Chronique « LES HÉROS DU PEUPLE – TOME 1 – L’ASSASSIN SANS VISAGE »
Scénario de RÉGIS HAUTIÈRE & OLIVIER VATINE
Dessin de PATRICK BOUTIN-GAGNÉ
Public conseillé : Ado / Adultes
Style : Super héros/Policier
Paru le 26 septembre 2018 aux éditions COMIX BURO, collection Comics
56 pages couleurs,
14,50 euros
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Ca commence comme ça…
Alors qu’il vient de perdre la trace d’une voleuse à la tire, l’inspecteur Wan Chen est appelé pour se rendre sur une scène de crime. Une fois sur place, il découvre les corps de cinq dealers de seconde zone. Si l’enquête s’annonce dans un premier temps comme un simple règlement de comptes entre rivaux, celle-ci va vite se compliquer. En effet, l’inspecteur n’a comme seuls indices qu’un étrange message tiré du “livre rouge de Mao Zedong” retrouvé sur l’un des cadavres et le portrait-robot du tueur dressé par une fillette.
Ce que j’en pense
“Les héros du peuple” nous entraîne dans une Chine en plein développement industriel, un décor qui au final nous apparaît presque comme un personnage à part entière tant il influe directement sur l’intrigue. En effet, sous couvert d’une histoire de super héros Régis Hautière et Olivier Vatine nous dressent le portrait d’un pays tout en opposition. Ils nous dévoilent les subtilités d’une Chine ouverte au capitalisme tout en étant encore fortement ancrée dans son idéologisme communiste. Les lourdeurs administratives et rétention volontaire d’informations viennent, par exemple, alourdir considérablement l’enquête confiée à l’inspecteur Chen et sa coéquipière des services secrets madame Shao. Cependant, si cet aspect géopolitique tient une place importante dans ce récit, il ne reste pas moins un divertissement dans la lignée des Marvel et autres DC comics. C’est pourquoi nous retrouvons ici quelques constantes du genre comme l’organisation mafieuse cherchant à renverser le pouvoir afin de pouvoir prospérer librement ou la difficulté à vivre avec une identité secrète (Jia et son personnage en armure de samouraï). Une héroïne « de métal » qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler Iron man, tout comme l’école du professeur Tsu fait référence à celle du Professeur Xavier.
Pourtant « les héros du peuple » n’est pas un simple « copier-coller » des comics américains, puisque les auteurs apportent quelques trouvailles qui renouvellent le genre efficacement. Cela commence par le pouvoir de certains personnages comme le jeune Hundan Pang qui est capable d’accélérer le processus de vieillissement de la matière ou celui des jumeaux Ha-bi et Ha-bu qui se trouve décuplé s’ils se touchent.
Le développement de l’intrigue est lui aussi fort intéressant. En seulement une cinquantaine de pages, les auteurs arrivent à nous donner un nombre incroyable d’informations, que ce soit sur les personnages (ils prennent même le temps de nous exposer la vie privée de l’inspecteur Chen) ou sur les divers tenants et aboutissants de l’enquête. Les scénaristes mettent d’ailleurs tellement de « poêles sur le feu » en même temps que je suis curieux de découvrir comment ils vont réussir à boucler tout cela en seulement un tome.
D’un point de vue graphique l’artiste Patrick Boutin-Gagné opte lui pour une américanisation complète. En effet, les techniques utilisées ici sont sans conteste celles des Comics. Un style épuré allié à des couleurs « tape-à-l’œil » appliquées numériquement. Si cela n’est pas tout à fait dans la tradition des BD franco-belge, cela a le mérite de rendre les actions immersives et encore plus punchy. Mais là où le dessinateur m’a réellement accroché, c’est surtout dans la physionomie des personnages. Tous ont un style bien particulier de l’enfant chimpanzé tiré du conte chinois « Le roi singe » (qui a aussi inspiré San Goku à Akira Toriyama) à l’assassin au visage masqué une personne externe pourrait croire que ces personnages sont issus de séries différentes. Pourtant, il faut bien admettre que cela crée un ensemble cohérent.
Pour conclure, « les héros du peuple » est le mix idéal entre action et réflexion. Un dépaysement total qui donne vraiment envie de lire la suite (surtout avec le cliffhanger qu’il nous propose.).