Les vies de papier de Rabih Alameddine

Les vies de papier de Rabih Alameddine

Publié aux éditions Les Escales,

Aaliya Saleh, " dame âgée " de Beyrouth, est une anomalie. Divorcée, sans enfant, non croyante, elle s'est toujours rebellée contre les diktats de la société. Sa passion dans la vie, sa raison de vivre même, est la littérature. À tel point que, chaque année, elle traduit un de ses romans préférés en arabe avant de le ranger dans un tiroir. Les quelque trente-sept livres traduits par Aaliya au cours de sa vie n'ont donc jamais été lus par qui que ce soit. Ce portrait d'une femme solitaire en pleine crise existentielle oscille sans cesse entre passé et présent dans un Beyrouth en constante mutation. Tandis qu'elle essaye de maîtriser son corps vieillissant et la spontanéité de ses émotions, Aaliya doit faire face à une catastrophe inimaginable qui menace de faire voler sa vie en éclats.

Les Vies de papier est arrivé complètement par hasard dans ma PAL estivale. On me l'a donné au détour d'une conversation et je me suis dis " pourquoi pas? ". Ce n'est pas un roman facile d'accès. Il a une narration assez déstructurée, des références littéraires poussées mais demeure cependant passionnant.

Aaliya vit à Beyrouth. Elle est maintenant assez âgée pour nous raconter sa vie de libanaise à travers ses joies et ses peines passées. Dans une Beyrouth en guerre, en ruines, affamée mais toujours belle, Aaliya mène sa vie comme elle l'entend, elle qui a été répudiée par son mari mais qui a vu en ce divorce l'accès à une liberté inespérée.

Les Vies de papier est un roman qui conjugue la beauté des mots, l'amour pour la littérature. Aaliya lit depuis toute petite. Elle devient libraire complètement par hasard, dans un petit local miteux de Beyrouth. Elle traduit en arabe des œuvres littéraires qu'elle stocke dans une chambre de bonne pour le plaisir.

Aaliya va nous raconter son existence. Un souvenir lui fait penser à une personne, une anecdote lui rappelle un lieu. La narration va de pensée en pensée d'où parfois la difficulté de suivre le récit de sa vie. On alterne entre passé et présent, faisant des aller-retour continuels. C'est cependant passionnant. On la suit enfant puis jeune mariée puis femme accomplie dans une Beyrouth patriarcale où être une femme seule est mal considérée. Aaliya est une femme émancipée qui n'hésite pas à dormir avec son AK-47 à portée de main pendant la guerre. Ce portrait de femme est souvent drôle, parfois révoltant, toujours juste.

Les Vies de papier est aussi une formidable ode à la littérature. Aaliya vit entourée de ses livres. Elle vit littérature, parle littérature, mange littérature dans une ville à cent mille lieues de ses préoccupations intellectuelles. Le roman est truffé de citations, pas toujours évidentes à identifier ou à décrypter et rendent le récit érudit à l'image d'Aaliya finalement.

Les Vies de papier est une lecture passionnante et érudite qui rend hommage à la littérature et à Beyrouth les réunissant pour toujours à travers le personnage d'Aaliya.

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