Clap de fin réussi pour « L’Arabe du futur »

Clap de fin réussi pour « L’Arabe du futur »

L’Arabe du futur 6 – Une jeunesse au Moyen-Orient (1994-2011) (Riad Sattouf – Editions Allary)

Au début de ce sixième et dernier tome de « L’Arabe du futur », Riad Sattouf a 16 ans. Nous sommes en 1994 et il vit à Rennes avec son frère Yahya et sa mère Clémentine. Celle-ci a sombré dans une profonde dépression depuis que son ex-mari est reparti en Syrie en enlevant Fadi, leur plus jeune fils. Progressivement, l’idée de faire revenir son enfant en France devient pour elle une véritable obsession. Sous l’emprise de sa voyante, elle finit même par se faire arnaquer par un avocat beau parleur, qui parvient à lui soutirer une grosse somme en lui promettant de se rendre à Damas pour soi-disant ramener son mari à la raison. Elle écrit également plusieurs lettres au président Chirac en lui demandant d’intervenir auprès du président syrien Hafez el-Assad. Mais à son plus grand désespoir, toutes ses démarches restent parfaitement vaines. De son côté, Riad ne vit pas non plus la meilleure période de sa vie. Non seulement ses bulletins scolaires sont catastrophiques, mais en plus il est persuadé que tout le monde le déteste, il est traumatisé à l’idée de devoir faire son service militaire et les filles de sa classe ne s’intéressent absolument pas à lui en raison de son physique ingrat. Il y a bien cette fille moche qui le drague, mais il jette ses lettres à la poubelle avant même de les ouvrir… En résumé, on peut dire que Riad est un ado mou et apathique dans toute sa splendeur, au grand dam de sa mère et ses grands-parents. Pour ne rien arranger, il a en permanence la petite voix de son père qui lui parle dans sa tête, généralement pour lui transmettre des idées négatives ou le rabaisser. Pas étonnant, dès lors, que le jeune Riad se considère à l’époque comme une sorte de « semi-psychopathe, aux yeux mi-clos de fourbe et à l’énergie psychique uniquement dévolue à la production de pensées sexuelles fantasmatiques ». Mais il y a de la lumière au bout du tunnel car désormais, son rêve est de devenir auteur de BD, même si son père trouve que ce n’est pas un vrai métier et refuse de le soutenir. Heureusement, grâce à un dessin de nymphe dans lequel il met tout son coeur, Riad parvient à convaincre son grand-père de financer ses études dans une école privée de dessin à Nantes. C’est le premier pas sur le long chemin vers la gloire… qui passera également par des années de psychothérapie.

Clap de fin réussi pour « L’Arabe du futur »

« L’Arabe du futur » est l’un des phénomènes éditoriaux de ces dernières années. Depuis la sortie du premier tome en 2014, cette série au ton unique s’est vendue à plus de 3 millions d’exemplaires. Elle a également été traduite en 23 langues, ce qui démontre qu’il s’agit d’une série à portée universelle, qui plaît à un public extrêmement large. « L’Arabe du futur » est pourtant une série très personnelle puisque l’auteur Riad Sattouf, né d’une mère française et d’un père syrien, y raconte son enfance et son adolescence, de la Libye du colonel Kadhafi à la Syrie d’Hafez Al-Assad en passant par la Bretagne. Malgré le succès énorme de « L’Arabe du futur », qui pourrait l’inciter à prolonger l’aventure, Riad Sattouf a aujourd’hui le courage et le bon goût d’y mettre un point final. Ce sixième tome couvre en effet les années de 1994 à 2011, entre les dernières années de Riad au lycée et le moment où sa carrière décolle pour de bon, notamment grâce au succès de sa série « Pascal Brutal » et de son film « Les Beaux Gosses ». L’auteur passe donc à la vitesse supérieure, puisque les 5 premiers tomes prenaient leur temps pour couvrir les 16 premières années de son existence, tandis que cet ultime album couvre à lui seul les 17 années suivantes. C’est ce qui donne à cet album une narration beaucoup plus rythmée. Ce qui n’empêche pas l’auteur de conserver son talent inné de conteur et de dialoguiste. On peut dire que ce sixième album est un bouquet final très réussi, car Riad Sattouf y reste d’une authenticité totale pour aborder des thématiques essentielles, en particulier sa relation compliquée avec son père, la fin de vie de ses grands-parents et ses séances de psychothérapie. Le tout raconté avec beaucoup d’humour, de tendresse et d’émotion. Pour les bédéphiles, cet album est un régal car on y suit les premiers pas de Riad Sattouf en tant qu’auteur de BD, depuis les séances de dédicaces sans personne dans des festivals de province aux multiples refus des grandes maisons d’édition. Mais surtout, on y voit ses belles rencontres avec des grands noms du Neuvième Art. Notamment celle avec l’éditeur Guy Vidal, qui lui donnera un ultime coup de pouce avant de tirer sa révérence quelques mois plus tard. Mais aussi avec Emile Bravo, l’auteur de « L’espoir malgré tout », dont le soutien et les encouragements seront déterminants dans la carrière de Riad Sattouf. « Avant d’être un auteur, Emile est un bon être humain, très intéressé par les autres », explique-t-il dans une interview au journal Le Soir. « Pour lui, la bande dessinée n’est pas une fin en soi, mais une manière de s’exprimer. Et ça, c’était nouveau pour moi. Emile m’a conseillé de vivre des choses, de m’intéresser au monde, de lire des livres, avant de faire des bandes dessinées et de raconter ma vie. C’est grâce à lui que je rencontrerai Joann Sfar, Christophe Blain et Mathieu Sapin. Emile est sincèrement intéressé par les autres. » 


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois