No home de Yaa Gyasi

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Yaa Gyasi

Traduit de l’anglais par Anne Damour

Calmann-Lévy

4 janvier 2017

Lu sur liseuse

 

Difficile de décrocher de ce roman-là pour deux raisons : il est captivant et on a peur de perdre le fil si jamais on laisse passer trop de temps entre deux lectures.

L’histoire ? Elle s’étend sur trois siècles !

Au Ghana, une femme a deux enfants, deux filles, de deux pères différents, deux sœurs qui ne se rencontreront jamais. Le roman raconte l’histoire de ces deux lignées, l’une grandit en Afrique (famille d’un vendeur d’esclaves, la fille ayant été mariée de force à un colon anglais) et l’autre en Amérique (famille vendue par le même vendeur d’esclaves).

Chaque chapitre est centré sur un personnage, fils ou fille du personnage précédent, et les chapitres alternent l’une et l’autre lignée.

Est-ce clair ? Rien n’est moins sûr.

Mais peu importe, je ne connaissais rien de l’histoire et j’ai aimé découvrir cette construction particulière du roman (un peu perdue au début mais pas longtemps) parce que j’avais l’impression de lire plusieurs histoires individuelles, je lisais chaque chapitre comme autant de nouvelles ou de contes. Néanmoins, la réussite de ce roman c’est son ampleur, son ambition ! On ressent, on vit chaque vie comme une partie d’un tout, d’une histoire commune à tous, l’esclavage, la ségrégation, et sur l’autre continent, la colonisation, les guerres interethniques, les croyances… Ce roman c’est l’Histoire du Ghana ! et donc des Etats-Unis et donc de la Grande-Bretagne, comme le Sénégal est aussi celle de la France.

C’est un livre sur les souffrances des gens opprimés. Les personnages sont meurtris, abimés, humiliés, et malgré tout, ils vivent, se marient, aiment et se battent. C’est un livre qu’on lit en retenant son souffle, une inspiration pour chaque chapitre. On sait ce qui est arrivé à ces peuples, on connaît et pourtant on s’indigne toujours autant. Et surtout, l’auteur réussit à dérouler l’histoire sur les deux continents sans aucun manichéisme, mais avec un talent incroyable qui ne faiblit pas de page en page.

Certains ont comparé Yaa Gyasi  à Toni Morrison, je n’irai pas jusque-là, sa langue est un peu moins imagée, un peu moins haute en couleurs, elle est plus abordable, moins dense, mais cela n’enlève rien à la puissance de ce roman. J’ai beaucoup aimé. Il m’a cueilli sans prévenir, je l’ai ouvert dans l’intention de n’en lire que les premières lignes et j’ai avalé le premier chapitre d’une traite.