Un premier tome qui pose félinement le décor et les personnages.
Emma est une félichatte au pelage roux, qui vit à Adamantine. Cela fait d'elle une ouvrière. Tant mieux, car elle est très habile de ses pattes.
Emma travaille pour l'atelier de son père, un lapidaire réputé. Elle taille les cristaux mieux que personne. Un vrai petit génie.
Emma est muette. Ses babines sont scellées. Elle a toujours été comme ça. Ce n'est pas si grave, car elle a appris à rester à l'écart... Pour ne pas gêner les autres, et parce qu'Emma est terriblement timide.
Tout n'est pas parfait, mais Emma se contente de ce qu'elle a... Pour l'instant. Car hélas, le destin est toujours en mouvement. Et il suffit d'une chanson - une seule - pour bouleverser le cours d'une vie.
Je voudrais tout d'abord commencer par remercier Arnaud A.L. Pirodon pour m'avoir proposé son livre en SP via le site SimPlement.
Je tiens à préciser que les images qui servent à illustrer ma chronique ne sont pas mon œuvre, ni ma propriété, ni trouvées au hasard sur Internet. Ce sont des dessins faits pas l'auteur lui-même et trouvés sur sa page facebook.
J'en profite pour valider la catégorie n°63 Concernant la plume d'Du fait de son mutisme et de sa timidité, elle ne peut aller vers les autres ni communiquer avec eux, qui n'en ont d'ailleurs aucune envie. Même ses collègues de l'atelier ne lui adressent pas la parole, bien qu'elle soit la fille du patron. Ses parent, en revanche l'aiment vraiment mais, sans pour autant essayer de complètement la comprendre.
(Livre dans lequel vous retrouvez un mot qui peut aussi être un prénom) du Défi Lecture 2023. "Elle ne mérite aucune clémence." p130
Concernant la couverture, réalisée par l'auteur, elle est simple et sobre, mais je trouve qu'elle colle bien au roman. On y voit un félichat, probablement Emma qui donne une impression de tristesse et de solitude, ainsi qu'une note de musique. Elle semble viser un public young adult.
Arnaud A.L. Pirodon, je l'ai trouvée agréable et fluide, parfois un peu poétique dans sa façon de raisonner. Si j'ai écrit ci-dessus que la couverture pouvait laisser penser à une lecture young adult, le contenu, lui, me fait penser (et c'est tout à fait personnel) que ce ne serait pas forcément le bon public, trop impatient certainement, pour cet ouvrage où il y a peu d'humour, peu d'action et beaucoup de remise en question de la protagoniste et du mode de fonctionnement de sa ville.
Emma est une jeune félichatte rousse qui vit à Adamantine. Son père est le meilleur lapidaire de la ville et elle n'y est pas pour rien : elle a de l'or dans les pattes et taille les pierresprits comme personne. Tout pourrait aller pour le mieux pour elle si elle n'était pas muette et timide. La différence, quelle qu'elle soit, n'est pas bien perçue dans cette ville de prestige où chacun doit être bien à sa place.
Pour exemple, les félichats se distinguent par leur pelage : les roux sont ouvriers, les unis blancs et gris sont nobles, les tachetés sont domestiques, les tigrés sont gardes... Chacun a sa place et y évoluer n'est pas aisé. Il faut montrer un travail acharné, parfois oublier qui on est vraiment, et avoir les bonnes relations si l'on veut s'élever. La filouterie de l'ombre semble aussi fonctionner. Donc, forcément, ceux qui n'entrent pas dans les cases dérangent. C'est le cas d'Emma.
Un jour, Emma va être amenée à écouter jouer un groupe et à essuyer une déconvenue traumatisante qui va l'amener à faire d'autres découvertes peu agréables. Elle va énormément souffrir et se remettre en question, tout comme le système sur lequel fonctionne Adamantine. Mais cette musique, ce groupe et leur recherche de la Geste Parfaite l'obsèdent, ce qui va la pousser à faire des choses dont elle ne se serait jamais cru capable quelques jours auparavant.
Nous avons donc uniquement les pensées d'Emma pour nous rendre compte de ce qu'il se passe en elle. La jeune félichatte ne fait pas de vagues, reste dans son coin et n'embête personne, sous le regard hautain et méprisant de son grand frère Yahm qui, bien que la détestant lui aussi, semble paradoxalement être le seul qui la comprenne et qui sache à quoi elle pense. C'est un personnage méchant et sournois, mais pas du tout dénué d'intérêt.
Maintenant, la révolte gronde en elle. Emma est obligée de se taire (bah oui, je vous rappelle qu'elle est muette), mais elle ne veut plus le faire. Pourquoi doit-elle souffrir de sa différence ? Pourquoi doit-elle aspirer à ce que l'on attend d'elle sans prendre en compte ce qu'elle veut elle ? Pourquoi doit-elle être obligée de porter ce masque qui l'étouffe avec ses faux-semblants ? Emma veut vivre, tout simplement.
J'ai apprécié son personnage. Il lui aura fallu du temps, de la musique et prendre des coups (au sens propre comme au figuré) pour enfin se voir telle qu'elle était réellement et non cette parodie d'elle-même qui faisait tout ce que l'on attendait d'elle. Je l'ai trouvée attachante à sa façon. Du coup, comme évoqué plus haut, ce tome retrace beaucoup les états d'âme d'Emma, sa remise en question, sa façon de se voir, de se découvrir sous un nouveau jour, d'être dégoûtée par sa façon de vivre, et celle des autres... Même s'il est synonyme de beaucoup de premières fois pour la jeune félichatte (pas toutes agréables, loin de là), ce n'est pas du tout l'action qui prédomine. Du coup l'histoire peut sembler un peu poussive. En résumé, j'ai tout de même passé un bon moment entre les pages de ce livre, malgré un manque d'action. L'ambiance de la ville est assez pesante et on ressent toute la souffrance d'Emma, cette jeune félichatte muette, qui a passé toute sa vie à jouer un personnage pour tenter de rentrer dans les cases établies, malgré son handicap. Même si c'était un peu long, j'ai apprécié le cheminement qui la pousse à en avoir marre et à sa révolter contre ce système injuste. J'ai beaucoup apprécié le but du groupe et l'espoir qu'ils y placent. Le tout est servi par une plume agréable et fluide qui joue parfois avec la poésie et qui aborde des sujets importants.
J'ai aussi aimé côtoyer les membres du groupe qui, malgré un but commun, ont tous des personnalités bien différentes les uns des autres. Eux aussi, on s'y attache rapidement, que ce soit Théoctave et son côté paternel protecteur, Pam et sa gentillesse, Kan' et sa façon de grogner, Noë et son sérieux sans oublier Cléandre et son côté joyeux. Je suis vraiment curieuse de savoir ce qui les a fait se rencontrer, ce qui les a poussé à former un groupe et à partir à la recherche d'une légende, celle de la Geste Parfaite.
Mais les thèmes abordés sont à la fois multiples et importants, tels le rejet face au handicap, l'ambition, la tromperie, les faux-semblants, l'étiquette, l'élévation sociale, l'espoir...
J'ai envie de connaître la suite et de voir quelles aventures vont vivre ces personnages.
Pour le dévorer, c'est par ici .