Les fantômes de Baz Kalet

Par Henri-Charles Dahlem @hcdahlem

Ma note
★★★ (bien aimé)

Ma chronique

La sarabande de la nuit de Walpurgis

Mêlant enquête policière et ésotérisme, Yann Botrel a concocté un roman noir situé sur une île bretonne. Autour du manoir de Baz Kalet surgissent des traditions séculaires, des secrets de famille et quelques fantômes qui vont bousculer la vie d’un jeune avocat mandaté pour assurer la défense d’un riche propriétaire. Une intrigue savamment orchestrée.

Robert Amstrong est un riche américain qui va, à contrecœur, se rendre à un dîner de bienfaisance pour satisfaire à ses obligations mondaines. Par hasard et par accident, il va y faire la rencontre de Linda Williams, une actrice qui a connu son heure de gloire. Très vite, ils vont devenir inséparables et très vite ils se marient.
Mais au bout de quelques temps l’usure du couple fait son effet délétère. Jusqu’au drame qui survient les de leur séjour sur l’île bretonne de Baz Kalet.
Linda disparaît. Son corps sera retrouvé par des pêcheurs quelques jours plus tard. Robert, ébahi, voit alors débarquer les autorités chez lui et l’inculper de meurtre. Après une enquête expéditive et un procès tout aussi rapide, le voilà condamné à  quinze ans de prison. Bien entendu, il a immédiatement interjeté appel et à obtenu de pouvoir passer le temps de l’instruction dans son manoir de Baz Kalet.
Un séjour qu’il effectuera avec son assistant, sa gouvernante, son médecin personnel mais aussi avec son avocat. Si Adrien Karll n’est pas un ténor du barreau de Lyon, il n’est pas dans une situation financière lui permettant de refuser une somme d’un million d’euros. Sans plus s’intéresser à la raison pour laquelle il a été choisi, il part pour « l’île au passé lourd, cernée d’un océan noir. » À peine arrivé, il sent un climat hostile, un entourage mystérieux et va faire de surprenantes découvertes, comme la présence sur ce bout de terre d’une boîte de nuit, Le Phare, fréquentée d’insulaires mais aussi d’amateurs venus exprès du continent. C’est là qu’il va faire la connaissance de Garance, une jeune fille pétillante qui va lui faire oublier ses soucis avec un mélange d’alcool, de drogue et de sexe. Au réveil ses angoisses vont toutefois le reprendre, la frontière entre cauchemars,  hallucinations et souvenirs devnant très floue. Ses entretiens avec Robert, la documentation qu’il accumule, de rares témoignages qu’il peut recueillir ainsi que le dialogue qu’il entretient avec Mireille, la policière chargée de l’enquête vont lui permettre d’en savoir davantage sur cette île, son histoire et ses mystères. Mais de nouveaux cadavres viennent alourdir l’atmosphère et compliquer la situation. Après Linda, on retrouve notamment les corps de Fabrice Piquetti, le premier avocat engagé par Robert Armstrong et celui d’Audrey Morvan, une jeune fille avec laquelle Adrien a passé la nuit. Peut-être que les fantômes de Baz Kalet détiennent la clé de cette sombre machination ? Mireille, qui ne croit ni au Diable ni aux fantômes, « sent qu’il se prépare quelque chose de terrifiant. » Et pense à la prochaine
nuit de Walpurgis, cette fête d’origine païenne qui a lieu dans la nuit du 30 avril au 1er mai et qui est célébrée clandestinement depuis des temps reculés. C’est à cette date fatidique que la tension atteindra son paroxysme et que l’épilogue viendra révéler au lecteur la teneur de tous ces mystères.
Yann Botrel a réussi à mêler habilement le thriller et l’ésotérisme, les mystères et les traditions, pour construire un roman aussi noir que prenant.

Les fantômes de Baz Kalet
Yann Botrel
Éditions du Gros Caillou
Roman
280 p., 19 €
EAN 9782494202252
Paru le 4/09/2025

Où ?
Le roman est situé principalement sur une île fictive au large de la Bretagne. On y évoque aussi Los Angeles, Paris, Lyon, Charly ainsi que « quelque part » en Suisse.

Quand ?
L’action se déroule de nos jours avec des retours en arrière jusqu’en 1992.

Ce qu’en dit l’éditeur
Adrien Karll est contraint d’assurer la défense de Robert Amstrong, un homme d’affaires américain accusé d’avoir assassiné sa femme, une ancienne star du petit écran. En échange de ses services, Adrien recevra un million d’euros. La seule condition : ne pas quitter l’île où Amstrong vit pendant le temps de préparation du procès. Mais alors que l’avocat fait la connaissance de son client, d’étranges phénomènes se produisent autour de lui. Adrien, pourtant rationnel, va devoir lutter pour ne pas sombrer dans la folie. Un polar ésotérique qui vous fera frissonner à chaque page, en vous plongeant dans une atmosphère troublante aux frontières du surnaturel. Entre fiction et réalité, Yann Botrel aime semer dans ses histoires des anecdotes historiques pour créer des récits qui captivent le lecteur.

Les critiques
Babelio 

Les premières pages du livre
« Prologue
Quelque part en Suisse, le 8 janvier 1992

Le vent soufflait avec force, s’engouffrant dans les recoins du chalet cossu perché au sommet d’une montagne suisse, loin des yeux curieux et des bruits de la ville. Les volets cliquetaient sous l’assaut des bourrasques glaciales, tandis que les vastes fenêtres teintées laissaient deviner sous la lune pâle un paysage enneigé. À l’intérieur, l’atmosphère était lourde, imprégnée d’une tension palpable.
Dans une chambre faiblement éclairée, au fond du chalet, une femme haletait. Allongée sur un lit massif en bois sculpté, elle se tordait, le visage marqué par l’angoisse, les cheveux collés à son front en sueur. L’air était saturé de l’odeur métallique du sang et de relents d’humidité, mêlés à une légère fragrance de lavande, vaine tentative pour masquer la tension.
Elle maugréait un enchaînement de mots dénués de sens, sous l’emprise d’une drogue puissante.
Debout dans un coin, un homme grand et puissant la regardait, immobile. Ses traits étaient dissimulés sous l’ombre d’un chapeau noir, et un élégant manteau long enveloppait sa silhouette. Son regard perçant et glacé suivait chaque mouvement de la femme avec une attention étrange, comme celui d’un prédateur observant sa proie. Il n’était ni médecin ni sage-femme, et pourtant, il était présent depuis le début, figure silencieuse, presque spectrale, dans cette scène d’une violence sourde.

Bien qu’à demi consciente, la femme, secouée par une nouvelle contraction, gémit, son corps se soulevant du matelas. Ses doigts agrippaient nerveusement les draps, les froissant sous la douleur. Ses lèvres tremblaient, formulant des prières muettes. Ses yeux dilatés par la terreur cherchaient parfois ceux de l’homme, mais ils ne recevaient jamais de réconfort. Au contraire, l’ambiguïté qui émanait de lui la rendait encore plus vulnérable, comme si quelque chose de profondément mauvais se cachait sous cette apparence sereine et froide. La sage-femme, le visage de marbre, ne montrait aucune compassion, se contentant de gestes techniques cadencés par les « ploc, ploc » redondants de la perfusion.
— Je ne peux pas… je ne peux pas le faire… souffla la femme entre deux halètements, la voix brisée, étranglée par l’effort.
L’homme ne répondit pas. Il ne la quitta pas des yeux, mais son visage resta impassible. On eût dit que cette scène ne le concernait qu’à moitié. Pourtant, il avait un rôle à jouer ici. Il était là pour s’assurer que tout se passerait comme prévu. Ses motivations, cependant, demeuraient obscures.

Dans la pièce voisine, à travers la fine cloison de bois, la tension était tout aussi palpable que dans la chambre. Assis sur un canapé luxueux, un homme et une femme échangeaient des regards rapides, furtifs, comme s’ils craignaient de rompre le silence pesant. L’homme, dans la quarantaine, costume bien taillé, ne cessait de faire tourner une montre en or entre ses doigts, l’objet cliquetant doucement à chaque tour.
— Ça prend du temps, murmura-t-il d’une voix basse, presque inaudible, sans regarder sa femme.
Elle, élégante et jeune, vêtue d’une robe sophistiquée qui semblait déplacée dans ce cadre austère, hocha la tête machinalement, les yeux fixés sur la porte qui séparait les deux pièces. Ses mains fines tremblaent légèrement sur ses genoux, trahissant son anxiété. Elle avait rêvé de ce moment pendant des années. Des années de traitements

infructueux, de promesses brisées, de désillusions. Ce soir devait être la réponse à leurs prières, la fin de leur calvaire. Mais à quel prix ? — Toutira bien, murmura-t-elle, autant pour se rassurer que pour apaiser son mari.
Mais même elle n’y croyait plus tout à fait.

Dans la chambre, la femme était à bout de forces. Son visage déformé par la douleur n’était plus que l’ombre de ce qu’il avait été, et ses mouvements se faisaient de plus en plus désordonnés. Les contractions s’intensifiaient, et bientôt, un râle sortit de sa bouche. Le corps de la femme se tendit une dernière fois avant de retomber lourdement sur le matelas. L’homme fit quelques pas vers elle, ses bottes résonnant doucement sur le plancher. Ses gestes étaient mesurés et dénués d’émotion.
Il se pencha, observant sans un mot l’enfant qui venait de naître. Une vie fragile, un être minuscule, glissait du ventre de la femme avec une douceur tragique. Un silence pesant s’installa. Le monde entier semblait retenir son souffle. Aidé par la sage-femme tout aussi silencieuse que lui, l’homme prit le bébé avec une froideur calculée et l’enveloppa dans un linge immaculé. La mère, épuisée, tourna faiblement la tête vers lui, esprit embué par sa camisole chimique. Des larmes coulèrent silencieusement sur ses joues blafardes, sans qu’elle émette un son. L’homme se redressa, le bébé dans les bras. Il le regarda un instant, une étrange lueur traversant brièvement son regard, comme s’il hésitait. Comme s’il pesait les conséquences de ce qu’il s’apprêtait à faire. Était-ce vraiment ce qu’il fallait faire ? Puis son visage se figea de nouveau, et il se tourna vers la porte.

Dans la pièce voisine, le couple se leva d’un bond en entendant la porte s’ouvrir. La femme, les mains crispées contre sa poitrine,
s’avança avec une hâte nerveuse.
— Est-ce… est-ce que tout s’est bien passé ? demanda-t-elle, la voix rauque, presque tremblante.
L’homme en noir ne répondit pas tout de suite. Il s’approch lentement du couple, en leur tendant l’enfant emmailloté. Son regard, cependant, scrutait chaque mouvement. Il semblait chercher à comprendre quelque chose de plus profond. Il ne leur faisait pa confiance, mais ses propres intentions demeuraient floues. Était-il vraiment ici pour faciliter cet échange ? Ou quelque chose de bien plus sombre se cachait-il derrière cette façade d’indifférence ?
La femme, le bébé dans les bras, laissa échapper un sanglot.
— Enfin… murmura-t-elle, tandis que son mari posait une main tremblante sur son épaule. Ils avaient ce qu’ils voulaient. Mais quelque chose d’invisible, de terrible, flottait dans l’air, imprégnant le chalet de son ombre. Rien ne serait jamais plus pareil.

1
L’adieu
Los Angeles, Hollywood Forever Cemetery, le 26 juillet 2022

Un été de feu s’abattait sur la Californie. Les nuages s’entrechoquaient, poussés par un vent chaud. Tous se pressaient autour du veuf, Certains manifestaient une affection sincère, d’autres jouaient leurs rôles à merveille, la commedia dell’arte d’un milieu tristement superficiel.
— Mes sincères condoléances, Robert. Vous devriez venir passer quelques jours en Floride, dans notre domaine, pour vous mettre au vert.
— Merci pour votre amitié, Abril, mais je préfère me retirer en France, dans mon manoir de Baz Kalet. Je dois retrouver le calme et les embruns.
— Après cette terrible épreuve, je vous comprends, mais ne vous repliez pas sur vous-même sur cette île perdue et… sordide, osa-t-elle dans un murmure.
— Rien de sordide, simplement la nature et le vent du large plutôt que l’air corrompu de Miami.
— Bien. Faites ce qui vous semble le mieux pour vous…
Abril David enlaça Robert Amstrong dans une étreinte sincère, inattendue chez cette productrice de renom plutôt réputée pour son manque d’empathie et sa vénalité. L’homme d’affaires lui rendit la pareille de manière plus mesurée. Ses larges mains vinrent recouvrir les frêles épaules de la sexagénaire. On eût dit l’embrassade d’un ours et d’une souris. »

Extrait
« L’avocat commença ses lectures par un ouvrage du XIXe siècle intitulé Histoire de Baz Kalet, île bretonne, d’un certain Achille Fouache, historien. Il y apprit que Baz Kalet aurait été découverte vers 540 par Maurus, fils d’un sénateur romain, appelé aujourd’hui saint Maur, qui était disciple de Benoît de Nursie, dit saint Benoît. Maurus était à la recherche de lieux retirés pour ériger des abbayes, mais la légende raconte que lorsqu’il posa le pied sur l’île, il fut pris de terribles visions où le Diable lui sommait de quitter son territoire. Il aurait vu Satan sur le point le plus haut de l’île, armé d’un bâton rougeoyant, le menaçant. C’est à ce moment que l’île fut baptisée « Baz Kalet », littéralement « le bâton cruel ».
L’île ne fut colonisée que bien plus tard, au XIIe siècle, lorsque Richard Cœur de Lion eut besoin d’un lieu pour entraîner les croisés sans éveiller de soupçons chez ses ennemis. Tout ne se passa cependant pas comme prévu. Une forme atypique de lèpre, foudroyante, provoqua des crises de folie et des déformations physiques et décima la colonie. » p. 50

À propos de l’auteur

Yann Botrel © Photo DR

Yann Botrel est un auteur originaire de Charly, commune située au sud de Lyon. Il a exercé les métiers variés d’infirmier ou encore responsable des ressources humaines dans la grande distribution. Aujourd’hui hypnothérapeute, spécialiste des addictions, passionné d’histoire, il partage son temps entre les consultations aux particuliers, son expertise auprès des entreprises, l’écriture et son mandat d’adjoint au Maire délégué à la culture, au patrimoine et à la communication à la ville de Charly. Publié chez Atramenta, il a écrit trois polars à suspense, Le cartomancien et Le cercle des traboules. Le point final de cette trilogie lyonnaise, Le masque de Gnafron est sorti en librairie en juillet 2020. Une nouvelle aventure commence en 2022 avec son arrivée dans la toute nouvelle maison d’édition lyonnaise, Les éditions du gros caillou où il sortira son premier polar historique, sous cette bannière, avec La malle à Gouffé. En 2025 il y publie Les fantômes de Baz Kalet. (Source : Yann-Botrel-auteur)

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