La Louve

Texte de Clémentine BEAUVAIS et illustrations d'Antoine DEPREZ

Alice Editions, collection "Histoires comme ça", février 2014

Dès 6 ans

Notions abordées : amitié, fantastique, nature, lien homme/animal, symboles.

Une couverture noire, deux yeux qui happent, un sourire malicieux, voire moqueur ou rebelle, et un titre simple mais ô combien évocateur, nous invitent grandement à découvrir l'histoire de Romane, oscillant entre conte et légende.

Alors que vient de tomber la première neige de l'hiver, une sorcière-louve condamne la petite Lucie à mourir si on ne lui rend pas sa fille.

Mais le louveteau a été tué pour sa fourrure par le père de Lucie, afin de lui confectionner un manteau pour se protéger du froid.

Œil pour œil...

Seulement trois jours pour trouver une solution avant que la colombe de glace ne fonde et emporte la vie de Lucie.

...Dent pour dent.

Son amie Romane, orpheline et narratrice, décide de l'aider par ses propres moyens lorsqu'elle comprend que les adultes, vindicatifs ou résignés, ne seront d'aucun secours.

Avec les garçons Louis et Momo, elle met sur pied un plan simple : revêtir la peau, faire comme si elle était une louve et aller de nuit trouver la sorcière pour qu'elle lève le sortilège.

Par deux fois, ils échouent.

Romane persévère, simule, se complaît sous cette peau de bête qui l'enveloppe, la rassure, la transforme.

Vient le troisième soir.

J'ai voulu, de toutes mes forces, avoir peur. Mais je n'avais pas peur. Au contraire, j'étais heureuse. J'avais chaud, j'entendais la musique de la forêt. La louve m'a doucement léché le front.

Et c'est le début d'une nouvelle vie pour les deux fillettes.

Clémentine Beauvais nous relate un conte, d'hier ou d'aujourd'hui, fantastique et dérangeant tout en clins d'œil, jeux de mots et expressions (autour du froid, du loup, de la bête, du silence). Ambiance moyenâgeuse, crainte du loup et de la magie, symbole fragile de paix derrière le sortilège, prégnance de la nature et relations à elle.

Mon 6 ans a pensé " Peau d'âne " et moi " Bête du Gévaudan ".

Au-delà de mon attrait pour l'Histoire et les légendes, ce conte a fait écho à mes convictions personnelles quant aux liens ambivalents que l'Homme entretient avec la nature, et notamment les animaux dont il se sert sans vergogne : chair, peau, fourrure, os etc. Et sans imaginer, comprendre, accepter que l'inverse pourrait être possible.

Antoine Déprez livre des illustrations puissantes et évocatrices.

Leur esthétique (qui m'a rappelé le Barbe Bleue de Maurizio A.C. Quarello) prolongent cette ambivalence, entre les tons chauds et colorés des intérieurs, froid pur des extérieurs, crayonnés au dessin beau mais brut, comme instinctif, pour Romane qui sait comment faire.