Florence Marryat : Le Sang du vampire

Florence Marryat Florence Marryat (1833-1899), est une femme de lettres et actrice anglaise. Elle était également proche des milieux spiritualistes et des médiums spirites. Rédactrice en chef du magazine London Society entre 1872 et 1876, elle a en outre dirigé une école de journalisme. Florence Marryat a écrit plus de soixante-quinze romans mais aussi des pièces de théâtre et des essais. Le sang du vampire date de 1897.

Un hôtel sur la côte balnéaire belge. Parmi les différents estivants y séjournant, la baronne Gobelli, son fils Bobby et son second époux d’origine allemande ainsi que Miss Wynward une relation qui lui sert d’assistante ; Margaret Pullen avec son bébé, son amie Miss Leyton fiancée avec Ralph Pullen, un militaire beau-frère de Margaret dont l’époux est aux Indes. Débarque dans ce petit monde, Harriet Brandt, jeune fille fraichement sortie du couvent, en provenance directe de la Jamaïque avec une amie, Olga. Le train-train de la vie de vacances va prendre une tournure dramatique…

Excellent roman que ce Sang du vampire, excellent car extrêmement surprenant !

Comme son titre l’indique il y sera question de vampirisme mais oubliez ce terme trop suggestif car ce bouquin sort de l’ordinaire de ce genre de littérature. L’intrigue comme le style, tout est déconcertant, surtout pour un livre de cette époque.

D’emblée, on est surpris, le bouquin se déroule en Belgique et sur le bord de mer – nous sommes donc bien loin des Carpates ou autre région sombre et mystérieuse d’Europe centrale ou des glauques châteaux gothiques. Second point interloquant, en entrant dans l’hôtel vous tombez sur la baronne Gobelli, personnage monumental dans tous les sens du mot, grosse (« Ce n’est pas une femme, ma chère : c’est un éléphant femelle ! ») et vulgaire («T’oses me couper la chique quand c’est que je cause à Miss Brandt ? »)  dotée d’une grande gueule et d’un tempérament dictatorial elle mène son fils et son époux à la baguette, au point que tous dans l’hôtel la craignent. Par ailleurs, Florence Marryat ne craint guère de faire dire des réflexions choquantes par ses acteurs, l’un trouve préférable de noyer certains bébés ou une autre s’esclaffe au souvenir des esclaves que possédaient ses parents (« Cela me faisait rire de voir leurs petites jambes se tortiller sous les coups de fouet, tandis qu’ils pleuraient ! ») quand un autre trouve surestimée l’institution du mariage. L’écriture est très moderne par son rythme, son style, la truculente Gobelli attirant la lumière des projecteurs sur elle.

Les autres personnages de manquent pas d’intérêt non plus mais pour des raisons bien différentes, plus classiques : son fils Bobby est un jeune homme timoré et névrosé (on le serait à moins), Miss Leyton est froide et hautaine (« Dieu vienne en aide à çui qui l’épousera, car elle suffirait à congeler le soleil ! »), Margaret est une Anglaise de la bonne société pleine d’empathie. Plus tard arriveront Ralph Pullen, un fort bel homme, militaire et désinvolte avec les femmes, Anthony Pennell, un écrivain ami des Pullen, ou bien le docteur Phillips qui sait beaucoup de choses sur Harriet Brandt : fille d’une métis de la Jamaïque, bâtarde d’un médecin aux pratiques rappelant celles des futurs Nazis et d’une mère plus qu’étrange…

Et le vampirisme où est-il là-dedans ? C’est encore l’un des autres attraits du roman, il est relativement discret. Pas de morsures dans le cou ou de silhouettes sombres dans la nuit, de créature immonde guettant sa proie. Nous avons une très belle jeune fille, Harriet, une innocente cherchant à se faire des amis dans cette Europe où elle vient de débarquer. Frappée d’une malédiction dont elle ne sait rien, son amour pour les autres est un poison fatal pour eux, ses étreintes seules suffisent à inoculer la mort lente par captation de leur énergie vitale : un bébé trop caressé, un galant serré de trop près, et déjà ils faiblissent avant de mourir.

Le roman se nourrit aussi de liens amoureux entre plusieurs protagonistes dont Harriet est le centre et la grosse Gobelli l’électron libre qui tire les ficelles de ce drame qui marie l’amusement avec la mort et un léger mystère quant à la réalité de la malédiction.

Une lecture plus que recommandée, mais je crains que n’existe seulement que la traduction présentée dans cette Pléiade.


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois