Mais d’où vient donc cette petite lumière?

Mais d’où vient donc cette petite lumière?

La petite lumière (Grégory Panaccione – D’après le roman d’Antonio Moresco – Editions Delcourt)

« Je suis venu ici pour disparaître, dans ce hameau abandonné et désert dont je suis le seul habitant. » C’est ce que se dit un vieil homme qui a décidé de s’extraire du monde pour mieux se préparer au grand départ. En venant s’établir dans ce petit coin de montagne déserté par tous ses habitants, il est persuadé d’être totalement coupé de la civilisation. Mais l’est-il vraiment? Chaque nuit, lorsqu’il s’installe devant sa maison pour contempler les étoiles, il aperçoit une petite lumière qui s’allume soudain sur la montagne d’en face. C’est étrange car personne n’est censé habiter là et il n’y a aucun autre signe de vie humaine. « Qu’est-ce que ça peut bien être? Qui peut bien l’allumer? Est-ce que c’est une lumière qui filtre d’une petite maison solitaire dans les bois? Ou bien d’un réverbère resté là-haut dans un autre hameau inhabité comme celui-ci, encore relié au réseau électrique, qu’une simple impulsion allume toujours à la même heure? » Le vieil homme se creuse les méninges, mais il ne parvient pas à comprendre d’où provient cette mystérieuse petite lumière. Il finit même par en perdre le sommeil. En observant la montagne d’en face avec des jumelles, il croit apercevoir une petite maison, mais qui peut vivre là-haut, au milieu des bois? Rongé par la curiosité, il décide de se rendre au village pour demander aux habitants s’ils savent d’où vient ce point lumineux. Ils lui répondent que personne ne peut habiter là-haut, car il n’y a que de la forêt. Mais peut-être s’agit-il d’un OVNI? Ce ne serait pas la première fois qu’on en aperçoit dans le coin. Il y a même un expert dans un village voisin, qui note sur une carte toutes les apparitions extraterrestres dans la région. Et il y en a beaucoup! « Ils descendent ici parce que c’est des zones inhabitées », affirme l’expert des aliens au vieil homme. Perplexe, celui-ci n’est pas vraiment convaincu par cette explication farfelue. Plutôt que de se fier à l’avis des locaux, il décide d’aller voir de ses propres yeux d’où peut bien venir cette fameuse petite lumière. Avec sa vieille Fiat Panda, il part à l’assaut de la montagne d’en face pour découvrir si quelqu’un occupe la maison aperçue dans ses jumelles. Une fois là-bas, il va faire une rencontre plutôt surprenante…

Mais d’où vient donc cette petite lumière?

Révélé par le magnifique roman graphique muet « Un océan d’amour » (en duo avec Wilfrid Lupano), le dessinateur Grégory Panaccione a prouvé à plusieurs reprises depuis lors qu’il a un réel talent pour les adaptations de romans en bande dessinée. Il y a deux ans, il avait signé le très réussi « Quelqu’un à qui parler », la version BD du roman du même nom de Cyril Massarotto. Cette année, il est de retour avec « La petite lumière », l’adaptation dessinée d’un livre du romancier italien Antonio Moresco. Une fois de plus, le résultat est très convaincant, puisque sa version graphique de « La petite lumière » est un mélange subtil de fantastique et d’émotion. Il s’agit d’une bande dessinée singulière et envoûtante, dans laquelle les dessins clairs-obscurs de Grégory Panaccione, qui plairont à coup sûr aux amoureux de la nature et de la montagne, parviennent à donner vie à l’ambiance particulière d’un village abandonné. Un décor qui se révèle tour à tour reposant ou angoissant. Mais surtout, « La petite lumière » est une histoire quasiment métaphysique sur le cycle de la vie. Il y a un côté surnaturel et parfois un peu angoissant à ce roman graphique sur le lent cheminement d’un vieil homme vers la mort, mais il y a aussi et surtout beaucoup de poésie, de tendresse et d’amour. En d’autres mots, c’est clairement l’un des plus beaux romans graphiques parus cette année. Cette réussite, on la doit aussi un peu à l’écrivain Daniel Pennac puisque c’est lui qui a conseillé à Grégory Panaccione de lire le roman « La petite lumière » d’Antonio Moresco. Il était en effet persuadé que le dessinateur français, avec lequel il avait travaillé sur l’adaptation BD de son livre « Cabot-Caboche », était l’artiste idéal pour traduire graphiquement le livre du romancier italien. Clairement, il ne s’était pas trompé.