Chronique « MIDNIGHT TALES – ACTE 1 »
Scénario de MATHIEU BABLET
Dessin de GUILLAUME SINGELIN, SOURYA, MATHIEU BABLET ET GAX
Genre : Aventure / fantastique / épouvante
Public : Adultes / Adolescents
Paru le 25 mai 2018 aux éditions Ankama, collection « 619 »
140 pages couleurs, 13,90 euros
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Ça commence comme ça…
Brattleboro, Etats-unis. Nuitamment, un groupe se rassemble pour une messe noire. 4 jeunes filles interrompent violemment le rassemblement. Elles dégainent des armes magiques (épées, arc, hache..) et massacrent les adorateurs. Ainsi, le démon invoqué disparaît dans son monde parallèle…
Les 4 filles s’allongent dans l’herbe pour récupérer. C’était leur dernière mission, car c’est la fin d’année. Bientôt, ce sera le départ pour l’université et la séparation entre ces 4 amies. Mais avant, elles se promettent de se retrouver au bal de fin d’année. D’ici là, ces 4 “sorcières” doivent ramener le jeune homme qu’elles ont sauvé d’un sacrifice. Mais une des filles remarque qu’un démon s’est caché dans la vieille grange…
Le Principe
Mathieu Bablet, vous connaissez ? Avec “Shangri-La”, ce jeune auteur avait créé l’événement et remporté le « Fauve d’or – Angoulême 2017 ». Après ce roman graphique S.F fleuve, son nouveau challenge (toujours édité chez Ankama) se nomme “Midnight Tales”.
Conservant le format des “Doggy Bag” (du label 619), il initie une série collective , autour d’un univers fantastico-épouvante. Chaque tome se découpe en 4 ou 5 histoires courtes finies, qui mettent en scène “L’Ordre de minuit”, une confrérie de “sorcières bienveillantes” qui luttent contre le mal.
Particularité intéressante du concept, les histoires (confiées à des dessinateurs/trices différent(e)s et scénarisés par Mathieu himself) se situent dans des contextes géographiques et sociétaux très typés.
Ce que j’en pense
Le premier récit, nommé “The last dance” nous embarque en Amérique du Nord. Là, 4 jeunes filles qui combattent ensemble le mal vont finir leur cycle d’étude. Certaines continueront l’High School, d’autres s’arrêteront là. C’est ce moment charnière pour des filles pas-comme-les-autres que Mathieu Bablet (scénario) et Guillaume Singelin (dessin) mettent en scène.
Le quatuor d’amies, façon “Buffy contre les Vampires”, semble plus embêté par la séparation annoncée que par la chasse aux monstres qui les occupent nuitamment. Enfin, presque, car un démon inconnu n’apparaît qu’à elles…
Même si je n’ai pas vécu ce moment particulier des jeunes américains, j’en ai été abreuvé, comme tout un chacun, à travers les films, séries et romans. C’est donc assez facile de se mettre dans la peau de ces jeunes sorcières. Les voir se débattre entre leurs problèmes personnels et combat contre le mal est assez rafraichissant. Le dessin tout rond de Guillaume Singelin, avec un côté “Manga” assumé, est parfaitement adapté à l’histoire. C’est hyper lisible et dynamique à la fois. Les couleurs très saturées renforcent l’ambiance “Young adults”. La fin est bien amenée et le mélange action-vie quotidienne est parfaitement maîtrisé. Un premier récit de choix.
“Samsara”, le deuxième récit dessiné par Sourya, nous amène sur les bords du Gange. Là bas, la vie et la mort se mélangent intimement. Le travail de 3 jeunes sorcières n’est pas de combattre le mal, mais d’accompagner les morts vers leur renaissance… A côté de ça, en tant que femmes indiennes, elles subissent les contraintes de cette société en mutation.
Avec un récit beaucoup plus sociétal que le premier, Mathieu Bablet évoque la dot dans la société indienne contemporaine et les risques encourues par les femmes dont les familles ne peuvent plus payer… Un sujet étonnant et difficile, qui trouve un écho dans notre société en ce temps de discussion sur les violences faites aux femmes…
Le dessin de Sourya mélange franco-belge et Manga (de grands yeux, des expressions exagérés et typées), et évoque parfaitement l’Inde moderne. Les couleurs solaires, le fourmillement de détails et les décors précis nous plongent directement dans ce mélange entre modernité et mythologie.
“Nightmare from the Shore” est le 3e récit de ce tome. Entièrement réalisé par Mathieu Bablet, il nous embarque dans le folklore de Cornouaille. Là, deux jeunes filles au rapport particuliers sont plongés dans les mythes des côtes anglaises et des îles englouties…
C’est un vrai récit d’épouvante, façon Lovecraft, rempli de démon, de monstres destructeurs et de pacte avec le sang, qu’il s’est gardé. Le dessin original et méticuleux de Mathieu, son sens de la narration dynamique, ses couleurs tout en camaïeux, m’ont vraiment touché.
Enfin, le dernier récit (très court) intitulé ”Devil’s Garden”, est le seul que je n’ai pas vraiment apprécié. Le dessin très géométrique et très nerveux de Gax, très nerveux ne m’attire pas et je n’ai pas réussi à passer outre.
En plus des récits dessinés,vous trouverez “Avant la tempête”, la nouvelle écrite par Elsa Bordier et illustré par Mathieu Bablet, ainsi que des fiches pédagogiques, qui éclairent sur les contextes sociétaux. Un premier tome riche et généreux !
Rassemblement
chez Noukette, cette semaine.