Le monde est fatigué

   monde fatigué

En deux mots
Après l’accident qui l’a amputée des deux jambes, Êve marche sur deux prothèses en titane et gagne sa vie en proposant des shows durant lesquels elle se transforme en sirène. Motivée par un désir de vengeance, elle a engagé un détective privé pour retrouver le chauffard qui l’a laissé exsangue.

Ma note
★★★★ (j’ai adoré)

Ma chronique

La belle sirène à soif de vengeance

Toujours aussi imaginatif, Joseph Incardona explore notre monde fatigué en mettant en scène une jolie sirène qui parcourt la planète pour offrir des shows aquatiques époustouflants. Mais ce qui l’anime avant tout, c’est une soif de vengeance.

Êve est une jeune femme superbe. Quand elle arrive à Vandœuvres, dans la banlieue ultra-chic de Genève, c’est pour offrir ses services à l’occasion d’un anniversaire. Elle se transforme en sirène et apprend aux filles présentes comment se maquiller, s’affubler d’une queue-nageoire et à batifoler dans la piscine. Le tout pour deux mille francs suisses. La différence entre elle et ses élèves tient au fait qu’elle n’a plus de jambes et vit avec des prothèses en titane. Un lourd handicap qui fait suite à un accident de la route, dont on découvrira les circonstances un peu plus tard.
Après trois ans dans le coma et deux en centre de rééducation, elle a repris une vie à peu près normale. Mais désormais, elle fait peur aux hommes, comme ce cadre supérieur rencontré au bar de son hôtel et qui s’est enfui dès qu’il a découvert en l’allongeant sur son lit qu’elle était « différente ».
Alors sa colère se fait plus explicite, sa soif de vengeance plus forte. Matt Mauser, le détective privé qu’elle a engagé pour retrouver l’homme qui l’a renversée avant de prendre la fuite, à réussi à l’identifier.
Toutes les étapes de son périple autour du monde, sillonnant les aquariums géants de Paris à Brisbane et de Tokyo à Dubaï, sans oublier une escale en plein Pacifique Nord, où se sont rassemblés des tonnes de déchets plastique, ne sont que des rendez-vous préparatoires à son but ultime.
Et l’occasion pour Joseph Incardona de nous offrir un final en apothéose !
En revisitant le mythe de la sirène pour en faire le symbole d’une humanité épuisée, consumée par ses propres excès, Joseph Incardona nous offre une fois encore un cocktail explosif, où le glamour le dispute à la désolation, où les désirs se transforment en fardeau, et où chaque éclat de lumière semble n’être qu’un leurre de plus.
Les phrases, ciselées comme des lames, percent l’apparence pour révéler la dualité de son héroïne, à la fois icône glamour et femme brisée, produit et victime d’une société qui consomme tout, même les rêves.
Dans cette course effrénée vers toujours plus, l’auteur excelle à capturer l’atmosphère d’un monde globalisé, où les frontières s’effacent au profit d’une uniformité déshumanisante. Les aquariums, ces espaces clos et artificiels, deviennent la métaphore d’une société qui étouffe sous le poids de ses propres illusions. Pourtant, au cœur de cette noirceur, le roman trouve des éclats de poésie, comme autant de respirations dans l’oppression. Êve, malgré sa quête de vengeance, reste un personnage profondément humain, dont la complexité fascine et bouleverse.
Après Stella et l’Amérique (2024), où il peignait le portrait d’une Amérique en crise à travers le destin d’une femme aux pouvoirs exceptionnels, Les Corps solides (2022) dans lequel une mère s’inscrit à un jeu aux règles délirantes pour assurer un avenir à son fils et La Soustraction des possibles (2020), une plongée dans les mécanismes de la manipulation et de l’illusion, Joseph Incardona poursuit ici son travail d’auscultation des marges et des excès du monde moderne. Avec cette même tension narrative, haletante et si addictive!

Le monde est fatigué
Joseph Incardona
Éditions Finitude
Roman
224 p., 21€
EAN 9782363392350
Paru le 22/08/2025

Où ?
Le roman est situé principalement en Suisse, à GenÊve, Zurich,  Brig, Martigny, Conthey, Crans-Montana et Derborence. On y voyage aussi beaucoup, à Paris, Tokyo, Brisbane, le Pacifique Nord et Dubaï.

Quand ?
L’action se déroule de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
« Il y a tellement de bruit alors qu’il faudrait du silence, canaliser l’émotion, poser une compresse fraîche sur la folie du monde. »
Êve est une sirène professionnelle qui nage dans les plus grands aquariums du monde. Mais personne n’imagine la femme brisée, fracassée, que cache sa queue en silicone. Quelqu’un lui a fait du mal, tellement de mal, et il faudra un jour rééquilibrer les comptes.
En attendant, de GenÊve à Tokyo, de Brisbane à Dubaï, elle sillonne la planète, icône glamour et artificielle d’un monde fatigué par le trop-plein des désirs.
À travers un destin singulier, Joseph Incardona revisite le mythe de la sirène et nous donne à voir une humanité en passe de perdre son âme.

Les critiques
Babelio 

Les premières pages du livre
« Il s’agit d’en finir, allégée de tout.
C’est un jour à la fois grandiose et funeste.
Le début de la fin, comme on dit.
Mais le début n’est pas vraiment le début : dans ce feu qui la torture, le temps passe et la vérité s’enfuit.
Car les rêves sont la cage du néant.
Une fois qu’on le sait, tout devient plus léger. Mais une fois qu’on l’a compris, on peut aussi se laisser couler et toucher le fond.
Doucement.
Ainsi meurent les sirènes.

1
Genève
Signe des temps, le Uber qui la conduit est un véhicule hybride et le chauffeur métis s’oriente avec un GPS. Son prénom à elle, Êve, est un pseudonyme avec circonflexe sur le premier « e »: chacun est différent, unique à sa façon, et il faut le faire savoir.
On le voit: tout est mélangé, incertain, en devenir. Seule la richesse est un socle immuable et fiable, comme la pierre dans laquelle on investit. Maisons de maître, villas modernes, pavillons contemporains. Dans ce quartier chic de la commune de Vandœuvres (mais œuvrer à quoi?), sur la rive gauche du Léman, les propriétés se succèdent comme dans un Beverly Hills des fortunés anonymes.
Quelques chiffres: 90 300 millionnaires. 345 centimillionnaires. 16 milliardaires.
Après New York, San Francisco, Londres et Los Angeles, Genève est au cinquième rang des villes du monde où vivent les personnes les plus aisées.
Là où se trouve Êve aujourd’hui.
Parce que dans rêve, il y a Êve.
Le SUV sombre s’immobilise sans bruit devant la propriété. Le chauffeur valide la destination en posant son index manucuré sur l’écran tactile du navigateur. Êve ne voit pas ses yeux cachés derrière des lunettes de soleil.
«Nous sommes arrivés, mademoiselle.»
À travers la vitre fumée de la voiture, Êve regarde le portail en aluminium composé de quadrilatères en relief, ne voit pas la maison qui se trouve derrière, malgré la hauteur du véhicule. Elle se décide, ouvre la portière. S’extraire d’un siège est une technique qu’elle a apprise au centre de rééducation : faire pivoter son bassin, plier les genoux, sortir les deux jambes simultanément et les déplier vers le sol. Elle fait cela d’un mouvement heurté, un peu étrange si l’on y prête attention, mais personne ne remarque rien en général.
C’est comme dans la rue, qui pense à marcher en regardant le ciel?
Elle entend les cliquetis réguliers des arroseurs automatiques, l’eau ne manque pas, le golf-club est tout proche.
Êve contourne la voiture d’un pas raide. Dans la poche latérale de son pantalon, sa main trouve ses lunettes polarisées, elle se rassure: elle et le chauffeur sont maintenant à équidistance d’un hiatus d’obscurité.
Le chauffeur a ouvert le coffre. Il pose par terre un volumineux sac de sport et s’apprête à faire de même avec une housse de grande taille.
«Donnez-la-moi, s’il vous plaît, dit-elle en tendant ses bras.
— C’est lourd. Voulez-vous que je vous aide à porter tout ça ?
— J’ai l’habitude, merci. Mais c’est gentil de le proposer.»
Le chauffeur esquisse un sourire, il se voudrait désinvolte, mais Êve sait qu’il est mal à l’aise. Il y a en elle tant d’éléments recomposés et fabriqués qu’elle paraît à peine humaine. Pourtant, ce qui soulÊve la méfiance des gens à son contact suscite l’admiration dans son métier. Êve est devenue fonction d’un rôle, usage d’elle-même: elle est devenue ce qu’elle fait. La fonction détermine l’organe, comme le suggérait Lamarck. Mais Lamarck se trompait.
Parce que dans rêve, il y a Êve.
Êve salue le chauffeur qui reprend le volant. La Toyota s’éloigne, Êve espère aller bientôt au Japon. Elle ira.
Êve prend son temps, demeure immobile sur le bord du chemin, à l’ombre de deux pins parasols et d’un gigantesque cèdre du Liban. Elle n’attend rien du Liban et n’ira pas. Elle reste ainsi, debout et bancale sous la brise tiède qui souffle par rafales dans l’après-midi caniculaire. On dirait un mât de navire qui tangue sur la terre ferme. Lorsqu’elle ferme les yeux, son équilibre devient incertain. Et comme un mât en pin sylvestre, sa peau transpire une légère résine. Êve pourrait se tenir, sculptée, à la proue d’un navire, mais plus aucun armateur n’a cette poésie-là. Les cargos et supertankers naviguent par satellite, les flots ne sont plus un mystère.
Alors, Êve ouvre les yeux, soulÊve son sac par une extrémité et le fait avancer sur ses roulettes jusqu’au visiophone sur lequel n’est inscrit aucun nom. Vivons dans l’opulence, vivons cachés. La seule certitude est l’adresse, chemin de l’Écorcherie – unique bémol à la perfection du cadre –, et le numéro 8 inscrit par petits trous perforés sur un coin visible du portail. Êve appuie sur la touche d’appel.
Passent une dizaine de secondes. Un grésillement, suivi d’un déclic, l’invite à pousser le portillon.
La villa de plain-pied apparaît en léger contrebas, au bout d’une esplanade de gravillons blancs. Une pelouse taillée au rasoir et d’un vert extraterrestre entoure la construction en béton. De vastes hublots percent la carapace grise et polie sur toute la longueur de l’édifice. Êve ne sait quoi penser de cette architecture et, d’ailleurs, elle n’en pense rien. Les roues de son sac de sport se bloquent dans les gravillons, elle le tire plus qu’elle ne le fait rouler. Un homme massif, cheveux rasés – costume noir et cravate – surgit de la porte principale. Il s’avance vers elle, tend son bras, main ouverte, lui signalant de s’arrêter. Lui aussi porte des lunettes de soleil, chacun se protège: toutes les heures blessent, la dernière tue.
Avec un accent de l’Est, il salue Êve et lui demande sa carte d’identité.
Êve n’a pas de sac à main, elle n’en a jamais eu. Elle n’a jamais été assez « fille» pour cela, sa mère aurait préféré un garçon, paix à son âme. C’est pareil pour ce large bonnet en coton qu’elle a pris l’habitude de porter et dans lequel elle enroule sa chevelure. Elle sort son portefeuille de la poche latérale de son pantalon. Le garde du corps saisit la carte qu’elle lui tend et passe un appel sur son smartphone.
Il lit à voix haute le nom inscrit sur le document à son interlocutrice, bref échange en russe, il raccroche.
«Madame Smirnov vous attend. Je peux prendre votre sac ?»
Êve consent à lui confier son sac et suit l’homme aux larges épaules. Elle longe l’habitation par un chemin sinueux se faufilant à travers les roseaux et les nénuphars. L’eau affleure et ruisselle près de ses pieds. L’homme comprend qu’il marche trop vite, ralentit son pas. Ils débouchent plus lentement sur un vaste jardin au milieu duquel a été aménagée une piscine naturelle. Mais le mot piscine est un euphémisme: c’est un vaste espace aquatique aux formes arrondies, bordé de roches et de sable, de palmiers en devenir, d’ancolies, de géraniums vivaces et de pavots de Californie, une flore tropicale variée qu’il m’est impossible de nommer dans son ensemble. Trois bassins en terrasses se succèdent, reliés les uns aux autres par deux petites cascades.
Une sorte de réplique de lagon qui ferait penser à – J’avais quinze ans lorsque j’ai vu le film – Le Lagon bleu.
Cet îlot dépaysant est un caprice auquel a consenti mon défunt mari…
Enchantée, Êve, je suis Galia Smirnov…
Merci, Igor, laissez-nous, je vous prie…»
Le garde du corps s’éloigne. Galia roule les «r», a des cheveux châtains mi-longs, les pommettes saillantes et le nez trop fin sur un visage ayant égaré sa symétrie. Sous le chemisier blanc, une poitrine incongrue parce que trop volumineuse pour des épaules aussi délicates. Là aussi, un écart d’harmonie, une disproportion évidente, mais tous les goûts sont dans la nature.
Les deux femmes se serrent la main.
Galia Smirnov scrute Êve avec une sorte d’émerveillement, ne réussit pas à en détacher ses yeux.
«Vous êtes absolument splendide, Êve. Un pur ravissement.»
Êve remercie, prend le compliment. Même si elle sait pourquoi cette femme lui dit ça ; parce que Galia a peur de vieillir, qu’elle a recours à la chirurgie croyant retarder l’inéluctable alors qu’elle aggrave le ridicule.
«Ma fille et ses invitées arriveront dans une heure, reprend Galia. C’est un anniversaire itinérant, Traveling birthday party, vous connaissez? Elles feront escale dans le jardin, prendront leur gâteau, et puis continueront la fête ailleurs.
Je pense que les 10 ans de ma Xenia sont un âge à marquer d’une pierre blanche, n’est-ce pas?— On veut toujours le meilleur pour nos enfants.— Ah, vous êtes maman vous aussi?»
Êve acquiesce.
«Donc, Êve, je voudrais m’assurer que le déroulé de votre prestation est bien clair. Je veux que ce soit parfait, vous comprenez? Xenia ignore tout de votre présence, c’est une surprise, vous êtes son cadeau…
— Je vous remercie, madame. J’ai mémorisé le programme, ne vous inquiétez pas. Faites simplement préparer les filles comme convenu.
— Le maquillage est waterproof, j’ai suivi vos indications.
— Très bien. J’apparaîtrai quand elles seront au bord du bassin. Lequel d’ailleurs?
— Celui du haut, dit Galia en pointant son index au bout duquel est collé un ongle artificiel oblong et rose. Un tunnel est aménagé depuis l’espace intérieur du poolhouse, là-bas.
Vous pourrez vous y changer. Le passage d’un bassin à l’autre peut se faire à la nage sous les cascades. Vous verrez, c’est formidable! Ah, et, je…
Vous leur expliquerez comment nager avec leur… tenue, n’est-ce pas?
— Bien sûr.
— Nous prendrons les photos dans le dernier bassin. Une baie vitrée donne sur une pièce au sous-sol de la maison. Le photographe se tiendra derrière. Je compte sur vous pour que ce soit inoubliable.
— Je leur expliquerai ce qu’elles devront faire. Vous me confirmez que toutes savent bien nager?
— Bien entendu ! Au prix que coûtent les leçons avec Sergio, c’est bien le minimum! »
Le silence qui suit laisse supposer que les deux femmes ont épuisé le sujet. Pas tout à fait, en réalité: «Bien, le poolhouse est à votre entière disposition. À ce propos, je voulais savoir… Est-ce que je peux assister à votre préparation, Êve? Je suis tellement curieuse de voir comment vous faites!
— Navrée, mais cela ne sera pas possible.
— Vraiment?
— Oui.
— Ah.— …
— C’est niet, alors?
— Oui, madame.»
Galia Smirnov fait un effort pour garder son sourire de circonstance. Êve comprend qu’on ne lui a pas souvent dit non dans la vie. C’est sans doute dommage pour elle. Êve n’ajoute rien, soutient simplement son regard.
«Bien, dans ce cas, je ne vous accompagne pas. Dans les vestiaires, vous trouverez tout le confort nécessaire. Pour rejoindre la piscine, suivez le couloir menant au plan d’eau.
— Je vous remercie.»
Êve soulève la poignée de son sac, la pelouse est si bien entretenue qu’elle n’a aucune peine à le faire rouler.
«Ah, j’oubliais: l’eau est à 30 degrés. Ma fille est une frileuse», précise la mère dans son dos.
C’est bien, pense Êve, ça la changera des aquariums géants où elle se pèle les écailles à 19 degrés. »

À propos de l’auteur

monde fatigué

Joseph Incardona © Photo Sandrine Cellard

Joseph Incardona est né en 1969. Suisse d’origine italienne, il est l’auteur d’une quinzaine de romans ou de recueils de nouvelles. Les derniers, Derrière les panneaux, il y a des hommes (Grand Prix de littérature policière), La Soustraction des possibles (Prix Relay), Les Corps solides et Stella et l’Amérique (Prix Michel Lebrun) connaissent un succès croissant, tant critique que public. Plusieurs titres sont en cours d’adaptation. Il est aussi scénariste pour la BD, le cinéma ou la télévision, dramaturge et réalisateur (un long métrage en 2013 et plusieurs courts métrages. Joseph Incardona vit à Genève. (Source : Edelweiss)

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