L'envol

L'envol
L'envol   Frenenqer Paje, à peine dix-sept ans, a déjà vécu dans plein de pays. La seule constante est la main de fer de son père qui l'éduque avec une sévérité qui confine parfois à la cruauté. Un jour en se promenant en famille au souk, la jeune fille ose : elle exige de ramener chez elle un chat en piteux état. Avec cette rébellion en apparence anodine, Frenenqer avance d'un pas sur le chemin de l'indépendance, sachant que chaque tentative pour s'émanciper de l'autorité de son père, sera punie. Si un combat s'engage alors entre père et fille, Frenenqer se bat aussi contre elle-même : comment vouloir la liberté quand on est habituée à obéir et à être surveillée chaque minute de sa vie ? Car être libre, c'est précisément ce que lui propose Sangris, le chat qu'elle a sauvé et qui s'est transformé en jeune homme aux ailes magiques. Pas de famille, pas d'attachement, pas de règles, lui dit-il à chaque fois qu'il l emmène sur son dos découvrir des lieux du monde qu'ils choisissent ensemble. Mais Frenenqer est-elle prête à s'émanciper à ce point ?
L'envol
     Acheté sur un salon du livre y’a de cela deux ou trois ans, je n’avais pas su le terminer, faute de goût. Si j’ai réussi à atteindre le bout du bout ce coup-ci, c’est bien pour un défi familial (le premier à compléter une grille de 26 consignes gagne un resto, si j’ai bien compris ^^). Une règle demandait à lire un livre abandonné, c’est maintenant chose faite, et ça me débarrassera dans le même temps d’un livre qui me déplaît.

   Le résumé était pourtant accrocheur. Une jeune fille, prisonnière de sa famille pour résumer, qui va rencontrer un « chat » qui l’entraînera dans d’incroyables aventures. Même la couverture était belle : je ne supporte pas le rose habituellement, or là y’a un véritable mélange de couleurs qui plaît bien.   Eh ben, c’est pas pour autant que j’ai aimé le livre…
   Frenenqer (« retenue » dans une autre langue, non définie dans le livre) est une adolescente sans attache. Son père, architecte, a muté de trop nombreuses fois dans de trop nombreux pays, obligeant sa femme et sa fille à les suivre, pour finalement échouer dans une sorte d’oasis, un endroit à part où la couleur se définit seulement par des teintes de jaune et le ciel. C’est déjà en soi une tristesse, une fadeur indescriptible pour cet univers. Les formes et les couleurs sont importantes pour se représenter l’environnement dans lequel le personnage évolue, or ici, rien, nada. C’est un premier point à cause duquel ma lecture a eu du mal à aboutir.   Hormis cela, je trouve que l’intrigue n’avance pas beaucoup. Bon, j’admets que l’élément perturbateur, à savoir le chat qui n’en était pas vraiment un, arrive au bon moment : on a le temps d’assimiler les différents protagonistes et leur relation avant que le minou ne vienne mettre ses moustaches dans ce foutoir. En mettant cela de côté, la relation entre ledit faux minou et Frenenqer stagne un bon moment sans qu’ils sachent comment se définir, c’est un flou assez agaçant puisque le lecteur sait très bien comment ça va finir ! Grrrr.   Et puis tout à coup, alors qu’on avoisine les cinquante dernières pages, y’a un déclic dans la caboche de la jeune fille et, pfiou !, tous ses problèmes s’envolent, elle gagne en assurance alors qu’elle se plaint tout le long du récit de faire des choses folles et insensées, elle se rebelle et se libère à la fois. Enfin, ne croyez pas que je sois sans cœur, je suis extrêmement contente pour elle, mais ce n’est pas crédible que le revirement de situation intervienne sans que l’auteur ne jalonne précédemment son récit de nuances dans la personnalité qui expliqueraient cette évolution.   La fin est prévisible, quoiqu’elle ne manque pas de douceur. Cette fois-ci, je suis contente d’avoir tenu jusque-là, même si j’aurai préféré que l’intrigue soit moins fade.
   Le véritable enjeu de ce roman repose sur la relation père-fille, entre l’un qui recherche et attend la perfection de l’autre quand ce dernier se plie en quatre pour vainement plaire au premier. En tant que lecteur, on sent que cette inégalité dans les mœurs tient l’auteure à cœur, pourtant si elle souhaite faire changer cela, elle devrait plutôt écrire des livres plus matures, sans la romance, et directement destiné au paternel. Cela aurait plus d’impact.    Ici, cette relation orageuse entre le père et la fille n’était au final qu’un prétexte pour cette romance invisible, et c’est bien dommage que le thème ne soit pas traité avec davantage de sérieux.
   Néanmoins, ce livre est un appel aux voyages par le biais de Sangris. On découvre différents pays, existants ou non, ce qui appelle l’imagination ou non des lecteurs. Personnellement, je trouve que l’intérêt de ce livre repose avant tout sur ce point. C’est maigre, mais ça sauve les meubles.
   Frenenqer est donc une jeune fille complètement ferrée dans l’éducation abusive de son père. Ce dernier est prêt à l’oblige à fermer la même porte pendant trente minutes pour que sa fille sache la fermer correctement en silence. Avec un père aussi tyrannique, comment la jeune fille a-t-elle pu tenir jusque ses quinze seize ans sans se rebeller ? Et l’estime de soi, il est où ? Bien sûr, la timidité est une maladie handicapante, mais dans le cercle familial, la parole devrait être plus facile. Bref, ça ‘a agacé tout du long. Et puis, j’ai l’impression que la jeune fille imite son père avec son amie Anju, qui est devenue au fil du temps sa secrétaire. C’est elle qui lui dit les cours qu’elle doit avoir, ses rendez-vous, etc. Ca me dépasse complètement… Et puis à toujours se plaindre ou à hésiter de commettre telle ou telle action par crainte que les parents le découvrent… Bref, Frenenqer est pour moi une entité décalée de la réalité.   Sangris apparaît tout de suite comme plus chaleureux. Être libre et pensant, le fait qu’il ne connaît aucune frontière va être une véritable bouffée d’air frais pour sa véritable amie. Seulement, on se demande comment a-t-il pu s’enticher d’une fille pareille, prisonnière de ses craintes ? Mystère et boule de gomme. Sa soumission progressive m’a fait retourner le nez à plusieurs reprises mais soit. De toute façon, vu les gros défauts des autres personnages, il reste malgré tout le meilleur d’entre eux – et je suppose que c’est un fait voulu de l’auteure, histoire que les lectrices apprécient encore plus ce roman.
   Le style d’écriture est aussi lourd que la chaleur de l’oasis. Pour le coup, si je n’ai pas apprécié le style en lui-même, je trouve qu’il correspond bien à l’environnement dans lequel l’héroïne évolue, de ce fait, cela fait ressortir la note réaliste et on se sent davantage imprégné de cette chaleur étouffante. J’aurai souhaité plus de finesse dans la tournure des phrases, mais puisque cela concorde avec la moiteur de l’oasis, je considère que cela reste un bon point, maigre mais bon tout de même.      En conclusion, ce livre avait de bons projets en perspective entre les voyages, l’autorité parentale qui tourne en tyrannie constante et les déménagements qui engendrent un manque d’attache plongeant dans une solitude écoeurante. Pourtant la perception de ces thèmes forts est gâchée par un récit indéniablement focalisé sur une romance décousue et difficile à croire. Les personnages sont aussi fades que les décors et la fin arrive quasiment comme un cheveux sur la soupe. Je ressors peu convaincue de cette lecture et ne saurait la conseiller.
L'envol
06/20
L'envol

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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois