Dans l'obscurité dense de la forêt népalaise, alors qu'elle cherche de quoi se nourrir avant que les bêtes sauvages ne prennent possession de la nuit, Mara découvre un petit garçon de trois ou quatre ans attaché à un arbre. La jeune femme a entendu parler de ces enfants abandonnés dont personne ne veut. Il y en a trop. Ils traînent dans les villages, chapardent ici et là, exaspèrent les habitants. Elle sait qu'elle ne devrait pas s'en mêler, la vie est déjà assez dure comme ça, pour survivre ici il faut se faire discret. Pourtant, elle détache le garçon et l'emmène. Le lendemain, à la même place, une petite fille se débat furieusement dans ses liens. Mara la délivre elle aussi, mais cette fois elle fuit avec les deux enfants, vers la grande ville où ils pourront se cacher, se noyer dans la foule immense des bidonvilles.

Vingt ans après, dans une autre forêt, au milieu des volcans du Kamtchatka, débarque un groupe de six chasseurs. Parmi eux, Lior, une Française. Comment une jeune femme aussi belle, aussi brillante, peut-elle être aussi exaltée par la chasse, voilà un mystère que son mari, qui l'adore, n'a jamais résolu. Quand elle chasse, le regard sauvage de Lior tourne à l'étrange, animé par une sorte de sauvagerie, son pas devient souple, sa voix vibrante. Dans ces grandes traques, elle semble partie prenante de la nature, douée d'un flair affûté, dangereuse. Elle a quelque chose d'animal.

Cette fois, guidés par un vieil homme à la parole rare, Lior et les autres sont lancés sur les traces d'un ours. Un ours qui les a repérés, bien sûr, depuis leurs premiers pas sur le versant de la montagne. Et qui va entraîner Lior bien au-delà de ses limites, la forçant à affronter enfin la vérité sur elle-même.

Mon avis:

Je remercie les éditions Denoël pour m'avoir fait confiance dans la lecture de ce livre. C'est mon tout premier Sandrine Collette, auteure dont je vois régulièrement des retours positifs mais je ne savais par quel roman la découvrir. Son tout dernier étant publié en mars, j'en ai profité.

Ma première impression est sur la forme de sa plume, elle a construit son roman de manière particulière, avec des phrases pouvant ne faire que 3/4 mots, ce qui donne un rythme incisif que je n'ai pas encore perçu chez d'autres écrivains. Autant j'ai été un peu perturbée par cette nouveauté lors des premiers paragraphes, autant j'ai adoré m'y plonger une fois l'effet de surprise passé.

Nous suivrons en parallèle, la vie de Mara, et celle de Lior. Autant la vie de la première est d'une dureté à laquelle son quotidien l'oblige à se soumettre, autant la vie de l'autre est faite d'un plaisir sans commune mesure qui est celui de la chasse. Elle s'accorde avec son compagnon ces moments intenses plusieurs fois par an à travers le monde, jusqu'à ce jour où elle veut à tout prix prendre le dessus sur sa phobie d'un animal bien particulier. C'est son compagnon qui va raconter leur histoire, presque comme un journal intime, lui qui est un suiveur mais qui ne chasse pas.

L'auteure va prendre le temps de bien nous confronter à la peur que chacun peut ressentir face à un animal sauvage, celle qui paralyse mais surtout ici celle qui fait monter l'adrénaline, annihilant toutes sensations autres que l'excitation. J'en ai ressenti un malaise, une incompréhension de vouloir un trophée malgré les risques. Cette ambivalence est très bien mis en exergue dans toute cette histoire. Le point d'orgue est la psychologie des personnages, tous fouillés, décortiqués, mais peu attachants, voire même antipathiques.

La petite pointe d'humour, allégeant le tout, est de faire penser l'animal, nous conter tout ce qui lui passe par la tête, j'ai été accro à ces chapitres dans la tête de l'animal, reniflant, sautillant, mais pas encore capable d'ordonner ses pensées pour réfléchir et analyser. Il réagit à l'instinct, avec une 'intelligence' effrayante.

Un livre découverte donc pour moi de l'auteure, une histoire à la fois fascinante, terrifiante et sauvage. Une immersion dans un 'sport' très particulier où la revanche de l'animal se heurte aux armes humaines. Un combat inégal, un dépassement de soi physique, mais cela en vaut-il vraiment la peine?

Enjoy!

Petite présentation de l'auteure: [source: Denoël]

Sandrine Collette est née en 1970. Elle partage son temps entre l'écriture et ses chevaux dans le Morvan. Elle est l'auteur de Des nœuds d'acier, Grand Prix de Littérature policière 2013 et best-seller dès sa sortie, Un vent de cendres, Six fourmis blanches, Il reste la poussière, couronné par le prix Landerneau 2016, Les Larmes noires sur la terre et Juste après la vague.

Bibliographie:

• Des nœuds d'acier - Denoël
• Un vent de cendres - Denoël
• Six fourmis blanches - Denoël
• Il reste la poussière - Denoël
• Les larmes noires sur le terre - Denoël
• Juste après la vague - 2018 Denoël
• Animal - 2019 Denoël