Peter Heller : La Rivière

Par Lebouquineur @LBouquineur

Peter Heller, né en 1959 à New York, est un écrivain américain de récits d'aventures et de romans. Il vit actuellement à Denver. Il collabore régulièrement à des magazines et est l’auteur de livres de non-fiction sur la nature, l’environnement, le voyage, l’aventure. Il a été couronné par de nombreux prix. La Rivière, son nouveau roman, vient de paraître.

Wynn et Jack, étudiants, profitent des grandes vacances d’été pour réaliser un rêve, descendre en canoë la Maskwa, dans le Nord du Canada. Amis et habitués de ce genre d’expédition en pleine nature, le voyage s’annonce prometteur. Prometteur certes, mais certainement pas dans le sens où ils l’entendaient. Au loin en aval, un feu de forêt s’est déclaré et monte à leur rencontre et comme si ce n’était pas suffisant pour gâcher leur périple, ils recueillent une femme dans un semi-coma qui a failli se faire assassiner par son mari, mari qui désormais les attend quelque part sur la rivière pour achever son œuvre !

Vous je ne sais pas, mais moi un tel pitch de départ je trouve ça alléchant. Hélas, je n’ai pas trouvé le résultat à la hauteur des possibilités envisagées. Attention, je ne prétends pas que le roman soit mauvais, mais pour moi il n’est que pas mal, sans plus. Ce qui ne me surprend qu’à moitié, car depuis son premier roman paru en 2013, La Constellation du chien, Peter Heller n’a jamais retrouvé ce niveau.

Le parcours en canoë est assez réaliste, l’écrivain pratique cette activité, la beauté de la nature environnante, le fleuve qui peut être calme ou bien fait de rapides nécessitant une bonne technique de maniement de la pagaie, la description angoissante de l’incendie (fumée, odeurs, bruit, chaleur etc.) est réussie. Wynn et Jack sont sympathiques, ils ont en commun leur amour de la lecture et « un regard littéraire posé sur le monde », et leurs compétences se complètent pour ce type d’aventure. Le récit de la descente est entrecoupé de souvenirs de l’un ou l’autre, souvenirs le plus souvent dramatiques ou pénibles (pour eux).

La navigation avance finalement assez tranquillement avec nos deux garçons bien gentils pour un roman bien gentil destiné aux lecteurs bien gentils. Ca monte pourtant en intensité quand ils récupèrent la femme blessée, trop faible pour parler et expliquer ce qui s’est passé. Un tournant dans le récit, car la personnalité des deux gars va s’affronter, Jack du genre combatif, est persuadé que c’est le mari qui l’a agressée, qu’il va les attendre plus loin pour les descendre tous et que dans ces conditions, eux deux doivent le tuer pour s’en sortir ; de son côté Wynn pense qu’il faut toujours parier sur la bonté et que rien ne prouve la culpabilité du mari.   

Un gentil suspense va courir jusqu’à l’épilogue, augmenté par l’intrusion de deux Texans louches et dans les trente dernières pages, l’écrivain comme pris d’une furia inattendue (à moins qu’il n’ait autre chose à faire de plus urgent que d’écrire son bouquin ?) accélère le rythme de son intrigue et la conclut par une fin dramatique et imprévue, les toutes dernières lignes baignant dans un lyrisme pleurnichard, touchant mais un peu nunuche.

Oui c’est un bon roman – sans plus - mais bien trop gentil à mon goût.