« La servante écarlate » de Margaret Atwood

« La servante écarlate » de Margaret Atwood


Résumé :

Devant la chute drastique de la fécondité, la république de Gilead, récemment fondée par des fanatiques religieux, a réduit au rang d’esclaves sexuelles les quelques femmes encore fertiles. Vêtue de rouge, Defred, « servante écarlate » parmi d’autres, à qui l’on a ôté jusqu’à son nom, met donc son corps au service de son Commandant et de son épouse. Le soir, en regagnant sa chambre à l’austérité monacale, elle songe au temps où les femmes avaient le droit de lire, de travailler… En rejoignant un réseau secret, elle va tout tenter pour recouvrer sa liberté.

Mon avis : ♥♥♥♥♥

Voilà une lecture qui me tardait de commencer : entre chroniques retentissantes d’éloges, mise en avant de la série, bordereau accrocheur et mise en perspective du roman comme classique incontournable allant même jusqu’au parallèle avec 1984. Bien sûr que l’on a envie ! Bien sûr que l’on se lance bourré d’attentes !
Et là, je pense que vous voyez où je veux en venir… J’ai été déçu. Nullement par l’écriture elle-même ou l’histoire mais par une ribambelle de détails qui au final deviennent de véritables arguments et m’ont laissé perplexe, voire colère, en refermant le livre [vous voyez le : « tout ça pour ça ?! »] Néanmoins, je vais quand même commencer cette chronique avec le positif car il y en a, évidemment !
On suit Defred dans un monde où les femmes devenues objets sont : pour certaines utilisées comme mères porteuses et ballottées de foyers en foyers au rythme des contrats qui se présentent ; et pour d’autres, épouses devant regarder leur mari faire un enfant à une autre. Rentabilisation des naissances et hiérarchisation ainsi qu’attribution des devoirs conjugaux. Le sexe rangé comme moralement abject et devant être réalisé sans plaisir par le bas de l’échelle, la cuisine par d’autres et l’épouse, au plus haut, n’ayant que la possibilité d’être une épouse… A savoir, ne rien faire de spécial et regarder le temps passer dans l’attente qu’une servante écarlate donne naissance à l’enfant qui deviendra le sien. Triste monde en somme, mais brillante idée de dystopie !
De plus, l’auteur nous offre une écriture fluide et rythmée très agréable. Donc comme je vous le disais histoire OK et écriture OK. Mais alors où est le problème me direz-vous ? Et bien, là où le bât blesse c’est dans le point de vue adopté par l’auteur, la mise en perspective de l’action. Bien sûr ceci est très subjectif. Mais pour ma part, j’ai trouvé que l’adoption d’une introspection comme point de départ et de déroulement de l’intrigue est dommageable pour l’histoire, d’autant plus qu’il s’agit d’une dystopie. Ainsi, on suit magnifiquement bien les ressentis et l’enfermement vécus par Defred, de ce côté rien à redire, c’est poignant ; en revanche, le monde dystopique autour ne prend jamais vraiment de substance… Il reste une idée vague autour du personnage sans jamais vraiment nous sauter aux yeux de manière réelle et c’est cela qui m’a particulièrement gênée, car j’attendais beaucoup plus venant d’une dystopie dont le premier objectif est tout de même une description d’un monde fictionnel sombre…
J’en viens donc ici au parallèle fait avec 1984 d’Orwell que je trouve dénaturé. Cette brillante dystopie n’a absolument pas le même fonctionnement dans le choix narratif ainsi qu’au niveau de sa position politique. Si La servante écarlate est un manifeste du féminisme se battant pour les libertés des femmes en pointant du doigts les dérives possibles et en mettant en scène quasiment que des personnages féminins ; a contrario 1984 pointe du doigt le totalitarisme dans son excès soulignant ainsi l’atmosphère d’après-guerre ainsi que la vision obscure de l’avenir après le carnage subit et l’ombre de la guerre froide. Mais surtout, 1984 joue son rôle dystopique à souhait, n’utilisant Winston – son personnage principal – que comme fil conducteur pour parler du monde qui l’entoure qui d’ailleurs dans sa personnification en Big Brother écrase tout sur son passage. L’un est ainsi une vrai dystopie avec un monde sombre et étouffant qui se peint à chaque page de plus en plus, l’autre n’en fait qu’une vague illusion… Malheureusement !
Enfin, pour revenir sur le « tout ça pour ça ?! » ainsi que l’introspection, j’en ressors avec une vrai peinture de la détresse de Defred, poignante et saisissante. En revanche, j’ai trouvé l’histoire de l’héroïne légère dans son évolution de rébellion et son passé simplement effleuré. En clair, selon moi, l’auteure est restée à la surface concernant le passé, le présent et le futur de Defred mais a mis un point d’honneur à décrire les méandres de son âme et de sa solitude. Bien que j’aime l’exercice et la plume… Pour moi, ce n’est pas suffisant !!

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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois