Je voulais vivre


Je voulais vivre lu par Claire Cahen

Où ?
Le roman est situé dans le nord de la France, notamment à Armentières et Bussy.
On y évoque aussi Maastricht, Londres, Dovington, Douvres, Ostende, Genève,  Turin et Florence, Rome.

Quand ?
L’action se déroule de 1609 à 1628.

Ce qu’en dit l’éditeur
Par une nuit glaciale, le père Lamandre recueille une fillette de six ans venue frapper avec insistance à sa porte. L’enfant aux yeux admirables tremble de froid et de faim. Elle a les pieds en sang dans ses souliers à boucles d’argent, mais refuse de répondre aux questions qui lui sont posées. Le vieux prêtre ne saura que son prénom : Anne. Vingt ans plus tard, Anne est devenue Lady Clarick. Richissime, courtisée, elle a l’oreille des grands et le cardinal de Richelieu ne jure que par elle. Pourtant, dans l’ombre, quatre hommes connaissent son vrai visage et sont prêts à tout pour la punir de ses forfaits. Manipulatrice sans foi ni loi, intrigante, traîtresse, empoisonneuse, cette criminelle au visage angélique a traversé les siècles et la littérature : elle se nomme Milady. Voici venu le temps d’écarter la légende pour rencontrer la femme. Même un personnage de fiction peut réclamer justice. Ce roman inoubliable, écrit d’une voix puissamment contemporaine, rend vie à Milady et nous offre son histoire dont Dumas a semé les indices dans Les Trois Mousquetaires. Magnifique portrait d’une femme libre menant, pour sa survie, un jeu dangereux. Dans une époque où trop d’hommes voudraient la contraindre et la posséder, elle se bat – jusqu’à la transgression ultime – pour son pays, pour son idéal et pour sa liberté.

Les critiques
Babelio 
Benzine mag (Caroline Martin) 
L’éclaireur FNAC (Robin Nègre)
Blog Les chroniques de Koryfée (Karine Fléjo) 


Adelaïde de Clermont-Tonnerre présente « Je voulais vivre » © Production Librairie Mollat

Les premières pages du livre
« Captive
Armentières, septembre 1628
Elle hurle. Ou du moins veut le faire. Mais aucun son ne sort de sa bouche. Dans la nuit, elle vient de distinguer, collé à la vitre, un visage d’une beauté sinistre. Le visage d’un homme qu’elle a aimé à se damner avant de le craindre de tout son être. Elle sent ses muscles se raidir. L’étouffement la saisit. Il faut se lever, courir, mais elle reste immobile, son cœur affolé, prise au piège. Elle entend le bris de glace, regarde, médusée, la main qui plonge à l’intérieur de ce lieu qu’elle croyait sûr. La main dont la finesse aristocratique, malgré les cicatrices de ses combats, ne laisse pas soupçonner la puissance. Cette main qu’elle connaît : caressante un temps, puis meurtrière. Le bras ensuite, d’une détermination implacable, s’allonge vers la poignée et tente de l’ouvrir. Comme la crémone résiste, le bras se retire. Elle voit l’homme escalader le rebord de la fenêtre. Dans un bruit effarant, il fait céder la croisée d’un coup de genou, projetant des morceaux de bois et de verre jusqu’au milieu de la pièce. Sa tête apparaît, ses épaules, tout son corps, puis ses semelles de cuir claquent lorsqu’il atterrit sur les tomettes. Il se dresse à moins de trois mètres. Grand, tellement plus grand qu’elle.
Le front haut, les yeux admirables et cernés, des cheveux châtains descendant aux épaules, Olivier de La Fère la domine de toute sa force. Sous son épaisse veste noire à col montant, entrouverte sur une chemise blanche qui laisse apparaître la naissance de son torse, elle distingue le manche ciselé d’un poignard. Ce bref éclat, sous le tissu, la tire de sa sidération. Au prix d’une énergie dont elle ne se pensait pas capable, la jeune femme se précipite vers la porte opposée qui mène à la rivière. En tirant brusquement le battant, elle étouffe un cri. Cette issue n’en est pas une. Là, plus pâle et plus menaçant encore que son acolyte, un deuxième homme. Elle le reconnaît et recule vivement. Vingt ans à peine, maigre, les pommettes hautes et les yeux perçants, il a encore, sous sa fine barbe, des lèvres pleines et la mine enfantine, mais la jeunesse ne confère aucune douceur à son expression. Lui aussi l’a aimée. Lui aussi lui a fait des serments avant de venir la traquer ici. Il tire un pistolet de sa ceinture. Déjà il la vise.
« Range cette arme, d’Artagnan. Cette femme sera jugée, pas assassinée. Sois patient, tu auras satisfaction. »
Olivier parle d’un ton solennel, avec ce calme impérieux qui lui confère l’ascendant sur ses camarades. Un calme dont elle connaît les failles. Elle sait. Il sait. Que la surface de marbre peut se fracturer d’un coup. Ni l’un ni l’autre n’ont oublié ce dont Olivier est capable. C’était il y a presque dix ans, mais par cette nuit froide et sans lune, dans une maison de passage en lisière des bois, le cauchemar recommence. Il ravive entre eux le souvenir d’un autre temps et d’une autre forêt. Elle tremble, les poings perdus dans les replis de sa robe bleue. Elle a le sentiment d’assister à la scène plus que de la vivre. Comme si elle leur abandonnait déjà ce corps chiffon, ce corps matière, tandis que son esprit, hors de portée, reprend sa course folle.
S’enfuir. Par tous les moyens. Ils vont la tuer. Derrière Charles d’Artagnan entrent à présent Isaac, colossal, et Henri, dont les manières et la mise cachent un ennemi redoutable. Ils sont suivis de cet Anglais exécrable, Percy de Winter, ce prétendu lord qui l’a séquestrée des jours durant. Ce fou vindicatif à qui elle vient d’échapper après avoir puisé au plus profond de ses ressources, de son intelligence, de sa volonté. S’enfuir… mais apparaît un homme dont le visage est dissimulé sous la capuche de son long manteau rouge, puis les domestiques qui rejoignent leurs maîtres. Elle les compte. Quatre serviteurs. Eux aussi bloquant les ouvertures. Eux aussi menaçants, résolus. Elle les compte de nouveau. Ils sont dix et elle est seule. Dix soldats rompus à l’art de la guerre. Contre leurs flancs, le fourreau des épées dont ils vont la transpercer. Elle lit sur leurs lèvres, dans leurs yeux, l’excitation des chasseurs. Elle scrute la pièce, cherchant un couteau, un tison, n’importe quel objet qui puisse l’aider à se défendre, mais ils se groupent autour d’elle en un cercle infranchissable. Dans son dos, le mur. Partout leurs épaules, leurs masses, leurs doigts qui l’attraperont, leurs bras qui la mettront à terre pour la soumettre, l’humilier, l’offenser, la salir.
Olivier fait un pas vers elle, se détachant des autres. Elle se replie, voûtée, mais maintient sur lui son regard translucide, prête à encaisser les coups. Il déclare, avec l’air d’un juge qui ouvre un procès :
« Nous demandons Charlotte Backson. »

Le jugement
Armentières, septembre 1628
Elle ne répond pas, appuyée contre la paroi enduite de chaux. Sa poitrine se soulève à un rythme saccadé. Des mèches blondes s’échappent de ses cheveux noués en un chignon qui accentue la délicatesse de ses traits. Elle est d’une beauté à pleurer. Pas la beauté du diable, elle que l’on accuse d’être démoniaque. Non, une beauté exquise. Celle d’Yseult avant le philtre d’amour, celle des madones et des fées. Elle semble incarner cette pureté si chère aux hommes qui tirent leur fierté de pouvoir l’effacer. L’illusion de douceur peut s’installer parce qu’elle a le regard baissé à présent, parce que personne ne voit briller, dans ses yeux, les orages mêlés de peur et de révolte. Olivier répète, plus fort cette fois :
« Nous demandons Charlotte Backson, Anne de Breuil, Milady de Winter ou celui des noms que vous voudrez porter aujourd’hui, car aucun ne vous permettra, désormais, de nous échapper.
— C’est moi, tu sais que c’est moi », murmure-t-elle.
Un silence se pose en même temps que le regard d’Olivier sur elle, plein d’un mépris qui lui broie le cœur.
« Nous voulons te juger pour tes crimes, annonce-t-il. Tu seras libre de te défendre si tu le peux. Charles, c’est à toi d’accuser le premier. »
D’Artagnan, le plus jeune, s’avance, comme à la barre d’un tribunal, mais rien dans ce logis simple, presque modeste, ne peut – malgré les mots qu’ils emploient – évoquer la justice. Il marque une pause et, la voix étranglée, énonce :
« Devant Dieu et devant les hommes, j’accuse cette femme d’avoir empoisonné ma compagne, Constance, morte hier soir. »
Il se retourne vers Isaac et vers Henri :
« Nous attestons », disent-ils d’un seul mouvement.
Charles continue, plus fort cette fois :
« Devant Dieu et devant les hommes, j’accuse cette femme d’avoir voulu m’empoisonner moi-même. Le sort m’a sauvé, mais un malheureux est mort à ma place.
— Nous attestons, reprennent Henri et Isaac.
— Devant Dieu et devant les hommes, j’accuse cette femme de m’avoir poussé au meurtre de son ancien amant ; et comme personne n’est là pour attester la vérité de cette accusation, je l’atteste, moi. »
Il se tait quelques instants, cherchant les mots qui donneront crédit à ces accusations, et ajoute « J’ai dit » pour conclure ce bref réquisitoire.
« À vous, milord ! » commande Olivier de La Fère.
L’Anglais, plus âgé que les autres et richement vêtu, s’approche à son tour. Son visage est marqué par le temps, les intrigues et les combats perdus. Dans un français presque parfait, il poursuit :
« Devant Dieu et devant les hommes, j’accuse cette femme d’avoir fait assassiner le duc de Buckingham.
— Le duc de Buckingham, assassiné ? » s’écrient d’une seule voix tous les assistants.
Dans leurs esprits apparaît la figure flamboyante de ce seigneur qui, à Paris et Londres, leur a fait si forte impression. Favori et ministre tout-puissant du roi d’Angleterre, galant épris de la reine de France, cet homme à la beauté comme à la fortune légendaires semblait intouchable.
« Oui, assène l’Anglais. Elle a fait tuer le duc, sacrifiant au passage un homme qui était l’honnêteté même avant qu’il ne croise le chemin de cette furie. Il se nommait Felton. Il m’était fidèle et il m’était cher. »
Tandis que les dix juges frémissent à la révélation des méfaits encore inconnus de leur prisonnière, un éclat illumine le regard de l’accusée. Ils y voient une rage mêlée de triomphe.
« Ce n’est pas tout, reprend Percy de Winter. Mon frère, James, qui avait fait de vous son épouse et son héritière, est mort en trois heures d’une étrange maladie qui laisse des taches livides sur le corps. Ma sœur, comment votre mari est-il mort ? »
Les assistants murmurent. La noirceur de cette femme menue qui n’a pas vingt-cinq ans les effraie. Ils sont face à la figure vivante du démon.
« Meurtrière de Buckingham, de Felton, de mon frère, je demande votre condamnation, et je déclare que si on ne me rend pas justice, je la rendrai moi-même. »
L’Anglais va se placer près de d’Artagnan. La jeune femme lève les mains à son visage. Elle s’abrite de ces regards haineux. Pas un mot ne sort de sa bouche. Comment répondre à ce torrent de condamnations qui brasse le vrai et le faux, comme la boue d’un fleuve se mêle à l’eau, emportant tout dans sa crue ? Elle pense à son fils, si petit. Elle pense à lui qui a tellement besoin d’elle. Elle ne peut pas mourir. Pas maintenant.
« À mon tour, dit Olivier, tremblant. J’ai épousé cette femme quand elle était jeune fille. Je l’ai épousée malgré ma famille. Je lui ai donné mon bien. Je lui ai donné mon nom, et un jour je me suis aperçu qu’elle m’avait menti, trahi, manipulé. Elle était marquée du sceau de l’infamie. »
Cette nouvelle accusation la fait bondir. Sortant enfin de son mutisme, elle se redresse :
« Oui, marquée sans raison ni justice, marquée par la volonté arbitraire d’un seul homme qui m’a brûlée jusqu’au fond de l’âme. Il a détruit ma vie, mes chances, mes espoirs en criminel et en tyran car je vous défie de retrouver le tribunal qui a prononcé contre moi cette sentence.
— Silence, dit une voix. À ceci, c’est à moi de répondre. »
L’homme au manteau rouge, dont le visage est toujours dissimulé, s’approche à son tour.
« Qui est cet homme ? Qui est-il ? » s’exclame-t-elle.
Cette voix, pourtant, elle la reconnaît. L’odeur lui revient, cette odeur qui la torture et lui rend intolérable la vue même de la viande. Elle revoit son agression. La violence, les cordes qui lui entaillent les mains, le bâillon qui l’étouffe. Elle suffoque. Les couleurs que son indignation avait ramenées à son visage la quittent à nouveau. Lorsque le bourreau de Lille abaisse sa capuche, les lèvres presque bleutées de la jeune femme s’arrondissent en une protestation muette.
Elle se retourne contre le mur qu’elle agrippe comme s’il pouvait lui révéler un passage. Elle sanglote de terreur.
L’homme au manteau rouge ne porte pas de masque, mais pour elle son visage est plus effrayant encore que le cuir dissimulant habituellement cet ouvrier de la mort. Les mains ensanglantées, elle tombe à genoux, recroquevillée. L’homme s’approche d’elle et, d’une voix plus aiguë que ne laisse présager sa silhouette massive, sa bouche lippue et les traces d’amertume que chaque exécution a creusées sur sa face, il accuse à son tour :
« Cette femme était autrefois une jeune fille aussi belle qu’elle est belle aujourd’hui. Religieuse au couvent des bénédictines de Templemars, elle a entrepris de séduire un jeune prêtre au cœur simple qui servait l’église de ce couvent. Elle y est parvenue. Un saint ne lui aurait pas résisté. Leurs vœux étaient irrévocables ; leur liaison ne pouvait durer sans les perdre tous les deux. Elle a obtenu de lui qu’ils quitteraient le pays, mais pour fuir ensemble, il fallait de l’argent. Ni l’un ni l’autre n’en avait. Le prêtre, cédant aux murmures insidieux de cette nouvelle Ève, a volé et vendu les vases sacrés de sa paroisse. La somme ne suffisait pas à s’embarquer, comme ils l’auraient voulu, pour les colonies de la Nouvelle-France. Sous un nom d’emprunt, ils sont donc partis se cacher dans le Berry où il avait obtenu une petite cure. Cette diablesse se faisait alors passer pour sa sœur, quand ils vivaient comme mari et femme. Le jeune prêtre souffrait du mensonge dans lequel il se tenait. Il rêvait toujours de traverser les mers. Il a décidé de repartir dans le Nord implorer ses parents de lui donner l’argent dont ils avaient besoin pour quitter cet état de honte qui leur vaudrait la damnation. En revenant sur le lieu de leur crime, il a été malheureusement arrêté, condamné à dix ans de fers et à la flétrissure. »
L’homme est saisi par l’émotion et pendant un instant, la douleur l’étouffe, lui faisant perdre contenance. Il articule difficilement :
« J’étais déjà le bourreau de Lille. Je fus obligé de marquer le coupable. »
À ce récit, la jeune femme veut se défendre. Elle a relevé la tête. Empourprée d’une rage rentrée, elle prend une brève inspiration mais l’homme au manteau rouge la pointe du doigt, comme si un seul mot d’elle était un crachat.
« Pendant ce temps, cette femme sans cœur et sans parole qui, par ses mines affectées et ses faux sanglots, tente encore de nous attendrir, cette méprisable coureuse suivait déjà un plus bel intérêt. Elle répondait alors au nom d’Anne de Breuil. Elle avait fait la connaissance du seigneur sur les terres duquel était située la paroisse du jeune prêtre. Lorsqu’il l’a rencontrée, le seigneur en est devenu éperdument amoureux. Avide de sa fortune, elle a promptement oublié celui qu’elle avait perdu pour celui qu’elle allait perdre et s’est mis en tête de devenir la comtesse de La Fère. Le prêtre a-t-il appris qu’elle ne l’aimait plus ? Qu’il avait sacrifié sa foi, son nom, son honneur pour une femme qui l’abandonnait dès que passait plus brillante opportunité ? Cette existence vidée de sens lui est devenue odieuse. On l’a retrouvé, un matin, pendu au soupirail de son cachot avec la ceinture de sa soutane… »
Tous les regards convergent vers la coupable. Elle reste indéchiffrable. Le bourreau serre les poings. Cette morgue le rend fou. S’il ne tenait qu’à lui, il la ferait souffrir jusqu’à ce qu’elle implore, qu’elle supplie, qu’elle se répande à terre. La présence des autres hommes le retient. Ils attendent la suite de son accusation. Le colosse cherche ses mots, puis retrouve le fil de sa rancœur :
« Je me suis alors juré de venger le jeune prêtre et, ayant retrouvé cette traîtresse, je lui ai fait savoir que je connaissais ses mensonges, ses trahisons, ses crimes. J’aurais dû la pendre comme il s’était pendu, car je vois, hélas, que le châtiment infligé n’a pas suffi à l’arrêter. Elle est devenue votre épouse, monseigneur, et a ruiné votre famille, dit-il en se tournant vers le comte de La Fère. Elle vous a privé de votre frère, milord, poursuit-il en regardant à présent Percy de Winter. Elle a tué votre compagne, ajoute-t-il encore en posant la main sur l’épaule de d’Artagnan. Partout dans son sillage, elle n’a répandu que le chagrin, le deuil, l’immondice. Elle ne mérite pas le nom de femme. »

Condamnée
Armentières, septembre 1628
« La peine de mort », répond d’Artagnan.
Olivier de La Fère, son mari, celui qu’elle a aimé entre tous, celui qui l’a blessée entre tous, celui qu’elle a fui, celui qui l’a retrouvée, celui qui a sacrifié son nom, sa fortune, son amour pour devenir Athos, poursuit sans une hésitation, sans un regard de pitié, sa funeste cérémonie :
« Milord de Winter, quelle peine réclamez-vous contre cette femme ?
— La mort, reprend l’Anglais.
— Messieurs Porthos et Aramis, vous qui êtes ses juges, quelle peine portez-vous contre cette femme ?
— La mort », confirment d’une voix sourde les deux mousquetaires.
Milady est à genoux. Elle tourne le dos à cette assemblée d’hommes qui a décidé de son sort. Le front appuyé contre la paroi, elle reste sans voix. Dans son esprit, une seule image a envahi tout l’espace, ce petit garçon aux yeux clairs comme les siens, aux cheveux d’or presque blancs comme les siens. Ses menottes, ses bras moelleux qu’il passe autour de son cou, son rire comme une cascade fraîche, ses peurs qu’elle sait apaiser, sa fragilité encore. Elle ne peut pas l’abandonner. Il est si jeune. Il n’a plus de père déjà…
Athos étend la main vers elle, la pose d’un geste ferme sur sa tête :
« Anne de Breuil, comtesse de La Fère, Charlotte Backson, Milady de Winter, vos crimes ont lassé les hommes sur la terre et Dieu dans le ciel. Dépouillez-vous de vos mensonges, renoncez à vos masques, et si vous avez une prière, dites-la, car vous allez mourir. »
À cette sentence, Milady se tourne, veut parler, mais son visage s’est figé. Elle qui sait séduire et convaincre les êtres les plus farouches, elle qui peut se transformer à loisir pour glisser, vive, coulante, entre les doigts de ceux qui veulent la contraindre, n’a, ce soir-là, plus de mots. Elle cherche en vain dans leurs yeux un espoir, une faille. Elle cherche en vain le souffle d’amours défuntes, une once d’humanité, l’esquisse d’un doute. Alors les forces lui manquent. Elle sent la pierre froide contre son front. Ses paupières se ferment, puis une main puissante, implacable, la saisit par les cheveux, la soulève tout entière, la crucifiant d’une douleur inouïe qui ne lui arrache pas un cri.
Dans une procession funeste, Lord de Winter, d’Artagnan, Athos, Porthos et Aramis sortent derrière le bourreau et la condamnée. Les valets, effarés, suivent leurs maîtres. La pièce reste vide avec sa fenêtre brisée, sa porte ouverte, et sa lampe qui brûle tristement sur la table. »

À propos de l’autrice

Adélaïde de Clermont-Tonnerre © Photo Jean-François Paga

Adélaïde de Clermont-Tonnerre, ancienne élève de l’École normale supérieure, est journaliste et romancière. Fourrure (Stock) a été récompensé par cinq prix littéraires, dont le prix des Maisons de la Presse et le prix Sagan, suivi par Le Dernier des nôtres (Grasset), Grand Prix du roman de l’Académie française 2016, traduit en dix langues. Les Jours heureux (2021), prix Cabourg du roman et Je voulais vivre (2025). (Source : Éditions Grasset)

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Du fond des Âges (Le Halo des Ombres – Cycle 2)