Crions, c'est le jour du fracas - Héloïse Guay de Bellissen

Crions, c'est le jour du fracas - Héloïse Guay de Bellissen

Présentation
1861: une centaine de garçons sont envoyés à la colonie pénitentiaire de l'île du Levant, bagne privé pour mineurs au large d'Hyères. Coupés du reste du monde, les "colons", délinquants, orphelins, enfants des rues, sont broyés par une discipline de fer.
1866: une révolte s'achève par la mort de treize d'entre eux lors d'un incendie.
130 ans plus tard, à l'époque de Kurt Cobain et des Pixies, à quelques encablures de là, une bande d'adolescents qui peinent à trouver leur place dans le monde se préparent à un destin tragique. Comment, à l'adolescence, se rebeller contre son sort sans s'autodétruire ?

Avis
Comment associer cette photo datant de 1900 avec ce titre, cri d'une révolte? Il n'est jamais bon de regarder derrière soi mais l'autrice l'a fait pendant le confinement, pour se remémorer son adolescence et le bons moments passés avec sa bande de copains. Elle se remémore notamment ce jour où suite à une blague, deux de ses amis se retrouvent en cours d'histoire pendant le reste de la bande sèche les cours. Ils reviennent avec l'histoire d'un bagne pour mineurs non loin d'eux sur l'île du Levant où une révolte a eu lieu en 1866 et pendant laquelle treize enfants ont trouvé la mort.
L'idée de départ était plutôt bonne, donner à ces enfants délinquants ou orphelins, une éducation et leur apprendre un métier lié à la terre. Sauf que confier leur surveillance à des gardiens " jeunes, et tous illettrés" n'était peut-être pas la meilleure chose à faire: " ce qu'ils savent faire, c'est fermer des portes, administrer des punitions, et être parfaitement idiots. Ils appliquent sans réfléchir une discipline militaire. Le juge reste persuadé qu'ils ont d'autres fonctions, celles qui se greffent toujours quand la bêtise et le pouvoir sont dans la même main."
En tout cas dans cette colonie agricole qui était en fait un pénitencier, rien n'est fait pour leurs montrer le droit chemin, affamés, punis et travaillant comme des forcenés ces enfants étaient réduit au silence par un règlement absurde. " Comment des chants et des cris d'enfants peuvent-ils être interdits? Et pourquoi les mettre sur le même plan que les blasphèmes et le désordre? N'est-ce pas là choses contradictoires? Comment peut-on tout interdire, encore plus à des êtres isolés qu'on exploite?"
Mais voilà qu'un des leurs refuse ce destin et se révolte, entraînant avec lui ses frères de misère. Et ce qui devait être une libération le conduira lui et d'autres vers une pénitence bien plus lourde, condamnés par un juge qui ne comprend pas comment rendre la justice face à une injustice.
L'autrice fera parler Léon Cazale dit Boule-de-neige, il raconte son arrivée et sa vie à la colonie, ses compagnons et cette fameuse révolte où il trouva la mort, tué par d'autres colons car on le suspectait d'être un espion. Alternant des chapitres sur la colonies et d'autres où elle raconte des instants de vie adolescente des années 90, l'avenir était vendu comme un beau rêve mais ne semblait pas correspondre à cette jeunesse en manque de liberté. Cette génération Y, comme l'a définit un sociologue américain, était perdue d'avance; après des passages de partage et de fraternité et ce jusqu'à la fin du lycée l'autrice décrit la chute libre: la drogue, l'alcool, le suicide parfois radical parfois sans fin.

A plus de 100 ans d'écart, la rébellion reste la même, en recherchant sa liberté on se perd. Le rejet de la société entraîne de lourdes conséquences sur ceux qui ne sont pas bien armés. Je connaissais l'histoire de ces colonies agricoles et d'autres bagnes pour mineurs à travers la France, et dire qu'ils ont existé jusque dans les années 70 c'est terrible! Rapprocher des époques totalement différentes pour aborder le thème de l'adolescence, du besoin de liberté et des chaînes qui empêchent de l'atteindre, est une idée originale. Je pensais m'ennuyer, me plonger dans des faits historiques et lire les déboires d'adolescents paumés mais je m'étais largement trompé, car malgré la rudesse des épreuves décrites la plume est douce et compréhensive.


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois