Éditions Hachette, 2021 (311 pages)
Ma note : 18/20
Quatrième de couverture …
Tout le monde bat Zézé et lui dit qu’il est le diable… Mais, ange ou démon, à cinq ans, Zézé a un secret : un oranger, le seul confident de ses rêves, qui l’écoute et lui répond.
La première phrase
« La main dans la main, nous marchions dans la rue, sans nous presser. Totoca m’apprenait la vie. Et moi, j’étais très content parce que mon frère aîné me donnait la main et m’apprenait les choses. »
Mon avis …
Zézé a cinq ans et rêve de devenir un poète portant un joli nœud papillon. Son quotidien est pourtant loin d’être rose. Issu d’une famille pauvre, il erre dans les quartiers de Rio de Janeiro et se fait régulièrement battre par ses parents, mais aussi par ses frères et sœurs. Seule Gloria, l’aînée, semble le prendre sous son aile. Zézé peut également compter sur l’affection que lui porte Luis, son petit frère. Mais pour échapper aux coups de ceinture et à l’horreur de cette violence familiale, notre petit héros s’invente surtout un monde imaginaire. Il se confie à Minguinho, un petit pied d’oranges douces auprès duquel il se raconte mille histoires.
Je dois vous l’avouer tout de go : cette lecture fut un énorme coup de cœur. Pas tant pour son intrigue (ô combien triste) que pour les émotions qui m’auront traversée au fil des pages. Il s’agit pourtant d’une relecture puisque j’avais lu ce récit, assez court, au collège (il y a donc plus de vingt ans). Je n’en avais gardé aucun souvenir. La rencontre ne s’était pas faite. Et pourtant… quel roman bouleversant ! Je le découvre aujourd’hui maintenant que je suis devenue maman, avec un petit garçon qui a justement l’âge de Zézé. Et c’est bien simple, le regard naïf de ce petit garçon sur tout ce qui l’entoure (la misère, la pauvreté, le ressenti que personne ne l’aime dans sa famille) ne peut qu’émouvoir. On souffre avec lui, on pleure, on se révolte du sort qui s’acharne sur lui.
Au milieu de toute cette violence, persiste une petite lumière : l’innocence de l’enfance, et l’imaginaire qui va avec. C’est aussi ce qui le sauve. Grâce à Minguinho, il est possible de voyager, de voler, mais aussi d’être écouté et soutenu (car oui, son petit arbre lui répond !). Zézé est également ami avec une chauve-souris, et peut compter sur le regard bienveillant de son institutrice. Précoce et surtout, malgré ce qu’il traverse, Zézé est en effet bon élève. Il a envie d’apprendre.
Et puis, il y a cette fabuleuse rencontre avec Portugâ, un voisin plutôt aisé financièrement puisqu’il a la chance de se déplacer en voiture. Le vieil homme comprend que derrière cette image de petit diablotin se cache un enfant sensible, intelligent, mais surtout foncièrement malheureux. De son côté, Zézé découvre (à sa grande joie) qu’il peut parler, être écouté, sans forcément se faire battre. Grâce à Portugâ, le petit garçon expérimente l’attachement à une figure adulte, presque parentale, lui qui ne se sent pas aimé de ses propres parents.
De ce roman, je garderai en tête certaines scènes inoubliables. L’image de Zézé se déplaçant dans les rues brésiliennes avec sa caisse de cireur de chaussures, dans l’espoir de récolter quelques pièces pour s’offrir des billes, du matériel pour fabriquer un ballon ou encore des images de vedettes de cinéma. Le désespoir du père de notre petit héros qui, ayant perdu son emploi, reste assis, les yeux dans le vide. Ces quelques lignes où Zézé enchaîne les bêtises, oui, mais finalement avec cet espoir de récolter un brin d’attention de la part de ses parents. Ces scènes où il se fait battre, parfois jusqu’au sang, pour si peu. Et enfin, les chapitres où Zézé se réfugie dans son monde, parle à son arbre. Plus que les scènes avec Portugâ, je crois que ce sont ces moments-ci qui m’ont le plus touchée.
Je l’ignorais, mais Mon bel oranger (publié dans les années soixante) est un récit largement autobiographique. Avant même les premières lignes, l’auteur écrit d’ailleurs quelques mots sur le devenir de Gloria. Il nous parle aussi de Luis. Je ne peux que vous inviter à découvrir ce récit étiqueté roman jeunesse (mais plutôt adapté à un lectorat âgé de dix ans et plus). Et, si cela vous intéresse, foncez lire la suite. Allons réveiller le soleil (qu’il faudrait également que je relise) est davantage axé sur l’adolescence de José Mauro de Vasconcelos.
Extraits …
« Écoute, Minguinho, ne fais pas cette tête-là. Lui, c’est mon meilleur ami. Mais toi, tu es le roi absolu de tous les arbres, comme Luis est le roi absolu de mes frères. Il faut que tu saches que le cœur des gens doit être très grand pour contenir tout ce qu’on aime. »
« Portugâ !
– Hum…
– Je voudrais rester toujours près de toi, tu sais ?
– Pourquoi ?
– Parce que tu es la personne la plus gentille du monde. Je ne me fais pas gronder quand je suis près de toi et je sens un rayon de soleil inonder mon cœur de bonheur. »