Les fleurs de l’ombre

Par Entre Les Pages @EntreLesPages

Les lecteurs le savent, Tatiana de Rosnay est fascinée par les lieux, par l’effet des maisons sur les gens, par “la mémoire des murs”. Cette expression est d’ailleurs le titre de l’un de ses romans et l’intrigue contient des similarités avec celle des Fleurs de l’ombre

Le personnage des Fleurs de l’ombre, Clarissa, est une écrivaine qui emménage dans un appartement tout neuf et à la pointe de la technologie. Dans celui-ci, un assistant finement paramétré s’occupe de la plupart des tâches quotidiennes, des messages, des visites ou de rappeler à Clarissa de réaliser les examens médicaux demandés par CASA. CASA est le nom de la résidence, réservée aux artistes.

Clarissa est arrivée dans cet endroit vierge de tout avec son histoire riche de douleurs et de traumatismes. Elle a envie d’écrire un nouveau livre, de débuter un nouveau chapitre de sa vie. Elle a ce qu’il faut pour cela mais reste fragile et ce qu’a fait son mari dont elle a décidé de divorcer l’a profondément ébranlée. Rapidement, elle se sent épiée. En permanence. Elle trouve aussi que sa santé physique décline et certains détails lui font penser que CASA fait tout pour qu’elle n’aille pas bien. Doit-elle rester sur ses gardes ou bien a-t-elle trop d’imagination ? 

Les fleurs de l’ombre est décrit, vendu comme un thriller psychologique. Il ne faut pourtant pas s’attendre à des révélations ou à des réponses claires. Ce sont les suppositions de Clarissa qui comptent. Ce sont elles qui mènent aux intéressantes réflexions proposées par l’ouvrage.

L’intérêt de l’intrigue est d’ouvrir des fenêtres vers le monde d’avant, le monde d’aujourd’hui et le monde qui est probablement celui de demain. De faire se confronter les humains et les intelligences artificielles, la création et la technologie. De faire s’interroger sur ce qui est et ce qui est censé être, ce qui va et ce qui ne va pas. Ici, Tatiana de Rosnay tente de voir de quoi l’homme ne peut pas se défaire en dépit de ce que le monde des nouvelles technologies lui apporte, de réfléchir à ce que celles-ci ne pourront jamais remplacer. Peu importe que Clarissa soit vraiment menacée ou non, ce qu’elle ressent lui permet de se préserver et de préserver le monde auquel elle tient. Inévitablement, le lecteur veut faire de même.

Dans Les fleurs de l’ombre, il est aussi question de dépression. Tatiana de Rosnay prend alors le temps de parler de Virginia Woolf et Romain Gary (les origines du titre et le nom de la narratrice n’échapperont pas ou pas longtemps aux lecteurs), de leur écriture, leur maison, leur maladie, leur suicide. Certes, l’être humain a des doutes, des failles, des faiblesses. Mais c’est ainsi qu’il est beau, qu’il crée, qu’il touche, qu’il compte. 

L’écriture est sensible et douce, et les thèmes forts. Tatiana de Rosnay utilise un décor de glace pour explorer les âmes et leur rappeler leur chaleur autant que leur condition de merveilles. Faites qu’elles ne s’égarent pas. Faites qu’elles continuent de créer à tout jamais.

Présentation de l’éditeur :
La romancière Clarissa Katsef quitte son mari à la suite d’une découverte qui l’a profondément bouleversée et peine à trouver un nouveau toit. La chance semble tourner lorsqu’elle est admise, contre toute attente, dans la très convoitée résidence pour artistes CASA. Mais est-ce vraiment une chance ? Après quelques jours passés dans son superbe appartement, au huitième étage d’un immeuble ultramoderne, elle éprouve un malaise diffus, le sentiment d’être observée en permanence. Ses nuits sont agitées, des traumatismes passés reviennent la hanter. Qui se cache derrière CASA, projet à visée philanthropique ? Que veut vraiment ce « bienfaiteur » ? Affaiblie par le drame qui a fait imploser son mariage, tenaillée par le doute, Clarissa s’interroge. A-t-elle raison de se méfier ou cède-t-elle à la paranoïa, victime d’une imagination beaucoup trop fertile ?

éé