Faire se rencontrer l'univers d'Archie et de Predator, c'est un peu comme de prétendre acheter un duo pop rock avec Michel Sardou chantant sur la musique de Metallica. Pas certain que ça puisse tenir la route, ou être envisageable sérieusement. Du coup, un projet de cette teneur ne peut exister que si on choisit la carte de l'humour, du second degré, de la récréation potache. Alors ce sera à Predator de se plier aux canons plus rassurants d'Archie et ses amis, notamment en terme de dessins, outre bien entendu une trame simplifiée et qui reste juste un prétexte. Les kids de Riverdale vont vivre une aventure bien différente de l'ordinaire. Pas de problème de bal de fin d'année (encore qu'un concours de la fille la mieux habillée sert de starting point en début d'album) ou de burgers en folie, ici les joyeux drilles ont remporté des vacances gratuites dans une contrée exotique, pour ce que les américains appellent un spring break de rêve. Mais il leur est recommandé de ne pas trop s'éloigner du campement où ils résident, car dans les terres vivent des bêtes sauvages, des fauves dangereux. Alex De Campi nous sort la litanie des micro événements les plus attendus par les fans de toujours, entre la rivalité éternelle qui oppose Betty et Veronica, et la faim atavique de Jugghead qui va d'ailleurs en payer le prix, en voulant subtiliser une sucrerie coincée dans un distributeur. Au départ le ton est léger, pétillant, et à aucun moment on ne s'attend à lire des choses terrifiantes, ou voir le sang couler. Sauf du nez de Betty, blessée au sens propre et figurée de voir que Archie ne semble pas reporter ses préférences sur elle, et qui s'enfuie dans la jungle. Ce n'est pas une bonne idée mademoiselle, vous avez vu ce truc tomber du ciel, récemment? Il y a du Predator dans les parages!
L'arrivée du monstre alien change la donne. Le jeu se muscle. Vous rêviez de voir ces personnages si tranquilles et bubble-gum mourir, saigner, se faire transpercer de part en part? Ne quittez pas, vous êtes au bon endroit. Même Archie va connaître un destin funeste, et une transformation digne d'un Steve Rogers super soldat. Fernando Ruiz place tout ce qu'il est possible de mettre en terme de références propres à la série, et c'est en effet Riverdale sous les tropiques, puis Riverdale tout court, alors que le monde d'Archie est caractérisé parfaitement, jusque dans les sourires si souvent figés sur des ados qui vivent le drame avec allégresse et légèreté, et quelques vignettes piquantes, avec de jolies jeunes filles en sous vêtements. Le Predator lui est volontairement caricaturé, maladroit, une sorte d'animal terrifiant mais sorti d'un cartoon où l'image atténue par sa fausse drôlerie le sérieux du propos.
Ce mash up délirant, à réserver aux fans de ce genre d'humour truculent, est prévu pour cette semaine, chez Wetta, avec en bonus des mini-crossovers Archie/Dark Horse (avec Hellboy, Sabrina, The Mask, Mind MGMT…). L'album existe dans deux versions, dont une limitée, bien évidemment. Aussi dingue que la rencontre Archie/Punisher des années 90!
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