Nymphéas noirs

Chronique « NYMPHÉAS NOIRS »

Scénario de FRED DUVAL d’après le roman de BUSSI
Dessin de DIDIER CASSEGRAIN

Public conseillé : Ado / Adultes (à partir de 15 ans)

Style : Polar
Paru le 25 janvier 2019 aux éditions Dupuis, collection « Aire Libre »
144 pages couleurs
29,95 euros
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Ça commence comme ça…


Trois femmes vivent dans le célèbre village de Giverny, vous savez, celui qui donnait envie aux touristes du monde entier de venir voir le bassin aux Nymphéas de Monet. La première, une veuve de 80 ans possède un beau tableau. La deuxième, 36 ans, maîtresse de l’école, cherche l’amour. La troisième, une fillette de 11 ans a des talents de peintre…

Le 13 mai 2010, la vieille femme se promène. Elle découvre dans un petit rû le corps sans vie de Jérôme Merval, une plaie au coeur, le crâne défoncé et la tête sous l’eau. Ne se sentant pas l’âme d’une naïade, elle passe son chemin avec son chien. Dès que le crime est découvert, la police est sur place. L’inspecteur et son adjoint découvrent que la victime était connue dans le village. C’est un ophtalmologiste, coureur de jupons et amateur d’art. En fouillant le cadavre, ils découvrent une carte d’anniversaire…

Ce que j’en pense


J’avais adoré “Nymphéas noirs”, le roman de Michel Bussi. Alors quand j’ai appris que Fred Duval (scénariste de la série “Renaissance” dernièrement, mais aussi de très-très nombreux albums chez Delcourt) s’attaquait à l’adaptation de ce super polar, j’ai sauté de joie.
Après un peu d’attente (et oui, il a écrit un scénario prévu pour 144 pages quand même), le “précieux” était en ma possession.

Dès la première page, j’ai retrouvé l’ambiance particulière du roman original. Fred traduit avec précision ce polar qui “baigne” dans le petit village intemporel de Giverny, creuset mondialement célèbre des “Nymphéas” de Monet. Ce lieu hautement touristique, qui semble figé dans sa célébrité et ses paysages picturaux abrite un meurtrier. C’est Jérôme Merval, l’ophtalmologiste qui est passé de vie à trépas par un “triple meurtre” (une pierre sur le crâne, un coup de couteau au coeur pour finir la tête dans un rû…). La mise en scène est particulière, mais le lieutenant de Police et ses adjoints dirigent leurs recherches sur trois motifs parallèles. Le meurtre était il motivé par la jalousie (l’homme était un coureur de jupon), par le profit (l’homme était un grand amateur d’art) ou y’a t il une histoire d’enfant (une carte postale trouvée sur le cadavre) ?

Tandis que le l’enquête avance chaotiquement, « trois portraits de femmes” apparaissent régulièrement. Une vieille femme aigrie qui observe et semble savoir beaucoup de choses, une très séduisante trentenaire dont se rapproche dangereusement le policier et une fillette de 11 ans au talent pictural naissant… Mais quel est le lien entre ces femmes, l’enquête en cours et le meurtre ?
Fred Duval emmêle très habilement les histoires personnelles et l’enquête dans un jeux d’apparence et de cache-cache qui ne vous dévoilera la solution qu’à la toute fin…

Décidément, je trouve que Fred progresse de plus en plus. Sorti des séries de S.F. uchroniques musclées chez Delcourt (qu’il maîtrisait parfaitement), je le redécouvre à travers de nouveaux registres plus “subtils”. Certes, le terreau de base était beau, mais ”Nymphéas noirs” est à mon goût l’exemple parfait de l’adaptation BD réussie ! Les personnages sont vivants et attachants et le découpage est un petit bijou du genre, qui exploite la montée de la tension avec subtilité. On nage dans un temps suspendu et une enquête qui s’embourbe…

Au delà de ses compétences de scénariste, Fred a trouvé en Didier Cassegrain un collaborateur idéal pour ce projet. Pourtant, ce n’était pas évident. Cassegrain est, lui aussi, abonné aux séries futuristes musclées et aux héroïnes à la plastique avantageuse. Autrement dit, rien à voir avec l’ambiance feutrée de ce polar noir.
Et pourtant, son crayonné, élégant et dynamique, fait merveille. La composition est classique et ultra-lisible, mais c’est surtout l’ambiance colorée qui m’a séduit. La technique classique de Didier Cassegrain (de l’acrylique rehaussée au crayon) ambiance l’album d’un « ton pictural”</strong>. Il ne copie pas le style de Monet, mais évoque la peinture avec les décors naturels et l’utilisation des couleurs. Tantôt désaturées (comme “délavées”), tantôt irréalistes, les gammes colorées m’ont donné l’impression de naviguer dans un tableau
Ce parti-pris est d‘autant plus précieux que l’Art et ses arcanes est un des thèmes majeurs de l’album…

Alors, vous aussi, plongez la tête la première dans une enquête entre art, meurtres et vieilles histoires… Que vous connaissiez le roman original ou pas du tout, je vous garantis que le bain va vous plaire.

Nymphéas noirsCette chronique fait partie de la « BD DE LA SEMAINE ». Réunion chez Noukette, cette semaine.


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois