Lettre ouverte à ceux qui veulent vivre leur passion

Il m’a fallu du temps pour me consacrer à l’écriture, mais il m’aura fallu encore plus de temps pour le dire, pour en parler, pour enfin proposer mes articles ou mes livres au monde extérieur.

Parce que j’ai passé beaucoup trop de temps à me croire incomprise et trop de temps à me croire merveilleuse et trop de temps à douter. Il y a eu un moment dans ma vie pendant lequel je me suis sentie adulte, et les adultes préfèrent renoncer à leurs rêves plutôt que d’essayer, dit-on.

Mais je n’ai pas réussi à y renoncer. L’énergie pour lâcher l’écriture, pour la laisser partir est tellement grande que cela aurait causé ma mort psychologique, un burn-out ou un bore-out ou un brown out. Parce l’écriture avait cette même énergie qu’un gamin déploie le premier jour de la rentrée scolaire quand il reffuse de lâcher sa mère, avec ses larmes et ses petits bras qui t’accroche les jambes. Je suis désolée de ne pas avoir eu le cœur à l’en arracher.

Il y a un moment à tout, un moment où tu te décides à suivre ta voie, en acceptant les difficultés et les ronces te griffant l’égo. Tu es dans cette vie pour apprendre et pour être heureux, qu’importe la manière, tant que tu la connais la manière.

J’en ai voulu à ma mère de ne pas m’avoir soutenu. J’en ai voulu à mon père aussi de m’avoir dit que c’était sans avenir. J’ai essayé de convaincre les gens autours qui me répondaient toujours « mais ça marche ça ? ». J’en ai même voulu aux gens de trop me soutenir, de me soutenir à moitié… Parce que la seule qui devait me soutenir était dans le miroir de la salle de bain. Je devais me faire confiance et arrêter de chercher du soutien ou une reconnaissance. Car bien souvent on m’entendait parler de mon talent et de mes envies, mais personne n’a jamais rien vu d’autre qu’un bavardage incertain.

Se lancer, arrêter d’attendre que ma mère m’autorise, mais le faire et partager avec elle mes avancements, prendre ses critiques, accepter les critiques parce qu’elles ne sont plus négatives, l’envie de réussir devient trop grande par rapport à mon égo d’écrivain génial.

Peut-être que je ne suis pas un génie, mais qu’est-ce que le génie sinon créer l’illusion d’un talent. Le résultat compte souvent autant que le parcours.

L’échec est un diplôme, d’Idriss Aberkane. Et les souvenirs sont souvent basés sur les erreurs et les conneries qu’on a pu faire. « Tu te souviens quand tu avais grimpé sur le mur et jouer l’unijambiste. Tu t’étais bien ramassé ce jour-là. Et la tête de Maman quand elle nous a vu arriver à cloche-pied. »

Ceci est une lettre ouverte aux personnes qui ont une passion et qui ne savent pas trop quoi en faire, qui pense que la passion est destructrice. Souviens-toi que ce n’est pas la passion en soi qui est destructrice, c’est la passion que tu ne vis pas qui tu fais si mal. Quand tu es folle amoureuse de lui, que ta passion te dévore mais qu’il se refuse à toi, que tu saignes, que tu trembles, que tu souffres. C’est cette passion non partagée qui est douloureuse. La passion vécue est libératrice.

Les passions heureuses sont des moteurs. Et l’envie de réussite est plus forte que les nombreux refus que tu essuieras parce que tu sais que tu ne peux pas y renoncer comme on claque des doigts.

 Apprendre à être fort, c’est savoir ce que tu vaux, c’est savoir reconnaître quand tu as raison et quand tu as tort. Et avoir tort n’est pas se taire.

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Tous 2, le roman de Testu est philosophique et spirituel à la fois