Critique du film Bloodshot

L'univers Valiant fait ses débuts au cinéma sous la supervision créative de ceux qui ont redoré les licences de l'éditeur en 2012. C'est donc assez confiants que nous attendions l'adaptation de Bloodshot au cinéma par Dave Wilson et avec Vin Diesel dans le rôle titre. Malheureusement, le film est bien loin de nos attentes... très, très loin.

Critique du film Bloodshot

Un autre univers partagé de super-héros et de super-héroïnes s'invite au cinéma, c'est celui de l'éditeur Valiant Entertainment que vous, fidèles lecteurs et lectrices du site, vous avez certainement entendu parler ici-même.

L'univers cinématographique Valiant est né suite au rachat de l'éditeur par le groupe chinois DMG Entertainment qui co-produit logiquement le film Bloodshot, avec Columbia Pictures, une filiale de Sony. Si la société de production chinoise veut investir le Marché U.S. avec un film d'action et un univers super-héroïque, il veut aussi que sa production connaisse le succès dans son pays. C'est la raison pour laquelle certains choix de production et de design paraissent évidents : par exemple, nous retrouvons les acteurs Vin Diesel, que le public visé connaît grâce à la licence Fast & Furious qui y connait un véritable succès, et Guy Pearce en bad guy qui a été à l'affiche d'un gros hit sur le territoire chinois, Iron Man 3 - film également co-produit par DMG Entertainment. Cela explique aussi le côté rétro du métrage - pas dans la forme mais dans le fond - qui est un film d'action semblant sortir du début des années 2000, qui est décérébré et qui s'en fiche de la cohérence scénaristique tant qu'il y a des courses-poursuites et autres scènes d'action bourrine. Il faut dire que les films américains qui ont percé sur le territoire japonais sont souvent ce genre de production ( Transformers ou Resident Evil), DMG Entertainment veut certainement un film dans cette veine pour plaire à son public.

Bref, vous l'aurez compris le but étant de faire un film d'action bourrin, Bloodshot est de manière évidente le personnage idéal pour cela. Le personnage de Valiant est une sorte de "remake" de The Punisher autant dans le look que l'attitude avec un petit côté Wolverine, qui était LE personnage à recopier au début des années 90. Bloodshot est un ancien marines qui, suite à son décès, a subi des tests pour en faire une arme de guerre idéale. Son sang est alors composé de nanites, des nano-machines super intelligentes, qui viennent à réparer les tissus endommagés de son corps en plus de lui donner super force, super rapidité, et super habilité à viser juste. Le film nous envoie alors dans une fantasy militaire high-tech rappelant plus Iron Man qu'autre chose.

À vrai dire, le film singe de nombreux autres blockbusters américains comme Matrix, la scène de l'ascenseur est une sorte de dérivé de celle de Captain America: Le Soldat de l'Hiver, il y a des choses copiées à Transformers par-ci par-là, pas mal de choses qui rappellent Fast & Furious : Hobbs & Shaw, et les références aux films d'action de la fin des années 90 et du début des années 2000 se font naturellement dans l'esprit du spectateur ou de la spectatrice.

Il est vrai que le cinéma de super-héros est depuis plus de dix ans le prétexte pour les cinéastes de revisiter un genre du cinéma et y rajouter des scènes d'action moderne, plein d'effets spéciaux et une diégèse issue des comic books. Captain Marvel revisitait les buddy movies des années 90, Joker les films du New Hollywood, Les Gardiens de la Galaxy les space opera, Shazam! les films de Noël, Captain America : Le Soldat de l'Hiver les films d'espionnage... Bloodshot lui aurait pu se contenter d'être une revisite super-héroïque des actioners des années 2000 mais il emprunte également beaucoup au films de vigilante et il essaie d'être une revisite du techno-thriller.

Le problème, c'est que si l'histoire essaie de faire un film de vigilante qui prend la forme d'un film d'action puis se métamorphose en techno-thriller, le film ne suit pas le mouvement. Du coup, malgré les capacités des scénaristes, Jeff Wadlow et Eric Heisserer, et leur intention de jouer avec les perceptions du spectateur ou de la spectatrice, le métrage continue à rester un actioner décérébré.

Pour être assez clair et un peu moins pédant : c'est un film complètement con. Au début du film, oui, cela nous rappelle le pire des films d'action avec des incohérences grosses comme un camion et dès que la petite-amie de Ray Garrison (Vin Diesel) apparaît sans visage sur l'écran, on sait que quelque chose cloche. Mais lorsque le twist intervient expliquant ces incohérences, le film aurait dû se métamorphoser. Mais, non, ça reste débile, incohérent avec une succession de scènes d'action qui semblent déjà vues et revues.

En plus de ça, les dialogues sont mauvais et les acteurs font le minimum vital. Il y a bien Vin Diesel qui y croit et qui tente le peu de fois qu'il parle d'essayer de choper l'Oscar... Mais, il semble bien loin.

Les films d'action décérébrés ne me gênent pourtant pas, par contre, j'ai beaucoup mal avec ceux qui prennent le spectateur ou la spectatrice pour des cons. Moi, qui espérait que les films à la Tomb Raider (avec Angelica Joly) ou Die Hard 5 étaient loin derrière nous, Bloodshot nous rappelle qu'il en faudrait peu pour que ça revienne à la charge.

En même temps, le succès en salles n'a pas été au rendez-vous. Bien évidemment, la pandémie du COVID-19 a contribué à ce bide mais, soyons francs, Bloodshot ne fait pas partie des films qui étaient les plus attendus. Et c'est pour cela que Sony Pictures a décidé de distribuer le film en (quasi) Direct-to-VOD dès le début du confinement. Depuis, il est arrivé sur le service de vidéo à la demande d'Amazon, Prime Video.

Justement, le film a la plastique d'un film produit par les SVOD comme Netflix ou Amazon Prime, ce côté un peu carton patte qui est devenu une sorte de convention visuelle. Souvent c'est pour masquer le budget restreint niveau décor au profit du casting ou de l'équipe créative, mais avec Bloodshot, on pourrait se demander si ce n'est pas un parti pris : d'abord vis à vis de l'histoire qui essaie de jouer avec nous, mais aussi parce que ces films connaissent du succès et que DMG Entertainement se dit que c'est une bonne idée.

C'est d'autant plus dommage qu'il y a visuellement des choses très réussies comme les effets spéciaux de la restructuration de Bloodshot ou la scène dans le tunnel avec le filtre rouge et noir.

Mais, la plupart du temps, le film parait daté. Que ça soit dans la réalisation de Dave Wilson lorsqu'il ne singe pas les scènes d'action de films cultes, mais aussi dans le traitement général. Ray Garrison/Bloodshot est une Mary Sue sans le moindre défaut qui sait tout faire, le méchant rival est méchant et rival sans aucune raison, le cerveau de l'opération est méchant - et pas si "cerveau" puisque son plan est complètement con. Et puis le traitement des femmes est incroyablement rétrograde. Clairement, le site ne réussit pas le test de Bechdel mais, en plus, les femmes ne sont montrées comme des "chéries" ou potentielles "chéries" du héros. Et puis, avec tout le respect que je dois aux deux seules actrices du film, Talulah Riley et Eiza González, elles sont bien trop maigres.

Autant dire que l'univers cinématographique Valiant part sur un mauvais pied, même s'il évite très bien de trop en faire. Entre Bloodshot et l'infâme et ridicule webfilm sur Ninjak, on se dit que les personnages qu'on aime tant dans les comics ne sont vraiment pas entre de bonnes mains.

Critique du film Bloodshot

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