L’hôtel de verre de Emily St. John Mandel

L’hôtel de verre de Emily St. John Mandel

L'hôtel de verre, Emily St. John Mandel, traduit de l'anglais (Canada) par Gérard de Chergé, Rivages/noir, 2021, 397 pages

Ecrirai-je, n'écrirai-je pas ? Tout le long de ma lecture qui fut, je dois le dire d'emblée, irrégulière, parfois captivante mais parfois laborieuse, je me posais cette question. Ce livre a été, généralement, apprécié et là, je me sens un peu seule... comme Walter dans son hôtel...

De quoi parle ce roman ?

" Et si vous avaliez du verre brisé ? " Ces mots ont été tracés au marqueur à acide sur la paroi transparente de l'hôtel Caiette au nord de l'île de Vancouver. On y accède qu'en bateau et seuls de richissimes clients y séjournent. Ce graffiti est bien vite masqué mais quelques personnes ont eu le temps de le lire, dont Vincent, une jeune femme (oui, oui, une femme...) qui travaille au bar et dont le demi-frère travaille aussi dans l'hôtel. Ce message était destiné, visiblement, au milliardaire américain Jonathan Alkaitis...

Ce roman fourmille de personnages qui se croisent, ou pas, qui ont, en tout cas, un point commun, c'est d'avoir rencontré Jonathan Alkaitis, celui qui va bouleverser leurs vies et même la détruire. Seule, Vincent, va réussir à s'en sortir, même si les premiers mots du roman qui sont aussi les derniers évoquent sa disparition.

" Commençons par la fin : je dégringole du pont du navire dans les ténèbres tempétueuses, le souffle coupé par l'effroi de la chute, ma caméra s'envolant sous la pluie... "

Alors qu'est-ce qui a coincé ?

J'ai commencé la lecture de ce roman avec enthousiasme, j'aimais l'ambiance, un peu sombre, un peu étrange, Vincent et son demi-frère Paul étaient des personnages auxquels je m'attachais, fragiles, profondément marqués par ce qu'ils avaient vécu dans leur enfance.

Et puis, on a perdu Paul pour se centrer sur Vincent qui vivait ses années " conte de fées " auprès du fameux financier Jonathan Alkaitis. Ensuite, on a perdu Vincent, pour s'attacher à Alkaitis, qu'on a lâché pour se rapprocher de Leon Prevant et d'autres...

En fait, je n'avais pas toujours envie de suivre la piste que m'imposait l'auteure. Seulement voilà, ce que je ne savais pas, c'est que cette piste-là était la principale, celle autour de laquelle tout tournait. (L'auteure s'est inspirée d'une histoire réelle, l'affaire Madoff). Je ne le voulais pas parce que je ne m'y attendais pas et parce que j'avais envie de savoir ce qui était arrivé à Paul, ce qu'il était devenu. J'avais perdu Vincent pendant quelques pages, et j'étais heureuse de la retrouver... En fait, je crois que, dès qu'on me parle finance, je ferme les yeux et les oreilles.

Ce roman est un puzzle, dont les pièces ne s'imbriquent pas toujours très bien. On en perd quelques-unes en route, et pas toujours celles qu'on souhaite.

Comment peut-on tout perdre en quelques minutes ? C'est un des sujets du roman. Et comment se reconstruire à partir de là, si certains penchent pour le suicide, d'autres essaient de trouver une alternative, une autre manière de vivre, comme Leon Prevant.

Comment vivre avec une culpabilité logée au fond du cœur ? C'est ce que ressent Paul qui a réussi à percer dans le monde musical grâce aux films qu'il a subtilisés à Vincent.

Comment vivre sa vie d'homme privé de liberté, incarcéré dans une prison pour un nombre incalculable d'années ? En imaginant une contrevie. En côtoyant les fantômes.

Le gros atout de ce roman, c'est l'absence de manichéisme, les personnages ont tous leur côté sombre et leur côté lumineux. De chacun, il y a quelque chose à tirer.

Pour conclure, je reste dubitative. J'ai énormément aimé le début, la fin (superbe), certains passages hypnotiques, mais je me suis ennuyée aussi, parfois, trop souvent à mon gré. Je n'ai pas retrouvé le souffle de son roman précédent, Station Eleven, qui m'avait tant emportée, ou, si je l'ai retrouvé, ce n'est qu'à certains moments.

Antigone n'a pas été convaincue par le scénario trop décousu.

Electra a " été happée par l'histoire, par la profondeur des personnages, par leurs pensées, leurs doutes. "

Pour Kathel, " L'écriture et la construction très subtile constituent une belle manière de parler d'un sujet plutôt rébarbatif. "

Léa n'a pas eu le coup de cœur parce qu'elle a trouvé " certaines parties moins captivantes que d'autres " mais elle l'a apprécié quand même.

Pour Nicole, c'est " du grand art ". La virtuosité de l'auteure " se révèle dans toute sa splendeur avec ce récit fragmenté, sorte de puzzle d'éclats de verre aussi tranchants que réfléchissants. "


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