Les petites filles modèles • Comtesse de Ségur

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Éditions du Rey, 2021 (233 pages)

Ma note : 18/20

La première phrase

" Mme de Fleurville était la mère de deux petites filles, bonnes, gentilles, aimables, et qui avaient l'une pour l'autre le plus tendre attachement. "

Mon avis ...

Madame de Fleurville vit en pleine campagne, dans son château normand, en compagnie de ses deux filles : Camille et Madeleine. Suite à un accident de calèche qui aurait pu être fatal, elles accueillent Madame de Rosbourg et la petite Marguerite. Se dessine un quotidien fait de rires, de jeux, de promenades dans la forêt. Puis, Sophie de Réan revient des Amériques. Sophie est désormais orpheline, et fait régulièrement les frais des méthodes brutales de sa belle-mère. Par sa douceur et son soutien, Madame de Fleurville parviendra-t-elle à faire de Sophie une petite fille modèle ? Car aussi chipie soit-elle, notre héroïne aimerait tellement se montrer aussi sage que ses petites voisines.

Deuxième volet de la trilogie de Fleurville, Les petites filles modèles (1858) conserve pour moi ce doux parfum propre à l'enfance. Petite, je m'identifiais surtout au personnage de Madeleine qui est plus calme que sa soeur, et j'aimais forcément beaucoup Madame de Fleurville tant elle se montre tendre et protectrice envers Sophie qui traverse bien des drames et injustices.

L'ensemble a certes vieilli, oui. On demande à nos petites filles modèles d'être pieuses et charitables (la religion tenait une place très importante à l'époque) ; Camille attrape la petite vérole ; et Sophie, mordue par un chien enragé, reçoit (pour seul et unique soin) un rinçage de la plaie à grande eau ! Ces sujets ne parleront plus aux petits lecteurs d'aujourd'hui. Reste qu'ils s'y retrouveront sur d'autres thématiques telles que la force de l'amitié, l'amour maternel, l'intérêt d'obéir aux adultes afin d'éviter des situations bien embêtantes, ou encore tous ces petits moments si légers qui font le sel de l'enfance.

Comme pour Les malheurs de Sophie, Les petites filles modèles offre une photographie de l'aristocratie du Second Empire. La domesticité et le monde paysan ne sont pas oubliés : la misère du peuple et la place des domestiques sont ici particulièrement illustrées. Cette trilogie n'est donc pas uniquement réservée à un public jeunesse ; il est tout à fait intéressant de s'y pencher avec un regard adulte pour mieux se représenter le quotidien de cette époque.

Autre intérêt, la comtesse de Ségur a sans doute mis beaucoup d'elle-même dans cet écrit. On pourrait imaginer le château de Fleurville comme illustration de son (cher) domaine des Nouettes, lui aussi situé en Normandie. Et que dire de notre petite Sophie qui fait tant face au fouet de Madame Fichini... On sait que la comtesse (née Rostopchine) a vécu une enfance stricte voire très rude en Russie. Lorsqu'il s'agit d'esquisser les portraits de ses petites filles modèles, la comtesse de Ségur ne peut en tout cas pas se montrer plus claire. Elle s'est ainsi inspirée de ses propres petites-filles : Camille et Madeleine de Malaret.

Les petites filles modèles est donc un écrit plus profond, plus engagé, qu'on pourrait le penser au premier abord. La comtesse de Ségur tourne en ridicule le personnage de Madame Fichini, mais fait surtout passer le message que tout acte de violence / maltraitance sur un enfant va avoir un impact très fort sur le développement et la manière dont cet enfant pourra ensuite se construire. Ce regard était peut-être novateur dans cette société de la seconde moitié du XIXe siècle, non ?

Cette lecture reste un coup de cœur dans ma vie de lectrice. Et quel bonheur de retrouver ses dix ans le temps de quelques pages ! J'ai adoré me goinfrer de cassis (en cachette) en compagnie de Sophie ; m'émerveiller face aux préparatifs de la fête des lampions à Fleurville, ou encore m'inquiéter pour Sophie et Marguerite lorsqu'elles manquent de passer la nuit dans la forêt. Je compte bien sûr poursuivre sur ma lancée en ouvrant Les vacances (1859) cet été, un roman où les hommes (qui jusque là se montrent totalement absents) occupent une place plus importante dans l'intrigue.

Extraits ...

" - Quel Bonheur ! s'écrièrent toutes les enfants; quelles bonnes vacances nous allons passer !
Les vacances et les cousins arrivèrent peu de jours après. Le bonheur des enfants dura deux mois, pendants lesquels il se passa tant d'événements intéressants que ce même volume ne pourrait en contenir le récit. Mais j'espère bien vous les raconter en jour. "

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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois