Avec L’Académie de Santhoryne, Viviane & Céline de Clairval signent un premier tome puissant, immersif et profondément humain, qui marque le début de leur saga Le Halo des Ombres. Ce roman, tout en tension et en mystère, s’inscrit dans la veine des grandes quêtes initiatiques, mais en y injectant une noirceur émotionnelle rare et une justesse de ton remarquable.
Dès les premières pages, le lecteur est happé par une atmosphère étrange, presque gothique. Lùthen, jeune garçon doué pour le dessin, voit son univers basculer dans l’angoisse lorsqu’un cauchemar oublié semble prendre vie. Ce que l’on croit être un simple frisson de fantastique se révèle rapidement comme le prélude d’un drame : un assassinat, une trahison, une fuite. Et derrière tout cela, la promesse d’un monde plus vaste, plus ancien, dont les codes et les enjeux échappent encore à l’enfant qu’il était.
Ce qui frappe, c’est la densité émotionnelle du récit. Lùthen n’est pas un héros classique. Il ne reçoit pas sa destinée comme un cadeau, mais comme un arrachement : à son foyer, à ses illusions, à l’insouciance. Le roman joue avec la peur, la perte et la solitude avec une grande justesse, sans jamais tomber dans le pathos. On assiste à une bascule intérieure, celle d’un enfant qui, confronté à la mort et à la trahison, n’a d’autre choix que de devenir acteur de son propre destin.
L’écriture est à la fois fluide et ciselée. Le duo d’autrices maîtrise parfaitement la narration, alternant descriptions immersives, dialogues rythmés et scènes d’action tendues. L’univers qu’elles construisent — académies secrètes, guildes magiques, figures troubles — évoque les classiques de la fantasy, tout en affirmant une identité propre, nourrie d’une sensibilité à fleur de peau et d’un imaginaire richement visuel. Les illustrations et la carte, réalisées par Céline de Clairval et John Wilmot, renforcent cette immersion.
Mais L’Académie de Santhoryne n’est pas qu’un roman de genre bien mené. C’est aussi un texte sur le passage, sur les silences familiaux, sur les héritages qu’on ne comprend pas encore. La magie, ici, n’est pas un simple pouvoir : elle est aussi une mémoire, une malédiction, une vérité à déchiffrer. Et c’est ce qui rend ce premier tome si fort : sa capacité à allier l’intime et l’épique, le merveilleux et le tragique.
En refermant ce livre, on ne peut qu’attendre la suite. Pas seulement pour connaître l’évolution du conflit ou explorer davantage les arcanes de l’Académie, mais parce que Lùthen est un personnage que l’on n’oublie pas. Et parce que son combat résonne, bien au-delà des frontières du royaume qu’il découvre.