Mazzeru

Chronique « Mazzeru »

Scénario et dessin de Jules Stromboni,

Public conseillé : Adultes,

Style : Roman Graphique, fantastique,
Paru aux éditions Casterman, le 29 mars 2017, 29 euros,
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Ce que j’en pense

Mazzeru est à la fois un conte corse, une BD, un livre illustré, une chronique sociale et c’est superbe.
Mazzeru raconte l’histoire de deux adolescents corses au début du XXème siècle. L’histoire se déroule en montagne. Lui a un don mortifère : il pressent la mort des autres.
Leurs vies sont rudes : c’est l’époque où les enfants travaillent tôt auprès des parents. On ne parle pas d’école. On cause peu, du reste.
Ce silence est renforcé par l’absence de phylactères. C’est surprenant en BD mais le grand prix d’Angoulême pour Un océan d’amour de Lupano et Panaccione l’avait fait avec brio avant. A la différence de Un océan d’amour, dans Mazzeru, il y a des textes et des poèmes qui collent à l’histoire. Uns sorte de voie intérieure.

Mazzeru nous présente une Corse mythique avec son village accroché à sa montagne, isolé du progrès avec son mode de vie rural presque primitive : l’électricité n’est pas parvenue jusque-là. Et puis il y a les familles des adolescents, sordides, violentes mais attachants aussi. Il y a la tradition aussi, le rythme lent de la vie pastorale, des actes à faire, du travail quotidien. Parfois la joie s’invite, comme une bouffée d’air, dans ce rythme qui nous semble ralenti. Puis le conte démarre et la violence éclate !

Le dessin est magnifique. Chaque page est un tableau, chaque case s’observe ; on ne fait pas que glisser dessus ou de l’intégrer visuellement dans une vision globale de la page. Non avec Mazerru, vous allez rentrer dans chaque dessin. On ne peut pas vraiment parler de case car chaque page est un tout. Que ce soit une pleine page de paysage ou de rêve, ou une succession de dessins.

Vous serez étonnés par l’expression des visages. La nature aussi est magnifique, étonnante et omniprésente.
Toute l’histoire est en noir et blanc. Avec de rares planches légèrement colorées. La technique utilisée, elle-même mérite qu’on s’y attarde. Stromboli a quasiment fait de chaque page une lithographie : il a gratté des plaques d’acétate avec un clou pour ensuite l’encrer et révéler le dessin en négatif sur la feuille après encrage. Ce grattage donne des effets de rayures qui renforcent les effets de chaque dessin.
Vous lirez sans doute plusieurs fois Mazerru : Une fois en vous laissant porter par l’histoire et les planches, et une deuxième ou vous scruterez les détails de chaque dessin, chaque page.
Mazerru est un conte poétique rare, un conte philosophique, c’est une BD, un recueil de gravures, un livre.
C’est surtout superbe.

Mazzeru
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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois