Un loup pour l’homme de Brigitte Giraud

loup pour l’homme Brigitte Giraud

1960. Antoine a 20 ans. Marié depuis peu à Lila, ils viennent d’apprendre la grossesse de cette dernière. C’est alors que le couperet tombe : Antoine est mobilisé pour partir en Algérie.

Après avoir tenté en vain d’interrompre la grossesse, Lila ne se voyant pas mère sans homme à la maison, les deux jeunes gens sont forcés de se séparer. Lila reste en France, Antoine part en direction de Sidi-Bel-Abbès, affecté comme infirmier dans un hôpital militaire.

Commencent alors de longs mois d’exil, d’attente, dans un entre-deux troublant. Car Antoine et ses copains de chambrée passent leur temps à l’hôpital, n’en sortent que peu. Ils voient défiler nombre de blessés, plus ou moins graves, entendant un certain nombre de rumeurs, sont peu au fait de la politique. Ils côtoient des harkis, des pieds-noirs, entendent parler des arabes, des fellaghas… Tout cela leur semble bien confus, de même que leur rôle dans ce pays.

A côté de cet univers clos, c’est la lumineuse Algérie qui transparaît, qui les happe à son tour. Ils s’attachent à cette terre qu’ils n’ont pas choisie.

Rapidement, Antoine se rapproche d’un blessé, Oscar, amputé d’une jambe et qui ne parle plus. De façon inexplicable, il se sent proche de cet homme dont le destin aurait pu être le sien, et tente de le ramener à la vie. Oscar devient le centre de ses préoccupations, peut-être une façon de masquer l’absence des siens, d’occulter les nombreux autres jeunes soldats mutilés, choqués…

Quand après quelques mois, Lila lui fait part de sa décision de le rejoindre en Algérie, Antoine a peur mais accepte la volonté de cette femme forte et décidée. Il quitte les baraquements de soldats pour un petit appartement, faisant des allers-retours quotidiens entre deux univers, ne sachant où est son véritable « chez moi », entre le cocon familial et le théâtre de tant de destins brisés.

Lucie naît, puis Lila repart bientôt, poussée par le danger. Antoine finit par être démobilisé, et rentre à son tour. Sort-on jamais indemne d’une guerre, même d’une drôle de guerre ?

Si j’ai aimé l’écriture dès les premières lignes, celle-ci m’a un peu pesé au fil du récit, comme si elle était un obstacle de plus, comme si elle participait à cette chape de plomb qui a recouvert cette période historique. Car tout est relaté à la troisième personne, dans dialogues, maintenant comme une distance avec la réalité.

Mais c’est également ce choix d’expression fait par l’auteure qui traduit également, et justement, la sensation éprouvée par Antoine et ses condisciples, entre silence, réalité cachée, réalité suggérée, réalité fantasmée. Ce n’est pas un documentaire sur la guerre d’Algérie, par ailleurs encore peu documentée, mais bien la perception d’événements lointains et pourtant si proches, d’exactions terribles, des jeunes fracassés par la violence subie ou donnée.

J’ai aimé lire un livre traitant de cette période historique, sujet toujours tabou. Je garde en tête le mélange, ou le contraste, entre des paysages magnifiques et une atmosphère douce, et la terreur d’une période de déchirement extrême. Un roman qui se savoure, qui se dévore, qui laisse des traces…

Brigitte Giraud, née en 1960 à Sidi-Bel-Abbès en Algérie, est une écrivaine française, auteure de romans et de nouvelles. 

Un loup pour l’homme est paru chez Flammarion en août 2017 (19€).

Une lecture dans le cadre des Matchs de la Rentrée Littéraire #MRL17 de Priceminister. Cette opération m’avait fait découvrir Petit pays de Gaël Faye l’année dernière.

Un loup pour l’homme de Brigitte Giraud

Lecture partagée sur le blog Délivrer des livres pour le challenge 1% rentrée littéraire 2017.

Un loup pour l’homme de Brigitte Giraud
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