covid-19, une rédemption virale ?

Le Covid-19, une rédemption virale ?

Aujourd'hui, 21 mars 2020. C'est le printemps. La journée s'annonce belle. Le ciel vient de se défriper, il est six heures du matin. Des nuages blancs mouchetés de gris y glissent lentement. La journée aurait dû être belle. Elle sera confinée.

Confins... Un bien joli mot à l'origine qui évoque des contrées lointaines, des limites rêveuses entre des mondes, l'espace et le temps. Une géographie de l'imaginaire que le suffixe ment a suffi à reclure.

Oui je sais... ça fait chier. La mort nous rappelle toujours à l'ordre de notre petitesse et de notre finitude. Mais lorsqu'elle a le faciès d'une pandémie, elle draine dans son sillage une mémoire collective que l'on avait oublié. Hier, la peste, le choléra, la grippe espagnole, récemment le VIH/ Sida, la grippe H1N1, le SRAS ou le virus Ebola. Toutes ces épidémies révélatrices de nos peurs et de nos vulnérabilités défont l'ordre public, social, sanitaire et économique.

" Nous sommes en guerre ", nous assène un monsieur qui n'en a jamais livré aucune. Si ce n'est celle dans un bureau cloîtré de son ambition. Gouverner. L'orgueil de bien des Ponce-Pilate. L'honneur de quelques-uns. Rares.

Un mot, un seul. Guerre. Et l'entente sacrée est scellée. Un pour tous. Tous contre un. L'ennemi mondial numéro Un : le coronavirus version high teck, plus dangereux que ses cousins qui provoquent des rhumes inoffensifs. C'est oublier un peu vite que les hostilités ont été déclarées bien avant que nos corps deviennent un " champ de bataille ", siège d'un " conflit biologique " où force nous est faite de " mobiliser nos défenses " et où les " frappes doivent être ciblées ", afin de " vaincre cet ennemi qui nous a pris en otage " .

Mais suffit-il de monter au balcon pour applaudir en désespoir de corps celles et ceux qui nous sauvent la peau en risquant de perdre la leur, les mêmes que l'on a laissés se démerder seuls quand ils appelaient au secours dans nos rues, pour se convaincre que ce virus va se casser la couronne sur notre propension à résister ? Suffit-il de mettre un masque, hypothétique s'il en est, ou de se laver les mains au gel hydroalcoolique ou encore de polémiquer jusqu'à la nausée sur qui a fait quoi ou aurait dû faire ? Encore que résister ne soit pas le terme adéquat. Un mot trop grand pour nous. Depuis des mois, voire des années, il s'est barré aux confins de notre courage.

Imaginons un instant que nous ayons opposé à la défaillance systémique en Macronie de la politique, que l'étymologie du grec ancien décortique en polis, la Cité, et techné, la Science, définissant ainsi la science du gouvernement de la cité, un refus, lui aussi systémique face à ce grandiose détricotage social, économique, sanitaire et culturel. Ce " parle à mon cul, ma tête est malade " , d'une gouvernance sociopathe. Celle-là même qui conchiait depuis des mois l'ensemble du personnel médical et lui trouve soudainement des vertus roboratives. Serrons-nous les coudes, mes frères, notre vie est entre vos mains. Ne lésinez pas sur votre dévouement. On vous filera des masques. Enfin peut-être...

Imaginons un instant que plutôt que de tapiner dans les rues pour y manifester semaine après semaine, sans rien y obtenir d'autre qu'une répression étatique exponentielle, nous ayons opposé un Non inconditionnel, renvoyant nos gouvernants dans les confins de leur mépris et leur cynisme indécents. Mais non, chacun a préféré défendre d'abord et avant tout, son beefsteak. Les bourses s'effondrent, le pétrole également... Les marchés souffrent eux aussi d'hyperthermie, l'économie mondiale est contaminée. Et chaque acteur de boire la tasse. Remise à plat d'un système vérolé ? Ne rêvons pas... Chacun de ses protagonistes y lutte âprement pour sa survie.

La Nature est terrible, sans morale, indifférente et souveraine. Si l'on prête aux dieux et aux hommes le pouvoir de pardonner parfois, celle-ci ne pardonne jamais et ne fait jamais rien d'inutile. Ce virus qui semble également doté d'une fonction messianique dans ce monde en plein délabrement, vient nous le rappeler. Rudement.

© L'Ombre du Regard Ed., Mélanie Talcott - 21/03/2020.
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