Les sirènes • Emilia Hart

Par Bénédicte

Éditions Les Escales, 2025 (435 pages)

Ma note : 14/20

Quatrième de couverture …

Lucy fuit. Le mal qu’elle a fait et celui qu’on lui a fait. Elle part se réfugier auprès de la seule personne capable de la comprendre : sa sœur, Jess. Mais lorsque Lucy arrive dans sa maison délabrée, perchée au sommet d’une falaise battue par les vents, elle ne trouve personne. Où est passée Jess ? 
Lucy se retrouve seule dans une ville côtière où rumeurs et légendes vont bon train. Au gré de ses rencontres, elle découvre les récits d’hommes disparus dans des circonstances mystérieuses et d’un bébé trouvé dans une grotte. 
Surtout, elle commence à entendre des voix de femmes qui murmurent sur l’écume des vagues… Elles lui chuchotent l’histoire de deux sœurs, il y a deux siècles, dans un monde où les hommes étaient maîtres. Un monde et une histoire qui lui paraissent lointains et pourtant familiers. 
Ces bruissements venus des profondeurs de la mer font remonter les secrets du passé à la surface. Poussent-ils Lucy sur le chemin qui la réunira à Jess ? Où vont-ils les faire sombrer toutes les deux ?

La première phrase

« Elle respire au rythme de l’océan.
Inspire.
Les vagues se brisent contre les rochers, écument à l’entrée de la grotte. Glaciales sur ses orteils, sur ses cuisses tremblantes. »

Mon avis …

Lucy se retrouve seule, dans une maison située en bord de mer. Dans cette petite ville côtière, les rumeurs et les légendes vont bon train. Au fil de l’eau, notre héroïne découvre moult faits divers. Les disparitions d’hommes s’enchaînent. Un nourrisson aurait été retrouvé dans une grotte. Mais surtout, Lucy entend des voix féminines murmurant sur l’écume des vagues… Que se passe-t-il ? Et où est passée Tess ? Lucy, qui espérait plus que tout renouer avec sa sœur, se retrouve à écouter l’histoire de deux jeunes filles : Mary et Eliza. Toutes deux ont vécu au XIXe siècle, dans un monde où les hommes avaient tous les droits.

Suite à mon coup de cœur pour La maison aux sortilèges (lu en 2023), il me tardait de retrouver l’écriture poétique d’Emilia Hart. Après la sorcellerie, l’autrice nous propose cette fois-ci d’explorer les légendes marines avec les merrows, ces fameuses sirènes présentes dans le folklore irlandais, et les selkies.

Ce récit s’inscrit dans une double temporalité et vient questionner la place de la femme au gré des époques. Pour bâtir les chapitres se déroulant en 1800, Emilia Hart revient sur l’histoire de l’Australie. Dès les années 1780, des navires anglais déportaient des prisonniers afin de créer de nouvelles colonies britanniques (telles que la Nouvelle-Galles du Sud), au détriment des populations indigènes déjà bien installées sur ces terres.

Condamnées à l’exil, Mary et Eliza se retrouvent dans les cales de la Naïade, entassées auprès d’autres détenues. Terrorisées, nos deux sœurs puisent leur force dans le lien qui les unit. Mais elles le savent, leur histoire est également marquée par des non-dits, des secrets, la disparition tragique de leur mère, et cet appel toujours plus puissant vers l’eau, vers la mer.

Deux siècles plus tard, l’histoire bouleversante de ces deux sœurs se retrouve mystérieusement sur les toiles de Jess. Devenue artiste peintre, celle-ci s’est installée à Comber Bay, ce village devenu tristement célèbre pour les légendes qui alimentent les eaux du bord de la falaise.

Les sirènes présente un point commun avec La maison aux sortilèges : Emilia Hart nous y fait rencontrer des héroïnes fortes qui se protègent (parfois se défendent) de ce que peuvent leur faire subir les hommes. La figure de la sirène se trouve ici modernisée, en ce sens qu’elle représente une véritable force féminine venue soutenir ce peuvent traverser Mary, Eliza, Tess ou encore Lucy. L’intrigue de ce roman explore de même le lien familial (principalement le lien mère-fille) tandis qu’il est question de secret de famille et de transmission intergénérationnelle.

J’ai passé un bon moment en compagnie de ce récit qui se montre ô combien addictif. Les pages ont tourné à toute vitesse, et je dois dire que j’apprécie les intrigues mêlant secret de famille et soupçon de magie (ou de surnaturel). Le mythe de la sirène se montre quant à lui toujours aussi fascinant.

Le coup de cœur n’a cependant pas été au rendez-vous. J’ai peu adhéré à ce que nous propose l’autrice au niveau de la représentation physique de la sirène. Et j’ai eu un peu de mal à m’attacher aux personnages, tout en regrettant quelques répétitions. Si la toile de fond de ce récit se montre originale, je n’ai pas été transportée comme je l’avais été à ma lecture de La maison aux sortilèges.

Extraits …

« Il y a une femme à l’avant du bateau… Ses boucles sculptées dévalent dans son dos, ses yeux sont d’un bleu vif. Et à la place des jambes, elle a une queue. Une queue de poisson. »