My Absolute Darling de Gabriel Tallent

Par Livresque78

Insoutenable, voilà l'adjectif qui convient le mieux à mon ressenti à la lecture de My Absolute Darling de Gabriel Tallent. Insoutenable est la violence qui imbibe ces pages, insoutenable aussi est la vulgarité dans le langage de notre jeune héroïne, tout aussi insoutenable est le suspens qui nous tient à la lecture de ce texte...

Inoubliable en serait le deuxième...

Voici la quatrième de couverture : À quatorze ans, Turtle Alveston arpente les bois de la côte nord de la Californie avec un fusil et un pistolet pour seuls compagnons. Elle trouve refuge sur les plages et les îlots rocheux qu'elle parcourt sur des kilomètres. Mais si le monde extérieur s'ouvre à elle dans toute son immensité, son univers familial est étroit et menaçant : Turtle a grandi seule, sous la coupe d'un père charismatique et abusif. Sa vie sociale est confinée au collège, et elle repousse quiconque essaye de percer sa carapace. Jusqu'au jour où elle rencontre Jacob, un lycéen blagueur qu'elle intrigue et fascine à la fois. Poussée par cette amitié naissante, Turtle décide alors d'échapper à son père et plonge dans une aventure sans retour où elle mettra en jeu sa liberté et sa survie.

Inoubliable en serait le deuxième donc... Ce roman est éprouvant. La violence qui nimbe la vie de cette jeune femme est insupportable : elle est physique, intime, psychologique, sociale. On ne peut imaginer pire scénario pour une jeune adolescente aux prises avec un homme violent, aimant, exclusif, jaloux, alcoolique, instable et dangereux... Martin, son père. J'ai dû souvent interrompre ma lecture tellement ce qui était décrit me torturait. Et pourtant, rien de vulgaire ou de voyeuriste là-dedans.

Inoubliable aussi du fait de ses descriptions magiques. Qu'il s'agisse de l'intérieur insalubre de leur lieu de vie, de la nature foisonnante qui les entoure, de la faune et la flore torturées et dangereuses qui, tour à tour, accueillent et piègent la jeune fille ou encore de ses déambulations psychologiques, tout est décrit précisément, finement. On voit tout, on sent tout et on ressent tout.

Inoubliable enfin par son héroïne, Julia Alveston, Turtle...Croquette... Mon amour absolu. Cette enfant se bat contre tout, contre tous. En plus de devoir vivre avec un passé douloureux qui lui a arraché sa mère, elle doit composer avec la relation torturée de son père avec son grand-père, avec les adultes de l'école qui veulent lui faire avouer des crimes qu'elle ne juge pas comme tels, avec ses semblables qui ne la comprennent pas mais qui la craignent, avec ses désirs, avec ses difficultés, dont elle se croit coupable. Turtle évolue lentement, partagée, déchirée entre l'amour et la haine, entre l'admiration et la colère.

Elle affrontera tout, elle subira tout, apprenant à observer et à décrire avant de nommer, à tirer avant de jouer, à acheter des tests de grossesse avant son premier baiser. Constamment rabaissée ou idolâtrée, insultée ou complimentée, Turtle ne sait plus se regarder, se comprendre. Il lui faudra passer sa vie par le prisme de l'amour adolescent, celui d'un jeune homme qui ne la juge pas, qui l'apprécie pour ce qu'elle est, et par un miroir d'elle-même, un double qu'elle rejette puis qu'elle protège au point de prendre sa décision finale quand elle ne sera plus actrice mais spectatrice de son propre drame.

Je ne peux pas parler de coup de cœur ici, cette histoire fait trop mal... C'est plutôt un coup au cœur, vraiment ! My Absolute Darling est de ces romans qui ne vous lâchent jamais. Qui laissent en vous une trace indélébile, une trace de sang, une trace de style, une trace d'espoir.

Priscilla