Chronique : La délicatesse du homard – Laure Manel

François, directeur d’un centre équestre en Bretagne, découvre, lors d’une promenade à cheval sur la plage, une jeune femme inconsciente au pied d’un rocher. Plutôt que d’appeler les secours, il décide sans trop savoir pourquoi de la ramener chez lui pour la soigner. À son réveil, l’inconnue paraît en bonne santé, mais peu encline à parler. Elle déclare s’appeler Elsa mais refuse de répondre à tout autre question. Commence alors entre le célibataire endurci et cette âme à vif une étrange cohabitation, où chacun se dévoile peu à peu à l’autre sans pour autant totalement révéler les secrets qui le rongent. Et même si le duo en s’apprivoisant s’apaise, leur carapace peine à se fendre…
Qui est Elsa et quelle vie est-elle en train de fuir ?

Chronique : La délicatesse du homard – Laure Manel


Après avoir vu circuler ce roman maintes et maintes fois sur la blogo, j’ai à mon tour décidé de découvrir la plume de Laure Manel qui m’intriguait tant.

La délicatesse du homard nous emmène le long des côtes bretonnes aux paysages envoutants et à la douce odeur d’embruns. Au fin fond du Finistère, nous faisons la rencontre de François, dirigeant d’un centre équestre et profond passionné des chevaux. Elsa, elle, est une jeune femme venue d’ailleurs, qui a fui sa vie et s’est retrouvée sur le chemin de cet homme un peu bourru qui va l’accueillir et la recueillir sans réfléchir.

« – Si tu veux la revoir et que tu sais où elle est, pourquoi tu n’y vas pas ?
Elle n’a pas attendu la réponse car cette question était un conseil de petite soeur qui a compris des trucs que je ne lui ai pas dits. »

Le roman se déroule en alternant systématiquement entre les points de vue de chacun des protagonistes. Les chapitres sont courts, l’écriture hachée, les phrases brèves, ce qui fait que la lecture suit un rythme plutôt soutenu et est plutôt fluide et agréable.  J’ai bien aimé la plume de l’auteure bien que le fait que le roman soit écrit à la première personne m’ait un peu désarçonnée. Je me suis retrouvée plongée dans les pensées des personnages et l’écriture était telle que j’avais en fait l’impression d’entendre quelqu’un parler comme lorsque je peux moi-même penser. J’avoue préférer la narration à la troisième personne mais ce n’est qu’une question de goût et ce n’est pas vraiment dérangeant dans la lecture, juste un peu surprenant.

Je suis très rapidement entrée dans le récit, appréciant de découvrir les personnages et surtout leur rencontre. François et Elsa vont s’apprivoiser, apprendre petit à petit à communiquer, à apprécier la présence de l’autre. Au fur et à mesure, ils vont se dévoiler, toujours avec pudeur et timidité. J’ai beaucoup aimé cette première partie du roman où les deux personnages se découvrent. J’ai aimé suivre l’évolution d’Elsa, qui peu à peu s’ouvre et se laisse aller, notamment grâce à Patrick, un personnage qui m’a semblé très attachant et bienveillant bien qu’on ne se focalise pas énormément sur lui dans le récit.

« – … Je sais que c’est mal, et que ça ne veut rien dire, et que… ça ne changera rien entre nous, mais… j’ai une soudaine et furieuse envie de vous embrasser.
Mon regard de défi a dû faiblir pour devenir une flaque, ensuite il était beaucoup trop près pour que je soutienne le sien, j’ai fermé les yeux et l’ai laissé m’embrasser… Un baiser profond et langoureux, comme je n’en avais pas reçu depuis très longtemps… Le genre de baiser qui fait chavirer. Le genre de baiser qui vous fait douter de vos principes parce qu’il sème des étoiles jusqu’au fond du ventre. »

Quand elle arrive au centre, Elsa est totalement déboussolée, happée par le poids d’un passé qui l’empêche de s’épanouir. La trentenaire est en pleine souffrance et pourtant, grâce à François, grâce à Patrick, grâce aux chevaux, elle va commencer à reprendre goût à la vie, à surmonter ses peurs et à les affronter. L’auteure nous décrit parfaitement le cheminement de la jeune femme qui va connaître une réelle évolution. Elsa est touchante, d’autant plus que sa vie n’a vraiment pas été un long fleuve tranquille. Son passé regorge d’horreurs et le fait qu’elle arrive finalement à se reconstruire après toutes ces épreuves la rend encore plus attachante.

S’agissant de François, je l’ai d’abord trouvé très tendre et attentionné envers Elsa, avant d’être dérangée par certaines de ses réflexions dans une seconde partie du roman, lorsque les personnages commencent réellement à se reprocher. Comme le récit est à la première personne, il est difficile d’ignorer ses pensées, et certaines d’entre elles m’ont déplue notamment concernant son rapport à l’intimité. Je l’ai trouvé maladroit et pas toujours très délicat. Il avait une façon de se rapprocher d’Elsa qui était légèrement déroutante et qui contredisait totalement la douceur que j’avais découverte et appréciée au début de ma lecture.

Néanmoins, j’ai passé un agréable moment de lecture. C’est une romance classique mais ponctuée de jolis moments, de secrets assez sombres et d’un cadre délicieux. J’ai beaucoup aimé le contexte de l’histoire qui laisse une place particulière aux cheveux et à la mer, rendant l’environnement du roman très plaisant.

« (…) Ce que je veux dire, c’est qu’à toujours réfléchir, se poser des questions, se torturer l’esprit, on n’avance pas, on n’entreprend rien. Il faut laisser le risque entrer dans sa vie, ou saisir une chance au vol, c’est la même idée. Je crois foncièrement que la vie est en mouvement et qu’il ne faut pas toujours chercher à figer, nommer, définir les choses… C’est un peu comme si tu étais sur une planche de surf et que tu trouvais la vague : il faut juste te laisser porter sans chercher à déterminer la destination, calculer le point d’arrivée. »

Il n’y a pas particulièrement d’originalité dans cette histoire mais j’ai tout de même été surprise par l’une des révélations d’Elsa. Ce n’est pas un roman à lire pour être étonné mais plutôt pour aborder des sujets forts, avec la reconstruction au premier plan, mais aussi les secrets familiaux et le deuil. J’ai en réalité bien plus apprécié le côté psychologique de l’histoire que la romance en elle-même. J’ai été émue par l’héroïne qui fait preuve d’un certain courage, et c’est en réalité grâce à ces émotions ressenties que j’ai aujourd’hui envie de me tourner vers les autres romans de l’auteure.

Achetez ce livre :

Chronique : La délicatesse du homard – Laure Manel

Avez-vous lu ce livre ? Il vous fait envie ?


wallpaper-1019588
Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois