Year zero : comment vivre sa propre epidemie "zombies"


Je ne vais pas vous cacher l'évidence ; nous ne sentions pas particulièrement la nécessité de lire une énième histoire de zombies, de contagion inéluctable. Alors ce Year Zero, sur le principe, ne constituait pas une urgence de lecture absolue. Mais force est de constater qu'à défaut de bouleverser totalement le genre, Benjamin Percy est parvenu à déplacer le curseur, l'attention, pour proposer autre chose, de salutaire. Ici on comprend ce qui se passe, l'horreur des foules qui meurent et de l'avenir qui s'effiloche, mais c'est uniquement le destin croisé d'individus pris un peu au hasard (ou presque), aux quatre coins du globe, qui sert de prisme au récit choral. Que ce soit à travers les vicissitudes d'un gamin sudaméricain, au pays des cartels de la drogue, celles d'un yakuza japonais désireux de venger le meurtre de sa femme, d'une femme au Moyen-Orient, là où la guerre fait rage, ou de Bob, le geek reclu dans son bunker personnel, qui utilise les bandes radios pour appréhender l'extérieur et peut-être enfin rencontrer celle qui l'accompagnera dans le monde post apocalyptique. Sans négliger une scientifique dont la curiosité et les recherches ne sont pas pour rien dans tout ce qui se produit. Oui mais voilà, ce qui se produit, on s'en fiche, totalement. Il n'est pas important de savoir comment est véhiculée l'infection, si les zombies peuvent être éliminés de telle ou telle autre façon, s'ils sont sensibles aux odeurs, aux bruits. Dans Year Zero, c'est l'humanité, par petites touches sensibles, qui est mise en avant. Des tranches de vie, quand la Vie avec la majuscule chancelle. Ce qui permet au lecteur de choisir la situation avec laquelle il pourra s'identifier, et se poser la question fatidique : et moi donc, alors, dans un tel contexte? Loin de frayer avec une bande de survivants prêts à tout, comme dans The Walking Dead, quelle serait ma trajectoire? Calfeutré dans mon trois-pièces, dehors à trucider celles et ceux qui le méritent, ou simplement faire de mon mieux, avec débrouillardise ou courage insensé, pour survivre un jour de plus? Ces 5 histoires avancent rapidement en parallèle, et apportent chacune son lot de réponses. 

Pour dessiner tout ceci, le choix est tombé sur Ramon Rosanas. Ce n'était pas gagné d'avance car ce dessinateur m'a souvent semblé parfait pour une histoire peu sérieuse, avec de l'humour et de la légèreté, et ici, et bien c'est un peu le contraire complet. Pourtant tout fonctionne, s'agence, car en fait le spectaculaire est banni au profit des émotions, de l'instant saisi sur le vif, et l'artiste est très doué pour que le message, c'est à dire les sentiments, parviennent jusqu'au lecteur. La couleur est d'un grand secours, et on appréciera le job monstrueux de Lee Loughridge. Impossible de clore cet article sans mentionner les couvertures originales de la série, de petits bijoux photo réalistes de Kaare Andrews, teintés d'une douce ironie, qui respectent pleinement le concept. L'arrivée d'AWA Upshot en France est donc remarquée et remarquable, avec dès ce mois de mars deux premiers titres chez Panini Comics, le second étant The Resistance de Straczynski et Deodato, qui fera l'objet d'une chronique future, très probablement. Autre bonne nouvelle, c'est du bon! 

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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois