Shi (T1) – Au commencement il y avait la colère

Chronique « Shi, tome 1 »

Scénario de Zidrou, dessin de Homs,

Public conseillé : Adultes/grands ado (+ de 16 ans)

Style : Thriller,
Paru aux éditions Dargaud, le 20 janvier 2017, 13.99 euros,
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L’Histoire

Lionel Barrington, PDG d’une usine d’armements « intelligents » est rassuré. La cours d’appel vient de rejeter les accusations portés à son encontre, après la mort « accidentelle » du jeune Mustafa, qui a succombé aux blessures dues à une mine construite par sa société. Le PDG sort et parade avec son petit monde, femme et enfant compris.
Soudainement, devant ses yeux, son jeune fils saute sur une mine anti-personnelle ! Sa femme se précipite pour lui porter assistance… et déclenche une nouvelle explosion…
Londres, mai 1851. Le colonel Winterfield visite la première exposition universelle. Accompagné de sa femme, son neveux, son fils Henri et sa jeune fille, Jennifer, le petit groupe s’extasie devant le « Crystal Palace », un magnifique dôme de verre. Quand une petite fille des rues surgit pour mendier, Jennifer s’interpose devant son père qui se prépare à la rosser. Elle lui donne une pièce et évite l’esclandre.
Pour accomplir sa nouvelle passion, la photographie, la jeune femme se dirige dans le pavillon japonais. En prenant un cliché, elle comprend que la jeune femme tient dans ses bras un enfant mort…

Ce qu’on en pense

par Nathalie Je crois que cette année, je suis expressément attirée par des titres dans lesquels les héroïnes sont des femmes fortes !

J’ai été surprise en commençant cette lecture. Quand j’ai regardé (et admiré !) la couverture, je m’attendais à me retrouver fin 1800, début 1900. Pourtant, l’histoire s’ouvre à Londres à notre époque… Zidrou relate le résultat d’un procès qui vient de s’achever, où l’accusé, un riche industriel vient d’apprendre qu’il a gagné. Va se produire une grande catastrophe qui nous emmène à l’époque attendue….

Dans cette histoire, que ce soit Miss Winterfield ou la jeune Japonaise qu’elle va sauver, les deux femmes font preuve d’une force incroyable. Dans cette époque de machos, c’est plutôt courageux . Elles vont être chahutées par des hommes qui pensent que les femmes sont justes bonnes à se marier et fermer leur (très jolie) bouche….. Mais voilà notre Miss ne veut pas de cette vie là. Elle aime la photo, l’aventure et a soif d’une grande justice.

Une fois de plus, j’ai été bluffée par un très grand scénario. Plus besoin de présenter ce grand auteur qu’est Zidrou. Comme à chaque fois (et je ne m’en lasse pas), il m’emporte dans ses histoires. Je suis prise dans une folle et haletante ritournelle et j’espère que ça ne s’arrêtera pas ! Je suis vraiment droguée…

De plus, cette fois-ci, j’ai affaire à deux grand ! En plus de ce magnifique scénario, j’ai la chance de goûter aux somptueux traits d’un grand dessinateur espagnol, José Homs. J’avais déjà craqué pour les deux volumes de son très beau « Angélus » paru chez Dupuis. Les personnages sont beaux et les paysages exceptionnels ! Dans l’architecture des monuments de l’exposition universelle, je pourrais y passer des heures, pour être imprégnée de tout son talent… C’est une série où je vais perdre perdre sur chacune des planches.

Pour résumer, cette bande dessinée est juste magnifique ! Vraiment, l’année 2017 commence avec le plus beau !

par Jacques Que Zidrou, l’auteur de « Que faisait donc le roi de Sicile ? » et « Les beaux étés » s’attaque à la BD d’aventure, ça peut étonner ! Et pourtant, c’est le pari qu’il relève avec Homs, le dessinateur espagnol du « Millenium » adapté par Sylvain Runberg. Pour autant, il n’abandonne pas totalement ses sujets d’intérêts (la société et ses oubliés), car il raconte la trajectoire particulière d’une femme dans la société Victorienne. Choisi avec soin, ce contexte historique lui permet d’aborder les sujets qui fâchent : la bourgeoisie face aux déshérités, la “supériorité” de l’empire britannique et surtout la condition des femmes

En pleine exposition universelle, le récit colle aux basques d’une famille “bien comme il faut ». ??, le patriarche ancien-militaire sûr de sa force et de sa raison, le fils qu’il faut transformer « en homme », et Jennifer, la jeune femme juste bonne à marier. Zidrou fait voler en éclats le vernis des bonnes mœurs de cette société corrompue et dégénérée. Société secrète d’ex-militaires traumatisés par la guerre, séparation stricte des sexes qui permet aux hommes toutes les perversions, corruption de la force publique… Dans cette mascarade sociale, seuls, Jennifer et son oncle semblent encore capable d’un peu d’empathie et d’humanité… Le catalyseur vient d’une jeune femme japonaise « exposée » comme un objet, qui tient dans ses bras son fils mort depuis plusieurs jours… C’est sombre, c’est dur. Une fois encore, Zidrou appuie là où ça fait mal avec un réalisme cru et violent !

Au dessin, Homs nous offre un dessin puissant et très expressif. Ce dessinateur qui compose des planches d’un grand dynamisme, fait merveille dans ce contexte historique référencé. Personnages semi-caricaturaux, gueules expressives et déformées par les émotions, grandes cases immersives des halls de l’exposition et scènes d’action, il impose un visuel de haute tenue ! De plus, la couleur directe nous plonge dans une ambiance magnifique.

Pour résumer, ce duo d’auteurs inédit (Zidrou, le « social » et Homs, le « visuel ») nous offre un premier tome magnifique, entre thriller et brûlot social. Petit peuple opprimé, femmes bafouées, empire colonial violent et castrateur, la société victorienne est brossée dans une aventure sombre, à déguster sans modération !

Shi (T1) – Au commencement il y avait la colèrebouton_amazon