C'est lundi, que lisez-vous? #278

Ce rendez-vous hebdomadaire consiste à vous présenter chaque lundi mes lectures passées, en cours et à venir en répondant à trois questions :-)

ALBUM

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Maman, j'ai encore raté l'avion et je suis perdu dans New-York. Kim SMITH. Editions Qilinn, 15 novembre 2019

Trois ans après l'adaptation en album de Maman j'ai raté l'avion, les éditions Qilinn publient la suite, et comme le premier volet, ce second est tout aussi réussi. Il y a bien quelques aménagements par rapport au film, que mes garçons se sont empressés de relever, mais l'ambiance est là avec New-York illuminé, le magasin de jouet, le plan de Kevin pour échapper aux deux méchants retrouvés (et recopié par mes garçons, comme pour le premier!).

On se régale et on rit!

ROMANS

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Notre part de cruauté.Araminta HALL. Editions Préludes, 4 septembre 2019

Notre part de cruauté est un thriller psychologique qui nous fait entrer dans la relation amoureuse de Mike et Verity. Ils s'aiment depuis l'université, ont instauré un Jeu, dont les règles (mouvantes) ont fixées par elle, mais leur histoire est finie. Mike a fauté, Verity s'est mariée avec Angus, et cela aurait dû en rester là, malgré les regrets et les remords qu'il ressent. Mais Mike est persuadé que cela fait partie du Jeu, même si cela va un peu loin quand même à son goût. Verity ne peut l'avoir abandonné, elle l'aime c'est certain. Alors il la suit, provoque des rencontres, voit des signes partout, se persuade, boit, analyse sans cesse, a du mal à tenir ses engagements professionnels... jusqu'au drame qui l'a conduit en prison et où nous le découvrons au début du roman.

Tout le livre nous raconte donc cette relation atypique et hors-norme au fil de trois parties, mais toujours depuis le point de vue de Mike. Un personnage qui m'a assez agacée par son côté passif. Seule la dernière, qui suit son procès, nous offre quelques autres perspectives, de personnes venues témoigner, et nous éclairant sur les caractères et agissements de Mike comme de Verity.

L'autrice, dans une postface, a souhaité nous donner la genèse et le pourquoi de son livre: dénoncer notre société patriarcale et le sexisme banalisé, dans lequel les femmes sont jugées pour des actes (ici le Jeu) qui n'inquiéteraient pas les hommes, en lieu et place de ceux qui pourraient leur être reprochés. Voilà pourquoi elle a utilisé le point de vue masculin, le féminin ayant déjà été trop de fois exploité selon elle. J'ai apprécié sa démarche qui m'a éclairée mais ne peut m'empêcher de m'interroger pour autant, car, soit, je n'ai pas bien saisi son but, et de me demander si j'ai bien compris son livre, soit sa manière de faire n'était pas bonne (et au vu du retour des autres Jurées du Grand Prix des Lectrices Elle, il semblerait que nous soyons plusieurs à nous questionner).

Un livre qui se lit plutôt bien malgré ses longueurs mais qui ne me laissera pas grand-chose.

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Dévorer le ciel.Paolo GIORDANO. Editions du Seuil, août 2019

Chaque été, Teresa passe ses vacances chez sa grand-mère maternelle, à Speziale, dans les Pouilles. Une nuit, elle aperçoit trois garçons qui se baignent, nus, dans la piscine. Chassés par son père, ils reviennent le lendemain pour s'excuser, et elle apprend ainsi qui ils sont (Bern, Tommaso et Nicola) et où ils vivent: un peu plus loin, dans une ferme appartenant à Cesare, le père de Nicola et l'oncle de Bern. On les dit différents, on dit que les garçons vont et viennent ici, ils sont tenus à distance par les gens du village. Cesare est un homme atypique, mystique qui récite des versets pour chaque moment de la journée ou épisode de la vie. Ce qui pèse sur les enfants autant que ça les guide. Ainsi se construisent-ils entre respect et rébellion. Teresa est à la fois en-dehors et admise.

C'est le début d'une histoire qui les liera d'abord chaque été puis pour la vie, malgré des coupures de quelques années, dans lesquelles des conflits se larvent et des secrets inavouables (mais finalement partagés) se fomentent. Amoureuse de Bern, personnage solaire et tourmenté, dès le premier regard, Teresa va tout abandonner pour lui, ses études à Turin, tourner le dos à ses parents, renoncer à sa vie confortable pour intégrer la petite communauté qui s'est construite à la ferme, après le drame(dont on apprend la teneur assez vite) et le départ de Cesare. Bern y a élu domicile avant d'être rejoint par Danco (qui a pris le rôle de chef) et son amie Giuliana, puis par Tommaso et sa copine Corinne. Eux six construisent un monde en autarcie, en harmonie avec la nature, un retour aux sources au rythme du temps, des saisons et de la météo. C'est dur mais gratifiant... Jusqu'à ce que les difficultés ne les séparent (à moins qu'elles ne soient que prétexte), laissant seuls Teresa et Bern, qui s'accrochent. A eux-mêmes, à la Vie, à la Nature, mais qui en sont trahis.

Le roman raconte en plusieurs temps leur histoire d'amour, les amitiés et dissensions, les idéaux de la jeunesse que la Vie trahit sans vergogne, qu'ils soient banals ou intimes. Dévorer le ciel est un roman de la désillusion, à la fois tendu vers l'avenir mais aussi rattaché au passé. Mais aussi sur la trace que nous laissons en nous-mêmes, chez les autres et sur cette Terre (en tant qu'individu, communauté et être humain en général). Il m'a renvoyée au roman de Paul Auster, Léviathan, qui interrogeait sur l'adulte que nous devenions et en quelle façon cet adulte se trahissait en grandissant.

Au-delà, j'ai beaucoup aimé la plume de l'auteur et les réflexions qu'ils instillent au gré des thèmes abordés. D'une manière plus personnelle, certains passages ont fortement résonné. Et cela contribue à apprécier ce roman.

BD

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Télémaque - Tome 1 - A la recherche d'Ulysse. Kid Toussaint et Kenny RUIZ. Editions Dupuis, mars 2018 (2019 pour notre édition)

Grâce aux 48H de la BD d'avril dernier, j'ai acheté cet album pour mon fils qui l'a dévoré (il a même eu le 2e tome peu après). Mais bien qu'il m'ait encouragée à le lire, ce n'est que maintenant que je l'ai fait, car j'étais un peu rebutée par le trait "carré" du dessin (comme attendu, sans me plaire, il ne me déplaît pas non plus). Eh bien, cela aurait été une erreur de passer à côté car cet album reprend avec brio L'Odyssée d'Homère, dans lequel il raconte le retour d'Ulysse sur son île, Ithaque, mais en se focalisant sur Télémaque. Il y a quelques changements et aménagements, mais je suis ravie que mon fils puisse lire la mythologie de cette manière-là, dans un genre (a BD) qu'il affectionne.

Dans ce premier tome, nous sommes quatre ans après la fin de la Guerre de Troie (résumée sur quatre planches) et Télémaque se lasse d'attendre le retour de son père, qu'il ne connaît pas. Il décide donc de s'enfuir pour le retrouver, où qu'il soit. C'est ainsi qu'il se rend à Pylos où il rencontre le Roi Nestor, ami et allié d'Ulysse, qui vient de changé de prétendant pour sa fille Polycaste. Au fils de Ménélas, il préfère désormais celui d'Achille.

Désireuse de choisir son destin, Polycaste voit en Achille le moyen d'échapper à ce mariage arrangé en s'enfuyant avec lui. Alors qu'ils sont en mer, ils font la rencontre d'Éole, le Dieu des Vents qu'Ulysse a invoqué pour rentrer sereinement chez lui mais à qui il aurait volé des vents qui auraient ensuite été mauvaisement libérés par ses hommes, semant la tempête. Après un pacte avec Éole, les deux adolescents repartent avec comme "cadeau", Zéphyr, vent de l'ouest.

Après avoir échappé aux sirènes, le trio arrive sur l'île aux Cyclopes, où Polycaste et Télémaque sont faits prisonniers par le Cyclope rendu aveugle par Ulysse. Ils rencontrent Junior, qui veut se faire appeler Personne (on devine grâce à qui), le fils du Cyclope. Passionné par les humains, Personne sait beaucoup de choses, en théorie, mais c'est grâce à lui qu'ils sont libérés et qu'ils se retrouvent à nouveau en mer vers l'île de Circé.

Dans le même temps, à Pylos, Ménélas apprend le choix de Nestor et les deux Rois changent leurs plans matrimoniaux en imaginant marier la fille du premier au fils du second. Ce qui donne lieu à quelques réflexions sur la condition féminine à l'époque.

Une série à poursuivre donc!

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Plus fort que la haine. Pascal BRESSON et René FOLLET. Editions Glénat, septembre 2014

1933, Louisiane, scierie de Kentwood.

Doug Winston est un jeune Noir plein de vigueur mais aussi plein de révolte. Les premières planches nous le montrent ans une tentative de fuite à-travers le bayou, sa prise puis la vengeance, le Klu Klux Klan, dirigé par le vieux Sanders. C'est son voisin, le vieux Greg qui l'aidera à canaliser sa haine et à apprendre à en tirer profit. Il lui offre ses gants de boxe et lui paie son billet pour la Nouvelle-Orléans où il va aller s'entraîner dans un club, livrer ses premiers matchs, jusqu'à gagner la ceinture dorée de Champion du Monde. Et malgré le racisme ambiant, être à la fois craint et respecté, même pour un Noir.

C'est grâce à sa magnifique couverture, et à ce boxeur, que mon regard a été attiré à la bibliothèque. Je l'ai emprunté sans rien savoir de l'histoire, et, sans m'attendre à quelque chose en particulier, je n'imaginais pas ce scénario. Et j'ai aimé qu'il nous transporte aux Etats-Unis, entre 1950 et 1950 (en gros), dans une Amérique encore ségrégationniste, foncièrement raciste mais aussi respectueuse du sport, et ici, de la boxe en particulier. Je regrette juste que l'album n'ait pas été plus long, pour permettre aux thèmes d'être davantage développés. De fait, il y a de grandes ellipses et certains passages me semblent survolés.

Quant au dessin, je l'ai trouvé sublime. En noir et blanc, vif et nerveux, se passant de mots ou presque, notamment lors des scènes de boxe.

Un album qui participera très certainement à l'African American History Month d'Enna, à venir en février!

2/ Que suis-je en train de lire en ce moment?

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Une famille presque normale. Matthias EDVARDSSON. Editiosn Sonatine, octobre 2019

Présentation de l'éditeur: Il n'existe pas de famille normale.
Faites connaissance avec la famille Sandell. Le père, Adam, est un pasteur respecté dans la petite ville de Lund, en Suède. Sa femme, Ulrika est une brillante avocate. Leur fille, Stella, dix-neuf ans, s'apprête à quitter le foyer pour un road trip en Asie du Sud-Est. C'est une famille normale, une famille comme les autres. Et comme toutes les autres familles de la ville, les Sandell sont horrifiés quand un important homme d'affaires, Christopher Olsen est retrouvé assassiné. Ils le sont plus encore quand, quelques jours plus tard la police vient arrêter Stella. Comment pouvait-elle connaître Olsen, et quelles raisons auraient pu la pousser à le tuer ? Il ne peut s'agir que d'une erreur judiciaire.
Dans ce récit en trois parties, chacun des membres de la famille tente à son tour de recomposer un puzzle dont il n'a pas toutes les pièces. C'est d'abord Adam qui s'exprime, puis Stella, et enfin Ulrika. Chaque fois, de nouvelles perspectives se font jour, la version précédente est remise en question, la vérité s'échappe. La seule évidence qui s'impose très vite, c'est qu'il n'existe aucune famille " normale ".
Plus qu'un thriller, une découverte exceptionnelle.

Voilà qui donne très envie n'est-ce pas?!

3/ Que vais-je lire ensuite?

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Girl. Edna O'BRIEN. Editiosn Sabine WESPIESER, 5 septembre 2019

Présentation de l'éditeur: Le nouveau roman d'Edna O'Brien laisse pantois. S'inspirant de l'histoire des lycéennes enlevées par Boko Haram en 2014, l'auteure irlandaise se glisse dans la peau d'une adolescente nigériane. Depuis l'irruption d'hommes en armes dans l'enceinte de l'école, on vit avec elle, comme en apnée, le rapt, la traversée de la jungle en camion, l'arrivée dans le camp, les mauvais traitements, et son mariage forcé à un djihadiste - avec pour corollaires le désarroi, la faim, la solitude et la terreur.
Le plus difficile commence pourtant quand la protagoniste de ce monologue halluciné parvient à s'évader, avec l'enfant qu'elle a eue en captivité. Celle qui, à sa toute petite fille, fera un soir dans la forêt un aveu déchirant - " Je ne suis pas assez grande pour être ta mère " - finira bien, après des jours de marche, par retrouver les siens. Et comprendre que rien ne sera jamais plus comme avant : dans leur regard, elle est devenue une " femme du bush ", coupable d'avoir souillé le sang de la communauté.
Girl bouleverse par son rythme et sa fureur à dire, à son extrême, le destin des femmes bafouées. Dans son obstination à s'en sortir et son inaltérable foi en la vie face à l'horreur, l'héroïne de ce roman magistral s'inscrit dans la lignée des figures féminines nourries par l'expérience de la jeune Edna O'Brien, mise au ban de son pays pour délit de liberté alors qu'elle avait à peine trente ans.
Soixante ans plus tard, celle qui est devenue l'un des plus grands écrivains de ce siècle nous offre un livre d'une sombre splendeur avec, malgré tout, au bout du tunnel, la tendresse et la beauté pour viatiques.
" Par un extraordinaire acte d'imagination, nous voici transportés dans l'univers intérieur d'une jeune fille violée et réduite en esclavage par les djihadistes nigérians. Elle leur échappe et, avec acharnement et ténacité, entreprend de reconstruire sa vie brisée. Girl est un livre courageux sur une âme courageuse. " J. M. Coetzee.

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Semaine 47 avec pour thème "Kawaii": La Princesse Kaguya d'Alice Brière-Haquet.

Semaine 48 avec pour thème "Photographie": Tu me prends en photo de marie-Francine Hébert

Semaine 49 avec pour thème "D comme Décembre" ou "D comme Décompte" et Batlhazar prépare Noël de Marie-Hélène Place

Semaine 50 avec pour thème "Renard" et Le renard Tokela de Pog

Semaien 51 avec pour thème "Paillettes" et Le livre Le Noël des Fées de Betty Bib.

C'est lundi, que lisez-vous? #278

Pour finir, je vous mets les liens des articles publiés la semaine passée et je vous souhaite de belles lectures et découvertes pour celles à venir!

Blandine

C'est lundi, que lisez-vous? #278


wallpaper-1019588
Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois