Retrouver Fiona – Dalie Farah

Je me suis intéressée à ce livre dans le but de comprendre " l'incompréhensible " affaire Fiona, du nom de la fillette âgée de 5 ans disparue en mai 2013 à Clermont-Ferrand et dont le dénouement affreusement improbable a bouleversé la France entière. Faussement enlevée, Fiona est morte sous les coups de sa mère, Cécile Bourgeon et de son beau-père Berkane Makhlouf, qui ont ensuite orchestré l'abandon du corps qui n'a jamais été retrouvé et la comédie de la famille éplorée devant les journalistes et la justice.

Dalie Farah est clermontoise, elle a été touchée de près par cette affaire car d'une part elle vivait à quelques pas du parc Monjuzet, endroit où la petite fille a soi-disant disparue au cours d'une sortie avec sa mère, et d'autre part car elle a également été victime de violences parentales lorsqu'elle était enfant. Sa quête obsessionnelle de comprendre le mécanisme de la violence envers les enfants l'incite à mener " une enquête littéraire " sur l'affaire durant neuf ans avant d'écrire ce livre. Dès le départ, elle a assisté aux recherches comme nombre de voisins qui refusent l'inacceptable. Elle a ensuite suivi l'affaire de près et assiste aux multiples procès jusqu'à la condamnation en 2020 à 20 et 18 ans de prison pour Cécile Bourgeon et son compagnon.

Mon avis est mitigé sur ce livre. Bien évidemment dans les faits racontés, j'ai été touchée, bouleversée au souvenir de cette affaire qui à l'époque m'avait déjà considérablement choquée, ayant moi-même une enfant du même âge que Fiona à la même période, mon incompréhension était totale face à cette mère (enceinte) qui joue devant les caméras à un jeu sordide et ce durant quatre mois et 1/2. J'ai donc apprécié trouver des mots, un ressenti sur cette affaire, autre que les articles de journaux. Dalie Farah analyse l'affaire de son propre point de vue, en apportant son propre rapport à l'évênement, qui comme un jeu de miroir lui évoque son enfance violentée. L'introspection est profonde, douloureuse tout en restant froide, détachée. On sent l'autrice emplie de haine, de colère par rapport à son propre vécu. On la sent consternée par l'inaction, l'inefficacité du gouvernement, des services sociaux, de l'éducation nationale, des médecins (un médecin consulté par C.Bourgeon a fait un certificat d'absence scolaire de 21 jours pour Fiona sans avoir vu l'enfant!!). Consternée, comment peut-il en être autrement ? A travers ses mots, on parvient à comprendre que cette quête soit devenue obsessionnelle. Les réflexions sur les violences faites aux enfants sont terriblement pertinentes, claquantes. Quelle place donne t-on aux enfants, qui sont pourtant nos adultes de demain dans notre société? Certains reprocheront à l'auteure de vouloir faire de l'argent sur un fait divers, (c'est toujours le cas à propos de qui ose écrire sur un fait divers), mais à tort à mon avis, car écrire sur Fiona c'est d'abord refuser de l'oublier, refuser la banalisation de la violence et éveiller (ou plutôt secouer) les consciences car comme le prouvent les aveux tardifs de la mère, Fiona était régulièrement frappée : n'y a t-il jamais eu aucun témoin ? N'aurait-on pas pu tirer la sonnette d'alarme avant que le pire ne soit commis?

Le point négatif en ce qui me concerne est lié au style épuré, haché que j'ai eu peine à suivre. J'ai souvent eu l'impression de me perdre dans un fouillis de faits, de ressentis, d'allers et retours à différentes époques. Je m'attendais à un récit construit mais il tient plus du monologue incessant, épuisant parfois. Le livre est relativement court, ce qui m'a permis d'aller au bout de ce témoignage pour lequel l'adjectif " littéraire " ne convient pas. Mais ce n'est que mon humble avis !

Je remercie les Editions Grasset via Netgalley pour cette lecture.


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois