Nos étoiles contraires - John Green

Nos étoiles contraires - John Green

Green © Nathan 2013

Je suis un lecteur curieux. J’aime plein de genres différents mais faut pas pousser. En fait, ce qui me plait c’est la littérature qui gratte, qui pique, une littérature nerveuse et à vif. J’apprécie plus que tout naviguer avec les sans grades, les paumés, les losers. Me perdre dans les vapeurs d’alcool et de vomi, me rouler avec eux sur un couvre lit crasseux dans la chambre d’un hôtel miteux  aux murs tâchés de graisse et de tabac. Par pour rien que mon idole littéraire s’appelle Bukowski. Un gars qui a écrit  « se gratter les hémorroïdes jusqu’au sang, c’est meilleur que la baise. » Un gars qui a intitulé une de ses nouvelles « Tous les trous du cul de la terre et le mien. » Bref, un insupportable misanthrope alcoolique dont la plume corrosive et drôlissime m’enchante depuis plus de vingt ans.
Tout ça pour dire que passer de Bukowski à un roman mettant en scène des ados cancéreux en phase terminale, c’est faire un grand écart auquel  mon entrejambe et ma curiosité de lecteur risquait de ne pas résister.  Pourquoi m’y lancer alors, me direz-vous. Parce que quand Stéphie, Noukette, Hérisson et Leiloona font du même roman un coup de cœur, ça interpelle. Et comme en général l’avis de ces quatre lectrices expertes n’est pas à prendre à la légère, vous vous dites que ce serait couillon de passer à coté d’un texte qu’elles ont adoré. Alors du coup vous foncez à la librairie…
Nos étoiles contraires, c’est l’histoire d’Hazel et d’Augustus. Ils se rencontrent dans un groupe de soutien pour cancéreux. Elle a 16 ans et un cancer de la thyroïde dont les métastases ont migré vers les poumons.  Condamnée à plus ou moins brève échéance, elle s’accroche sans se plaindre. Lui a eu une tumeur osseuse sur une jambe et a dû être amputé. Semble depuis en rémission.  Pas envie de vous en dire beaucoup plus mais sachez juste qu’entre eux, le courant va tout de suite passer. Sachez aussi qu’il est question d’un livre et d’un écrivain antipathique en diable. Sachez pour finir que Nos étoiles contraires est un petit bijou. 
C’est un bijou parce que les malades que l’on rencontre sont des jeunes gens avant tout. Certes ils souffrent dans leur chair et ont plus souvent qu’à leur tour le moral dans les chaussettes. Mais ils font preuve d’une belle lucidité, d’une bonne dose d’humour et d’une délicieuse répartie. Et puis ils envisagent l’amour pour ce qu’il devrait toujours être : quelque chose de simple et de léger, une évidence face à laquelle il ne sert à rien de résister. Et c’est aussi et surtout un bijou parce que John Green n’a pas l’indécence de nous faire croire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes et qu’à  la fin une issue favorable est possible. Tout cela sans aucun pathos. Je pourrais ajouter que j’ai aimé ce vieux salopard de Van Houten comme j’ai aimé la dignité des parents d’Hazel, leur approche « intelligente » et tellement touchante de la maladie de leur fille. En fait je crois que j’ai toute aimé, la finesse du propos, ces personnages incarnés à la psychologie tellement bien construite que je ne suis pas près de les oublier. Nombreux sont ceux avant moi à avoir qualifié ce texte de « lumineux ». Je crois que c’est tout à fait ça.
Non, je n’ai pas pleuré en refermant ce livre. Pas même un sanglot dans la gorge. Il n’empêche. Cette magnifique histoire m’a touché, m’a secoué, m’a fait sourire, m’a profondément ému  et a fendu le cœur de pierre que l’on me prête (à juste titre) depuis des années. Un livre dont il ne faut pas avoir peur malgré le terrible sujet qu’il aborde. Un livre que je n’ai pas fini de prêter, assurément.
Nos étoiles contraires de John Green. Nathan, 2013. 330 pages. 16,50 euros.
Les avis de Hérisson ; Leiloona ; Noukette ; Stéphie.


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois