Big Girl – Mecca Jamilah SULLIVAN

Big Girl – Mecca Jamilah SULLIVAN

Big Girl
Par Mecca Jamilah SULLIVAN
Chez Plon

Avertissements de contenu : grossophobie, maladie, mort, racisme.

Malaya, huit ans, soixante-seize kilos. Sa mère s’obstine à la traîner chaque semaine à des réunions Weight Watchers qu’elle déteste.
Partout, son corps hors norme est montré du doigt et considéré comme un problème.
À la maison, les femmes de sa famille lui font subir une pression étouffante. Sur les bancs de son école pour riches Blancs de l’Upper East Side ou dans le Harlem tumultueux des années 1990, Malaya Clondon doit supporter les discriminations physiques et sociales.
La petite fille grandit au rythme du hip-hop sans parvenir à satisfaire la faim qui la tenaille. Il lui faut apprendre à nommer ses désirs et à défier les injonctions d’une féminité qui n’a pas été pensée pour elle.
Big Girl est le roman de sa victoire.


Big Girl est resté un moment dans ma liseuse. Je regardais l’ouvrage avec inquiétude par rapport aux sujets qu’il aborde : grossophobie, racisme, queerness… les injonctions de la société sur une petite fille de huit ans.

Il est donc aisé de dire que Big Girl n’est pas un livre facile, doux et léger. Non, il est lourd, lourd comme les kilos de Malaya, ces kilos qu’elle ignore le plus souvent mais qui sont perpétuellement mis sur le devant de la scène par sa mère, ses camarades, sa faim et la société. Dans les années quatre-vingt dix, les mannequins et les femmes sur les magazines sont toutes fines et sveltes, sans pet de graisse. Et ces femmes, qui plus est, sont rarement voire jamais noires.
Attention de ne pas se perdre : ce n’est pas le poids de notre narratrice qui est remise en cause dans Big Girl. Ce sont le regard des autres, les injonctions et toutes ces choses qui font mal, surtout à une enfant de huit ans. Malaya est vue comme une gamine noire en obésité morbide. Pas juste une gamine, comme elle devrait l’être. Évidemment, la question de sa santé est soulevée mais l’esthétique allait et va toujours en premier en premier lorsqu’il s’agit des gros. Ou pire : un cas d’école et d’étude pour un by-pass, nouveauté de l’époque.

Tout le roman est vu par ce prisme là : le poids. Et justement, c’est dur pour le lecteur. C’est dur pour nous car la souffrance de Malaya est complètement mise de côté. Des kilos et des kilos, elle n’est que ça selon les autres. Mais c’est faux, le poids empêche personne de vivre, encore moins une enfant. Elle grandit, Malaya, elle réussit à dire non, à se défendre, à se trouver un groupe d’amis, à tester sa sexualité. Plus les pages se tournent et plus les cycles du livre avancent, plus Malaya arrive à prendre en mains sa destinée. Rien n’est facile, encore moins lorsqu’on est une femme, noire, grosse, queer. Des quartiers.
Big Girl parle de l’entourage, de comment ce dernier peut être étouffant et porter avec lui les stigmas de la société. Ce roman parle de gentrification, de la douleur des populations noires qui se bâtissent des safe-places et les voir se faire détruire pour le capitalisme.

Big Girl est, d’une certaine manière malgré ses sujets difficiles, un roman qui fait du bien. Il fait du bien, parce qu’ils montrent aux gros qu’on est finalement pas si seuls que ça. Il fait du bien parce que c’est un roman écrit par une femme noire, concernée. C’est une lecture nécessaire.