Premières lignes #71 : Ton sourire sur son visage

Premières lignes #71 : Ton sourire sur son visage

Premières lignes est un rendez-vous initié par Ma lecturothèque. Le principe est simple, tous les dimanches, je vais vous citez les premières lignes d’un ouvrage.


Prologue

Vingt-quatre heures.
Une journée.
Huit tétées.
Autant de couches.
Je pourrais trouver encore une bonne dizaine de façons de compter le temps qui passe. Tant que mon esprit est occupé par autre chose que par mes problèmes présents.
– Éloïse ! Éloïse, tu m’entends ? Isaac pleure. Je crois qu’il a faim et contre ça je ne peux rien faire, moi. Je n’ai pas le matériel pour.
Ma meilleure amie a pris mon fils dans ses bras et vient s’asseoir sur le bord de mon lit. Elle parle d’une voix douce. Qui cherche-t-elle à rassurer ? Lui, ou moi ? Je suis loin d’en être certaine?
– Je sais que cette situation n’est pas celle dont tu avais rêvé, mais c’est comme ça. C’est ta vie à présent et il va falloir que tu sois assez forte pour deux. Je serais là, tu le sais. Et tes parents aussi. Mais si tu ne te reprends pas, tu n’y arriveras pas. Fais-le au moins pour lui, si tu ne peux pas le faire pour toi !
Victoire se retourne en douceur et me remet le petit paquet emmitouflé dans une couverture bleue.
Mon fils s’est calmé. Il gigote encore un peu, mais il ne pleure plus. Ses grands yeux noirs ouverts me fixent et ses petits doigts à la peau chocolat s’accrochent à mon pouce. On se croirait dans une publicité. Mais non. C’est la réalité et c’est la mienne à partir d’aujourd’hui. J’étais au courant, pourtant, que j’étais enceinte. J’ai eu plusieurs mois pour m’y faire. Mais on ne réalise vraiment les chose que lorsqu’on est devant le fait accompli.
Je sais ce que je dois faire. Je sais ce qu’il attend. Je lui présente mon sein sans cesser de l’observer.
Vingt-quatre heures.
Une journée.
Huit couches.
Et une neuvième tétée.
Voilà le temps qu’il m’aura fallu pour tomber enfin un petit peu amoureuse de mon fils.
Je tourne la tête vers Victoire et lui sourit faiblement, le temps d’avouer :
– Tu as raison. Je vais être forte pour lui. Il n’y a plus personne qui compte à par lui maintenant.
Plus rien n’a d’importance.
Plus rien ne passera avant lui.
Plus rien ne me détournera de lui.

Premières lignes #71 : Ton sourire sur son visage


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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois