La serpe • Philippe Jaenada

serpe Philippe Jaenada

La serpe • Philippe Jaenada

Éditions Julliard, 2017 (634 pages)

Ma note : 14/20

Quatrième de couverture …

Un matin d’octobre 1941, dans un château sinistre au fin fond du Périgord, Henri Girard appelle au secours : dans la nuit, son père, sa tante et la bonne ont été massacrés à coups de serpe. Il est le seul survivant. Toutes les portes étaient fermées, aucune effraction n’est constatée. Dépensier, arrogant, violent, le jeune homme est l’unique héritier des victimes. Deux jours plus tôt, il a emprunté l’arme du crime aux voisins. Pourtant, au terme d’un procès retentissant (et trouble par certains aspects), il est acquitté et l’enquête abandonnée. Alors que l’opinion publique reste convaincue de sa culpabilité, Henri s’exile au Venezuela. Il rentre en France en 1950 avec le manuscrit du Salaire de la peur, écrit sous le pseudonyme de Georges Arnaud.
Jamais le mystère du triple assassinat du château d’Escoire ne sera élucidé, laissant planer autour d’Henri Girard, jusqu’à la fin de sa vie (qui fut complexe, bouillonnante, exemplaire à bien des égards), un halo noir et sulfureux. Jamais, jusqu’à ce qu’un écrivain têtu et minutieux s’en mêle…

La première phrase

« Quelle malchance ! s’écria Claude. »

Mon avis …

Avant d’ouvrir cet ouvrage, je n’avais absolument jamais entendu parler de l’affaire Henri Girard. Le début des années 1940. Le château d’Escoire. Un triple meurtre. Une serpe. Mais surtout un procès retentissant, où tous (ou presque) croient le jeune Henri (alors âgé d’une vingtaine d’années) coupable. J’aime beaucoup lire les ouvrages reprenant des faits divers, encore plus lorsque Histoire et châteaux s’en mêlent ! Aussi il me tardait d’ouvrir cet écrit signé Philippe Jaenada, et de découvrir la plume de l’auteur par la même occasion. Si j’ai apprécié le travail titanesque fourni par Philippe Jaenada, ou encore adoré endosser un costume de lectrice-enquêtrice le temps de quelques pages, je n’ai malheureusement pas eu le coup de cœur tant espéré.

La serpe brosse un portrait psychologique plutôt réussi d’Henri Girard (alias Georges Arnaud, son nom de plume). De son enfance à la fin de sa vie, en passant par la tragédie d’Escoire et son exil en Amérique du Sud, le lecteur rencontre un personnage complexe, aux multiples facettes. Fils unique d’une grande famille, Henri Girard détonne. Il balance l’argent par les fenêtres. Il se moque des conventions. Il se montre parfois violent. Alors lorsque le jeune Henri, peu apprécié dans les environs d’Escoire, retrouve les corps sans vie de son père (Georges Girard), de sa tante (Amélie) et de la domestique (Louise), les soupçons se portent immédiatement sur lui. Le mobile : l’argent. On sait que la veille des meurtres, Amélie aurait retiré une forte somme à la banque. Mais surtout, suite aux meurtres, Henri se retrouve seul héritier de la fortune familiale.

Avec La serpe, Philippe Jaenada a réellement effectué un travail de petite fourmi. Il décortique toutes les pièces du dossier. Il replace les éléments dans leur contexte historique (en 1941, nous sommes sous l’Occupation et le régime de Vichy). Il tente d’explorer la psychologie de chacun des protagonistes. Il reprend même quelques petites phrases oubliées pour construire une véritable hypothèse… Acquitté suite à l’appui de son avocat (Maurice Garçon), Henri Girard sera donc blanchi. L’affaire du triple meurtre du château d’Escoire restera par la suite une véritable énigme. Henri Girard était-il coupable ou innocent ? Qui, à part lui, aurait pu faire le coup ? Pourquoi l’enquête a-t-elle négligé de nombreux détails cruciaux ? J’ai apprécié que l’auteur se montre respectueux de chacun des protagonistes. Son hypothèse m’aura de même grandement questionnée.

Mais alors pourquoi n’ai-je pas tant accroché que ça ? Je crois qu’il me manquait souvent quelques espaces pour reprendre ma respiration. Cet écrit est dense, les chapitres sont longs. J’ai frissonné. Je me suis questionnée. Mais comme j’ai eu du mal à avancer dans ma lecture ! Non par manque d’intérêt, bien au contraire, peut-être plus par rapport à la manière dont Philippe Jaenada nous fait part de son avancée dans l’enquête. Il évoque certaines phrases, fait des digressions, retourne à certains personnages de l’affaire. J’ai parfois été comme noyée dans un flot d’informations. J’aurais peut-être préféré retrouver des chapitres plus courts, et moins de digressions. Je précise que ceci n’enlève rien à l’immense travail de l’auteur. L’enquête se montre fouillée et rigoureuse. J’ai simplement été sensible au sujet, beaucoup moins à la forme.

En bref, si j’ai plutôt apprécié cet écrit (l’affaire du château d’Escoire reste passionnante), je suis un peu déçue d’avoir eu ce ressenti de devoir m’accrocher, de ne rien lâcher, pour avancer dans l’enquête. Cette lecture aura donc été plutôt laborieuse, mais non sans intérêt. Je reste bluffée par le travail titanesque fourni par Philippe Jaenada. Si vous vous intéressez aux faits divers, et si les pavés ne vous font pas peur, je vous encourage donc à jeter un œil sur cet ouvrage.

Extraits …

« Ce que j’aime bien, ce sont les petites choses, le rien du tout, les gestes anodins, les décalages infimes, les miettes, les piécettes, les gouttelettes – j’aime surtout ça parce qu’on a pris l’habitude, naturelle, de ne pas y prêter attention ; alors que ces décalages infimes et les gouttelettes sont évidemment aussi importants que le reste. »

Ouvrage lu dans le cadre de la Masse Critique Babelio

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