Kiki de Montparnasse • Bocquet et Catel

Par Bénédicte

Éditions Casterman, 2007 (384 pages)

Ma note : 15/20

Égérie des grands artistes des années 20 (Kiki posait en tant que modèle photo), mais aussi danseuse ou encore actrice pour le cinéma, Kiki de Montparnasse (1901-1953) reste indubitablement une figure forte des Années folles. Ce roman graphique bien documenté s’attache à dresser le portrait d’une femme libérée, indépendante, au caractère bien trempé. J’ai grandement apprécié me plonger dans le Paris de l’entre-deux-guerres, d’autant plus que j’ignorais beaucoup du destin de cette femme pour le moins surprenante.

Ceux qui me connaissent depuis un moment savent que je voue une passion sans borne à l’Histoire, surtout lorsqu’il s’agit de la Belle Époque et des années 1920-1930. Quand je rencontre des livres qui abordent ces deux périodes, je ne peux donc qu’être tentée. Ici, je ne regrette pas ma découverte. Si au départ j’étais plutôt dubitative sur les illustrations, j’ai fini par me laisser porter. J’ai tout simplement dévoré ce roman graphique qui nous montre combien une petite fille pauvre (qui n’était pas non plus spécialement jolie) a réussi en grandissant à se faire un nom, notamment grâce à son culot et à son ton gouailleur. Car Kiki (née Alice Prin) ne fait alors rien comme tout le monde : elle chante, boit, fait du bruit et rit fort. Elle ne se laisse donc aucunement marcher sur les pieds.

J’ai beaucoup aimé découvrir ce portrait. Même si il faut le dire, j’ai parfois trouvé à Kiki un petit côté cinglé (heureusement, notre héroïne se montre tout autant attachante). Enfant illégitime, la petite Alice est élevée avec beaucoup d’amour par sa grand-mère. En 1913, elle quitte Châtillon-sur-Seine pour rejoindre sa mère, Marie, qui travaille à Paris. En 1917, Alice n’est qu’une adolescente lorsqu’elle se retrouve mise à la porte. Afin d’échapper à la pauvreté, elle n’entrevoit alors qu’une solution : commencer à poser nue pour des artistes peintres (Soutine, Modigliani ou encore Foujita avec qui elle restera en lien toute sa vie). Dès lors, naît ainsi la légende Kiki : Alice adopte la coupe au bol, se maquille avec du khôl et se peint la bouche en rouge vif. Icône du quartier Montparnasse, Kiki côtoiera les plus grands (auteurs, poètes, artistes surréalistes). Mais l’amour de sa vie restera sans doute Man Ray, même s’il s’agit d’un amour pour le moins passionnel. Ils s’aiment sans s’aimer, se déchirent, puis se retrouvent avant de se séparer. Le duo restera cependant plus ou moins soudé durant toute la vie de Kiki.

Ce roman graphique retrace donc une idylle entre deux personnalités au caractère bien trempé, mais pas seulement… Il s’agit en effet d’une véritable biographie qui part de la naissance de la petite Alice pour se terminer sur la chute d’une icône des années 20 qui aura perdu de son rayonnement. Culottée, passionnée, peut-être quelque peu égocentrique, Kiki aura réussi à rebondir après bien des tempêtes. Brûlant la vie par les deux bouts (on sait d’ores et déjà en lisant ce roman que la chute sera douloureuse), Kiki de Montparnasse aura sans doute eu une vie à son image : hors du commun et lumineuse.