Célestine - Sophie Wouters ♥♥♥♥♥

Publié le 09 octobre 2021 par Nathalie Vanhauwaert

 Célestine   -   Sophie Wouters  ♥♥♥♥♥















Editions 180 °
Parution : avril 2021
Pages : 132
ISBN: 978‑2-931008‑63‑8
Prix : 15 €
Présentation de l'éditeur
Années 1960, quelque part dans la France profonde. Célestine, orpheline de naissance, est élevée par de lointains parents qui n’avaient jamais voulu d’enfants.
Dix-sept ans plus tard, l’adolescente se retrouve devant la Cour d’assises des mineurs. Mais que s’est-il donc passé pour que la ravissante et douce Célestine, dont l’avenir était plus que prometteur, soit jugée pour un crime dont tout semble l’accuser ?
Artiste peintre, Sophie Wouters signe ici son premier roman. Sous des allures de pérégrinations mélancoliques à la tonalité douce-amère, Célestine explore nos faiblesses humaines qui peuvent quelquefois mener au drame.
L'auteure

Extrait du site de l'auteure :
Pendant plus de vingt ans, mon travail a été essentiellement axé sur l'être humain, son regard, sa solitude, son individualité, ainsi que sur l'universalité et l'intemporalité des sentiments.
L'année 2017 se révéla celle de l'abstraction que j'ai toujours affectionnée mais à laquelle je ne touchais que sporadiquement, comme pour me délester de tous ces regards et ces histoires contées.
Le noir très présent dans mon travail m'a été insufflé par un beau texte de Pierre Soulages:​
"Un jour je peignais, le noir avait envahi toute la surface de la toile, sans formes, sans contrastes, sans transparences. Dans cet extrême j'ai vu en quelque sorte la négation du noir. Les différences de texture réfléchissaient plus ou moins faiblement la lumière et du sombre émanait une clarté, une lumière picturale, dont le pouvoir émotionnel particulier animait mon désir de peindre. Mon instrument n'était plus le noir, mais cette lumière secrète venue du noir."
​Au-delà du travail plus que passionnant qu'est celui de cette "non couleur", j'ai ressenti un besoin toujours plus grandissant de minimalisme. La lecture du livre, de David Foenkinos, "Charlotte" (vie de Charlotte Salomon, artiste peintre), tissé de phrases courtes et incisives d'une profondeur et d'une intensité extrêmes, n'a fait que me conforter dans l'idée qu'en quelques traits essentiels on peut tenter d'approcher l'essence même des choses et de faire le "juste pas trop".
C'est dans l'éventail sans cesse grandissant de médiums que j'ai toujours choisis au gré de mes envies, inspirations et recherches, que l'écriture s'est ensuite naturellement imposée comme un nouveau souffle pour explorer autrement l'âme humaine et que je vis aujourd'hui ces deux modes d'expression avec le même bonheur.
source : http://www.sophiewouters.com/bio-et-expo
Mon avis
Quel magnifique premier roman !  Je comprends mieux la phrase de la quatrième de couverture d'Amélie Nothomb "Cette nuit j'ai lu Célestine.  Ton texte m'a bouleversée, je n'ai pu m'arrêter.  Je te dois une nuit blanche!" .  Comme Amélie, j'ai été happée et bouleversée par le destin de Célestine, à lire de toute urgence !
Années 60 dans un village de la France profonde, un tragique accident coûte la vie de ses parents.  C'est le vétérinaire qui donnera le jour, par césarienne à Célestine , un triste début de vie.  La pauvre orpheline va être recueillie par de la famille lointaine, c'est Berthe et Aristide, couple sans enfant qui vont s'en occuper.
Elle sera élevée avec la télé qui fait son apparition dans les foyers et la religion un point auquel Berthe tient énormément.
1973, Célestine a 17 ans, elle se retrouve devant la cour d'Assises des mineurs accusée d'un crime.  Mais que s'est-il passé pour qu'elle en arrive là ?
C'est ce que le roman va nous apprendre petit à petit en alternant passé et présent.
Comment cette douce et ravissante Célestine car elle est belle comme un coeur,  une créature de rêve, sublime de beauté et de sensualité a pu se retrouver là?
Sophie Wouters explore les faiblesses humaines avec brio dans ce texte court et dense à la fois.  Sa plume tantôt teintée d'humour, de poésie ou de noirceur est magnifique.  L'écriture est touchante, sincère, troublante.
J'ai beaucoup aimé "Célestine", une femme forte et fragile à la fois.  J'ai adoré retrouver les souvenirs télévisuels des années 60  ; "ma sorcière bien aimée", Léon Zitrone, Denise Fabre, toute une époque retracée avec humour et brio.
Je ne vous en dis pas plus, je vous laisse découvrir et savourer cette petite pépite.
Un premier roman primé par le Prix Chapel.
Ma note : 9,5/10  ♥♥♥♥♥
Les jolies phrases
Comme dans ses rêves nocturnes où elle parvenait en battant ses bras dans l'air, tel un oiseau le fait avec ses ailes, à quitter le sol et survoler la pièce où elle se trouvait, elle était arrivée à le faire en cette église.  Elle s'y était parfois retrouvée sur un nuage où elle flânait dans un champ de coquelicots avec Pompidou, Sébastien et sa chienne Belle, et d'autres fois, elle en était redescendue pour suivre ses petits camarades et répéter sagement leurs paroles.Comme elle le faisait aussi merveilleusement bien à la marelle, elle était donc arrivée à se balader avec une grande habilité entre ciel et terre. 
Sa voix à la fois douce et très légèrement rauque était d'une gentillesse et d'une froideur subtilement dosées.  Elle semblait bien souvent observer la vie d'un nuage, effet que ses yeux gris-bleu voilés par la brume qu'elle dégageait de son long fume-cigarette assorti à son grain de peau ne faisaient qu'augmenter.  
Elle avait réalisé très tôt la grande loterie que représentait le hasard de la naissance et n'était donc pas habitée, contrairement à son cher mari, par la moindre once de snobisme. 
Et c'est là, enfermées toutes deux dans la chambre de Célestine et étendues sur son lit, que la petite propriétaire de ces lieux ressentit pour le première fois depuis sa venue au monde l'étrange besoin de s'épancher.  Les remous de son coeur avaient sans doute fait déborder les sentiments qui l'habitaient.
Elle lui faisait penser à certaines oeuvres du musée du Louvre qu'il avait cru connaître dans les moindres recoins et qui n'avaient pourtant cessé de le surprendre en lui révélant à chaque visite un nouvel élément ou un détail d'importance qui les rendait plus belles encore.
Il est bien connu que l'amour a le pouvoir d'embellir les plus malchanceux et d'illuminer chaque personne touchée par sa grâce.
Le vouvoiement permet indéniablement d'exprimer les choses avec délicatesse et politesse mais a tout autant le grand pouvoir de rendre certains propos plus durs encore qu'ils ne l'auraient été avec le tutoiement.