Kill the Indian in the child. Elise FONTENAILLE – 2017 (Dès 12 ans)

Par Vivrelivre @blandinelanza

Kill the Indian in the child
Le crime d'exister

Elise FONTENAILLE

Oskar Editeur, octobre 2017
96 pages

Thèmes : Indiens d'Amérique, Canada, Pensionnat, Maltraitance, Histoire, Identité

Le titre de ce court roman en dévoile toute sa teneur, qui n'est malheureusement pas fictive.
Pour l'écrire, Elise Fontenaille s'est inspirée de faits avérés et d'une histoire vraie pour nous raconter celle de Mukwa, 11 ans, indien Ojibwé.

Un homme venait de marcher sur la Lune pour la première fois, et nous, nous jetions au feu des os de bêtes sauvages pour y lire notre avenir...

Canada, Réserve indienne de Marten Falls

Trois ans que son père s'oppose à son départ, mais aujourd'hui, il n'a plus le choix. Comme l'exige la loi, Mukwa doit rejoindre le pensionnat Sainte-Cécilia dans le but, officiel, de lui apprendre l'anglais, puis à lire et à écrire.
Officieusement, comme va douloureusement le découvrir Mukwa, il n'en est rien.

Sous le joug de personnels religieux perversement tortionnaires, dirigés par la cruelle Soeur Marie-de-la-Miséricorde, les jeunes Indiens envoyés dans ces pensionnats autochtones devaient en ressortir évangélisés et assimilés, ayant oublié leur culture maternelle.

Me raser la tête, c'était un peu me tuer.
Tuer l'Objibwé en moi.

Rasés, humiliés, torturés, violentés, violés, évidemment mal habillés et nourris avec des aliments avariés, il leur était interdit de s'exprimer dans leur langue maternelle. Même parler entre eux en anglais pouvaient entraîner de terribles supplices.
Subir, s'habituer, au gré des sept messes par jour, et espérer ne pas faire un pas de travers pour ne pas endurer " la chaise " ou finir au cimetière attenant.

Mukwa, devenu numéro 15, en fera malheureusement l'expérience.
Revenu miraculeusement d'entre les morts, mais avec séquelles, il projette de fuir avec Ahmik, numéro 16, avec qui il s'est lié d'amitié dès le premier jour.
Un dimanche, l'opportunité se présente.

Mais des dangers d'une autre nature se profile hors les murs.

C'est parce que tu n'as pas d'ombre.

C'est le cœur serré et au bord des lèvres que j'ai lu ce roman.
Glacée, révoltée et indignée.

Malgré cette insoutenable réalité, Elise Fontenaille nous permet d'approcher la culture objibwé, avec mentions de coutumes, croyances et légendes, et apporte une fin libératrice à son récit.

L'histoire dont elle s'est inspirée pour écrire celle de Mukwa est celle de Chanie Wenjack, survenue en 1966.
Grâce à un journaliste, Ian Adams (dont la carrière fut écourtée), les autorités menèrent enfin des enquêtes sur ce qui se passait réellement derrière les épais murs des pensionnats autochtones.
Ce qui permit aux langues de se délier, aux Indiens d'être écoutés, entrainant un procès et la fermeture de ces lieux d'épouvante, et la dispersion dans d'autres établissements des personnels (reconnus coupables sans être condamnés).

En 2015, après dix ans de travaux, le rapport Honoring the Truth, Reconciling for the Future puis le discours du Premier Ministre Justin Trudeau, présentent leurs excuses au nom du Canada aux 150 000 enfants indiens qui ont souffert entre 1820 et 1996, et dont 30000 n'en sont pas revenus, reconnaissant là un génocide culturel.
Mais des reconnaissances et réparations, ils attendent toujours.

Merci à Oskar Editeur

Ce roman participe au "Petit Bac 2021" d'Enna pour ma 7e ligne, catégorie Être humain; ainsi qu'à l'Objectif PAL d'Antigone.

Découvrez les avis de Noukette, Mya, Jérôme

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Belles lectures et découvertes !

Blandine.